Des dizaines de milliers de Tunisiens ont manifesté le 13 août dernier à, l’appel de l’opposition (Archives)
Le premier rassemblement prévu hier à partir de 18h00 locales sera l’occasion pour les opposants du Front de salut national de compter leurs troupes, plus de dix jours après la manifestation du 13 août.
L’opposition tunisienne espère mobiliser samedi pour la manifestation lançant sa «semaine du départ» qui doit forcer le gouvernement dirigé par les islamistes d’Ennahda à la démission après un mois d’une impasse politique déclenchée par l’assassinat d’un opposant. Le premier rassemblement prévu hier à partir de 18h00 locales sera l’occasion pour les opposants du Front de salut national (FSN) de compter leurs troupes, plus de dix jours après la manifestation du 13 août qui avait réuni plusieurs dizaines de milliers de personnes.
Un concert d’artistes tunisiens engagés est aussi annoncé dans la soirée. Prévu comme à l’accoutumée devant le bâtiment de l’Assemblée nationale constituante (ANC), en banlieue de Tunis, ce rassemblement doit donner le signal de départ à une semaine de mobilisation à travers tout le pays, alors que les opposants ont jusqu’à présent concentré leur action dans la capitale. Cette campagne annoncée intervient après que la médiation entamée début août par le puissant syndicat Ugtt n’a pas permis une fois de plus vendredi de rapprocher les positions d’Ennahda et celles du Front de salut national, l’hétéroclite coalition d’opposition allant de l’extrême gauche au centre-droit. Le blocage reste le même depuis l’assassinat du député Mohamed Brahmi fin juillet, Ennahda refusant la démission de son gouvernement et la mise en place d’un cabinet apolitique.
Les opposants considèrent ces revendications comme le préalable à des pourparlers directs sur leurs
autres désaccords, tels la finalisation de la Constitution et de la loi électorale. «Pour Ennahda un gouvernement de technocrates déstabiliserait l’Etat. Pour l’opposition, l’Etat est déjà assez déstabilisé», résume le quotidien le Temps hier dans son éditorial titré «Blocage politique, blocage institutionnel».
Les deux camps ont cependant donné des signes timides de concessions, Ennahda admettant que son gouvernement pourrait être amené à démissionner à terme et les opposants insistant de moins en moins dans leurs discours sur la dissolution de l’ANC, leur autre revendication clé. Ainsi, l’Ugtt ne désespère pas de trouver un compromis. «Nous espérons que nous trouverons une solution répondant à l’intérêt de la nation avant tout et qui satisfasse les différentes parties», a indiqué, selon la présidence tunisienne, le secrétaire général de l’Ugtt, Houcine Abassi après une rencontre avec le chef de l’Etat Moncef Marzouki.
La position des islamistes est d’ailleurs fragilisée par le fait que l’Ugtt et le patronat Utica sont favorables à un gouvernement de technocrates pour guider le pays jusqu’aux prochaines élections et laisser l’ANC se concentrer sur la rédaction de la Constitution. Même si la Constituante, n’est toujours pas parvenue, après 22 mois de travail, à rédiger une loi fondamentale consensuelle, les islamistes considèrent avoir la légitimité pour diriger le pays depuis l’élection de cette assemblée. Plusieurs dirigeants d’Ennahda ont même estimé que les revendications de l’opposition constituaient une tentative «de coup d’Etat» modelée sur le renversement par l’armée égyptienne du président islamiste Mohamed Morsi. A l’inverse, pour l’opposition, le régime a échoué sur le plan sécuritaire face à l’essor de la mouvance jihadiste, mais aussi dans le domaine économique, alors que les revendications sociales étaient au coeur de la révolution de janvier 2011.
La crise politique déclenchée le 25 juillet par l’assassinat, attribué à la mouvance jihadiste, du député Brahmi, est le deuxième du genre en six mois. Le précédent gouvernement dirigé par Ennahda était tombé après le meurtre de l’opposant Chokri Belaïd en février.