Crise libyenne : Mandat d’arrêt de la CPI contre Kadhafi

Crise libyenne : Mandat d’arrêt de la CPI contre Kadhafi
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Omar el-Béchir, le président soudanais, n’est plus le seul chef d’Etat en exercice poursuivi par la Cour pénale internationale (CPI) pour génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre au Darfour.

Mouammar Kadhafi, 69 ans, est, depuis hier, centième jour du déclenchement de l’offensive par Washington, Paris et Londres contre la Libye, poursuivi, lui pour «crimes contre l’humanité». «Justice a été rendue» se félicite le Conseil national de transition (CNT), organe politique des rebelles. Les juges de La Haye ont délivré hier, moins de trois mois et demi après le renvoi du dossier par le Conseil de sécurité, deux autres mandats similaires.

Le premier ciblé est Seif Al-Islam, 39 ans, fils et «porte-parole» de l’auteur du Livre vert et le second, son beau-frère, Abdallah Al-Senoussi, 69 ans, le chef des services de renseignements sont soupçonnés d’être «criminellement responsables des meurtres, arrestations, détentions, disparitions et mauvais traitement contre des manifestants non armés et des dissidents présumés commis par les forces de sécurité libyennes» du 15 au 28 février dernier. «Il y a des motifs raisonnables de croire que (…) Mouammar Kadhafi, en coordination avec son cercle rapproché, a conçu et orchestré un plan destiné à réprimer et à décourager la population qui manifestait contre le régime», déclare la juge Sanji Mmasenono Monageng. Selon les juges, Kadhafi, qui exerce un contrôle «absolu et indiscuté sur l’appareil du pouvoir libyen, dont les forces de sécurité, est responsable de meurtres, persécutions et crimes contre l’humanité». Luis Moreno-Ocampo, le procureur de la CPI, qui a été saisi par le Conseil de sécurité des Nations unies le 26 février, soit deux semaines après l’éclatement de la révolte en Libye, a demandé le 16 mai aux juges de la Haye de lancer des mandats d’arrêt contre les trois libyens. Il les soupçonnait de meurtres et de persécutions «par tous les moyens» des manifestants à Tripoli, Benghazi et Misrata. Kadhafi, Seif Al-Islam et Abdallah Al-Senoussi sont «criminellement responsables des meurtres, arrestations, détentions, disparitions et mauvais traitement contre des manifestants non armés et des dissidents présumés commis par les forces de sécurité libyennes», dit-il dans le réquisitoire qu’il a établi après l’ouverture de son enquête le 3 mars dernier. Il est revenu dimanche à la charge pour demander aux «États signataires du statut de Rome» d’arrêter les trois responsables, car «les crimes se poursuivent aujourd’hui», dit-il.

LE JEU TROUBLE DES EUROPÉENS

Pour les Alliés, cette décision de la CPI prouve, si besoin est, que «Kadhafi a perdu toute légitimité morale». «Elle souligne une fois de plus son isolement», estime Anders Fogh Rasmussen, le secrétaire général de l’Otan. «Toute solution impliquant le colonel n’est pas acceptable», déclare Michael Mann, porte-parole de Catherine Ashton, chef de la diplomatie de l’UE et ce, au moment où deux ministres libyens (Ahmed Hijazi et Ibrahim Cherif) menés par leur collègue des Affaires étrangères, Abdelati Al-Obeïdi sont en «pourparlers» à Djerba (sud tunisien) avec des représentants des rebelles et de plusieurs parties étrangères.

Au menu, selon le chef de la diplomatie française, Alain Juppé, «comment et quand Mouammar Kadhafi quittera le pouvoir» et la recherche d’un mémento pour passer «le plus tôt possible» de la phase militaire à la phase politique. L’Europe, qui assiste impuissante à l’enlisement de ce conflit, veut-elle régler le conflit libyen sans Kadhafi ? Un cessez-le-feu après le départ du leader libyen du pouvoir «peut intervenir aux conditions fixées par les Nations unies», explique Juppé. Jean Ping, président de la commission de l’Union Africaine, a probablement raison d’affirmer avant de se rendre au sommet de l’Union africaine que la tournure des événements dans le conflit libyen qui entre dans son cinquième mois est «particulièrement préoccupante» ?