Le président russe, Vladimir Poutine, sort de son silence et dément l’envoi de troupes dans la presqu’île
Dans sa résidence en banlieue de la capitale Moscou, le président russe a dans sa première intervention officielle devant la presse depuis le changement de régime en Ukraine, dénoncé «une prise de pouvoir par les armes à Kiev».
La tension persistait toujours hier entre les Occidentaux et la Russie sur une présence militaire russe en Crimée (sud de l’Ukraine), Washington ayant suspendu ses liens militaires avec Moscou, alors que le président russe Vladimir Poutine a nié l’envoi de troupes dans la presqu’île. Lors d’une rencontre avec des journalistes dans sa résidence en banlieue de la capitale Moscou, le président russe a dans sa première intervention officielle devant la presse depuis le changement de régime en Ukraine, dénoncé «une prise de pouvoir par les armes à Kiev». A ce propos, il a réaffirmé que Viktor Ianoukovitch, destitué et remplacé par un président par intérim, était le seul président «légitime du point de vue purement juridique», tout en concédant que ce dernier «n’a pas d’avenir politique» en Ukraine.
Le chef d’Etat russe a également nié que des forces russes encerclaient les bases militaires ukrainiennes en Crimée, soulignant qu’il s’agissait de «forces locales d’autodéfense». Toutefois, Vladimir Poutine a souligné que toute décision d’employer les forces armées russes en Ukraine serait «légitime». «Si nous prenons la décision d’utiliser les forces armées en Ukraine, elle sera tout à fait légitime», a-t-il déclaré. «Nous avons une demande du président légitime», a-t-il dit en référence à une demande qui lui a été faite par le président déchu Ianoukovitch afin d’utiliser les forces armées russes «pour défendre la population ukrainienne», selon le représentant de la Russie auprès de l’ONU, Vitali Tchourkine. Dans un message daté du 1er mars cité mardi par l’agence Ria Novosti, Viktor Ianoukovitch a affirmé que son pays était «en proie au chaos et à l’anarchie».
«La vie et la sécurité des citoyens, surtout dans le sud-est du pays et en Crimée, sont menacées», a-t-il estimé. De leur côté, les nouvelles autorités en Ukraine ont accusé lundi la Russie d’augmenter sa présence militaire en Crimée contrôlée de facto par des commandos armés et les Occidentaux ont multiplié les menaces d’isolement contre Moscou dans cette crise qui a semé un vent de panique sur les marchés financiers. Dans leur première réaction, les Etats-Unis ont annoncé la veille avoir «suspendu tous les liens militaires» avec la Russie. Cette mesure comprend «les exercices et réunions bilatérales, les escales de navires et les conférences de planification militaire», affirme le porte-parole de la défense américaine, le contre-amiral John Kirby. Le porte-parole a appelé la Russie à «la désescalade de la crise en Ukraine et les forces russes en Crimée à retourner dans leurs bases». Washington, qui a bénéficié ces dernières années de l’appui de Moscou pour l’imposante logistique de l’armée américaine en Afghanistan, a insisté n’avoir pas changé de posture militaire en Europe ou en Méditerranée à la suite de l’intervention militaire russe dans la province ukrainienne de Crimée.
Le seul navire de l’US Navy actuellement présent en mer Noire est la frégate USS Taylor, selon un responsable américain de la Défense cité par l’AFP. Les Etats-Unis ont également prévenu que tout ultimatum lancé par la Russie à l’Ukraine à propos de la Crimée constituerait une «escalade dangereuse» dans cette crise internationale. Sur le plan politique, plusieurs responsables du Congrès américain désireux de soutenir Kiev face à la Russie ont exprimé lundi leur intention d’adopter rapidement des mesures d’aide économique à l’Ukraine, qui pourraient inclure la garantie de prêts à hauteur d’un milliard de dollars. Outre les Etats-Unis, le Canada a menacé la Russie de se faire exclure du G8 si elle ne cessait pas immédiatement l’occupation de la péninsule ukrainienne de Crimée.
Dimanche, les pays du G7 avaient condamné à l’unisson la «claire violation» de la souveraineté de l’Ukraine par Moscou, et ont annoncé la suspension de leurs préparatifs en vue du sommet du groupe des pays les plus industrialisés à Sotchi (Russie) en juin. Face à un risque de dégradation de la situation en Ukraine, la Chine a appelé toutes les parties impliquées dans la crise à chercher une solution pacifique à leurs différends à travers «le dialogue et les négociations». Lors de la troisième réunion d’urgence du Conseil de sécurité tenue lundi sur l’Ukraine, le représentant permanent de la Chine auprès de l’ONU, Liu Jieyi a appelé les parties concernées à «chercher une solution politique à leurs différends à travers le dialogue et les négociations, sur la base du respect des droits et normes internationaux gouvernant les relations internationales, afin de sauvegarder la paix et la stabilité régionales».