La donne internationale est de plus en plus favorable pour attirer les investissements étrangers en Algérie
Les analystes sont formels. La crise en occident est une opportunité pour attirer les investisseurs en Afrique.
L’Algérie sera-telle capable de tirer profit de la crise dans les pays occidentaux? La baisse de la note souveraine des Etats-Unis qui vient de perdre la note triple A et la récession dans de nombreux pays d’Europe du Sud donne des idées aux responsables du secteur des finances en Afrique.
Au moment où l’économie mondiale est secouée par la crise de la dette en Europe et aux Etats-Unis, avec un Japon qui peine à se remettre des conséquences du séisme, les investisseurs devraient se tourner vers l’Afrique, prévoit le président de la Banque africaine de développement, Daniel Kaberuka.
Cette affirmation est tout aussi valable pour l’Algérie si les décideurs analysent correctement les retombées de ces crises et entament des démarches pour en tirer profit au lieu d’en subir les conséquences comme c’est le cas pour les retombées affectant le marché du pétrole.
La donne internationale est de plus en plus favorable pour attirer les investissements étrangers qui manquent cruellement en Algérie. Le pays a été classé parmi les dix premiers pays africains d’accueil en matière d’investissements directs étrangers sur l’année 2010, mais il a marqué un recul en termes de montant de ces investissements.
Selon le rapport 2011 sur les IDE publié par la Cnuced, les investissements étrangers engagés en Algérie se sont établis autour de 2,29 milliards de dollars en 2010 contre 2,76 milliards de dollars en 2009. Sur la base du volume des investissements, l’Algérie est classée, à l’échelle africaine, au 8e rang devancée par l’Angola, l’Egypte, le Nigeria, la Libye, la RDCongo, le Congo et le Ghana. En 2009, l’Algérie était classée 5e à l’échelle africaine devancée par l’Angola, le Nigeria, l’Egypte et l’Afrique du Sud. Mais la détérioration de la conjoncture internationale est conjuguée avec le durcissement des dispositifs d’investissement en Algérie depuis 2009 pour le secteur hors hydrocarbures.
L’exemple le plus frappant est l’instauration de la règle 49/51 pour ce qui est de la répartition du capital des sociétés avec une prépondérance pour l’investisseur local.
Au niveau des tenants de la décision politique, le discours se résume au fait que le pays n’a pas besoin d’argent frais puisque les investissements locaux sont de 286 milliards de dollars sur 5 ans. Le besoin se fait ressentir plutôt dans la quête de management. Il est donc fort à parier qu’aucun mécanisme nouveau ne viendra donner un coup de fouet aux investissements étrangers. Il y a peu de chances pour que les conseils de Daniel Kaberuka soient suivis.
Selon son estimation, il n’y a pas tellement d’opportunités d’investir ailleurs et c’est en Afrique que se situent les opportunités. Il appuie son argumentation en se référant aux pays d’Afrique subsaharienne qui devraient voir leur économie croître de 5,6% cette année et 6,5% l’an prochain, et certains connaîtront même des taux de croissance de 7%, ce qui est considéré comme un seuil permettant une réduction durable de la pauvreté, insiste-t-il.
La croissance est au rendez-vous dans les marchés émergents, souligne-t-il. Mais «imaginez qu’il n’y ait ni la Chine, ni l’Inde ou le Brésil au moment où l’Europe et les Etats-Unis sont en difficulté. Il y aurait une énorme récession, car la Chine, l’Inde et le Brésil prennent le relais». Pour lui, «si l’on pouvait aujourd’hui y ajouter l’Afrique, cela pourrait dynamiser l’économie mondiale».
Daniel Kaberuka insiste sur le fait que l’Afrique a d’autres atouts que le pétrole et les minerais, dans lesquels des investisseurs étrangers sont déjà présents de longue date. 40% des Africains vivent en zones urbaines.
Cela signifie qu’ils ont besoin de logements, d’infrastructures. Ils utilisent du dentifrice, des réfrigérateurs, des appareils ménagers, explique-t-il.
Pour le cas de l’Algérie qui voit sa facture d’importation faire des bonds insensés, le choix de fabriquer toutes sortes de marchandises sur son sol ne manquera pas de créer de l’activité.
Les auditions organisées par le président Bouteflika font ressortir le fait que les efforts pour améliorer la stabilité et la sécurité passent par la production des richesses bénéficiant aux populations. Mais la croissance est-elle suffisante ou faut-il mieux la partager? Daniel Kaberuka cite les exemples de Tunisie et d’Egypte.
«Nous avons appris, avec les soulèvements en Tunisie et en Egypte, qu’il fallait rechercher une croissance économique partagée entre tous, pas seulement des résultats économiques qui font les gros titres», dit-il.
«La Tunisie a connu une croissance de 5,5% pendant presque 7 ans, et beaucoup d’organisations internationales étaient dithyrambiques pour saluer sa réussite. Mais elles ne regardaient pas les inégalités croissantes et le fait que le modèle autoritaire niait les droits de la population», affirme-t-il. «Nous ne pouvons plus ignorer ces questions.
Aujourd’hui, nous devons nous assurer que ces économies croissent et que les fruits de la croissance parviennent au peuple», dit-il, «car si ce n’est pas le cas, ce ne sera pas durable», a-t-il conclu.