Les troubles politiques en Égypte ont des répercussions financières. Les Bourses du monde entier sont en baisse et le prix du pétrole bondit, alors que l’activité économique est grandement ralentie dans le pays. L’Égypte fait trembler le monde économique.
Depuis quelques jours, la situation en Égypte, primée par un soulèvement populaire sans précédant contre le régime en place, a apporté une nouvelle source d’incertitude économique. Une situation qui jette un certain pessimisme sur les chiffres.
L’inquiétude s’accentuerait davantage par le risque d’un effet de contagion qui pourrait déstabiliser tout le Moyen- Orient. En Égypte, tout est pénalisé. Rien ne marche. Les guichets automatiques se vident, la Bourse demeure inopérante, les touristes fuient le pays ou annulent leurs réservations, les entreprises ferment leurs portes.
C’est l’inertie. Tout est à l’arrêt, sauf le mouvement de protestation qui ne cesse de s’amplifier face à un Hosni Moubarak campant sur sa décision de se river sur son fauteuil doré de président. Hier, des centaines de milliers d’Égyptiens ont afflué vers le centre du Caire pour participer à la «marche du million» prévue dans la journée pour exiger le départ du président indésirable.
Rassemblés sur la place Al-Tahrir, les manifestants, dont bon nombre arborent des drapeaux égyptiens, s’apprêtaient à participer à une manifestation géante initiée par l’opposition pour presser le président Moubarak à céder le pouvoir et exiger la formation d’un gouvernement de transition, l’élaboration d’une nouvelle Constitution et la dissolution du Parlement.
La marche devait débuter à 16 heures, alors que l’institution militaire avait rendu public lundi un communiqué dans lequel elle juge «légitimes» les revendications du peuple et s’engage à «ne pas faire usage de la force contre les manifestants».
Une situation chaotique qui ralentit de manière considérable non seulement l’activité économique dans le pays mais aussi l’influence des marchés boursiers et les perspectives économiques mondiales.
Et pour preuve, les prix du pétrole ont atteint le seuil le plus haut niveau depuis le 29 septembre 2008. Le cours du Brent avait bondi lundi, franchissant la barre des 100 dollars, grimpant jusqu’à 101,73 dollars. Hier, la tendance était légèrement baissière mais se maintient toujours au-dessus de la barre des 100 dollars. Cette envolée subite des cours de l’or noir est nourrie par les peurs sur d’éventuelles interruptions de livraisons par le canal de Suez.
Avec les détroits de Malacca, de Gibraltar ou d’Ormuz, le canal est une des sept portes du commerce maritime mondial. Par lui passe 1,6 million de barils par jour. Sans lui, les supertankers devraient faire un détour de 10 000 km autour de l’Afrique. Le volume du trafic de ce canal est considéré comme indicateur de la santé du commerce maritime dans le monde.
Pour l’instant, rien n’indique que le canal est menacé, mais les marchés sont nerveux, notamment suite à l’annonce du groupe maritime et pétrolier danois A.P. Moeller-Maersk de maintenir pour la deuxième journée consécutive la fermeture des bureaux de ses filiales Maersk Line, Safmarine et Damco ainsi que du terminal de conteneurs de Suez.
La situation d’affrontement qui prévaut en Égypte a donné des frissons aux places boursières mondiales. Elle inquiète de plus en plus les marchés qui commencent déjà à basculer vers le rouge. En effet, si la Bourse de New York évoluait à l’équilibre lundi, le Nasdaq cédait 0,13% alors que les bourses européennes terminaient nettement dans le rouge.
La Bourse de Londres a terminé dans le rouge, l’indice Footsie-100 des principales valeurs perdant 18,43 points. À la Bourse de Paris, l’indice vedette CAC-40 arrivait in-extrémis à clôturer en équilibre, sur une note stable (+0,08% à 4 005,5 points). Par contre, la Bourse de Francfort a terminé en baisse.
L’indice Dax des trente valeurs vedettes de la place a cédé 0,36% pour finir à 7 077,48 points, et le MDax des valeurs moyennes a reculé de 0,93% à 10 139,89 points. Ailleurs, dans l’économie égyptienne, il semblait y avoir du sable dans l’engrenage.
Selon les médias sur place, non seulement Internet est encore bloqué mais la Bourse du Caire a plongé de 10 % en deux séances et les banques seront encore fermées aujourd’hui. Le nombre d’entreprises qui ont fermé temporairement leurs portes ou pour une période indéterminée ne cesse d’augmenter.
C’est le cas du cimentier français Lafarge et italien Italcementi, la banque Crédit Agricole, France Télécom, la compagnie pétrolière russe Loukoïl, le groupe d’ingénierie suisse ABB, le producteur de gaz Novatek, le gazier polonais PGNiG, le groupe énergétique allemand RWE ou encore le constructeur automobile Nissan.
Signe et conséquence d’une inquiétude grandissante, l’agence de notation Standard and Poor’s a annoncé avoir abaissé la note souveraine de l’Égypte et envisage une nouvelle dégradation dans les trois mois en raison de l’instabilité politique dans ce pays au lendemain d’une décision similaire de l’agence Moody’s. Et le pire risque de se produire dans le cas où la situation actuelle demeure inchangée.