Kada Berrahal, le directeur général de la Sarl Ouest Import, spécialisée dans l’importation et ayant sous sa coupe les deux raffineries de sucre de Mostaganem et Khemis Miliana, a animé, hier, une conférence de presse consacrée aux véritables raisons de la hausse des prix du sucre.
M. Berrahal a abordé les contraintes engendrées par le système du contingent limitant aux importateurs algériens de ne traiter auprès des fournisseurs européens que durant les mois de novembre et décembre de chaque année, ainsi que des caractéristiques des marchés des sucres roux et blanc dont les plaques tournantes boursières demeurent respectivement Londres et New York.
L’importateur a expliqué que le contingent accordé aux trois importateurs nationaux est de 150.000 tonnes avec une suspension des droits de douanes de 30%, car sans cette faveur et au regard du cours actuel de 759 dollars la tonne et en ajoutant les frais additifs oscillant entre 3 et 4 DA au kilo, le prix de ce dernier atteindra, une fois au port, les 92 DA, alors que son prix de gros avoisine les 100 DA.
Par ailleurs et pour illustrer la hausse fulgurante du sucre, considérée à juste titre comme matière première, M. Berrahal a rappelé que pour le contingent de l’année 2008, le cours mondial variait entre 277 et 341 dollars la tonne et que l’année suivante et toujours en période de contingent, le cours a augmenté pour se situer entre 319 et 431 dollars.
Mais, l’ascension fulgurante est observée pour l’année en cours avec des records jamais égalés et variant entre 597 et 628 dollars la tonne, alors qu’en dehors de la période indiquée, le prix atteint les 759 dollars, soit le double de celui de 2008, lorsqu’il n’était que de 325 dollars.
La seule nouveauté pour cette année serait, selon l’importateur, la dernière décision émanant des ministères des Finances et du Commerce, prise à la fin de novembre 2009, donnant le quitus aux importateurs d’effectuer leurs transactions en dehors de la période de contingent, une option qui serait en voie de délaissement.
Par ailleurs, et en plus de ces données inhérentes au marché mondial, le conférencier a mis l’accent sur les charges supplémentaires nées des capacités, aussi bien humaines que matérielles, en matière de déchargement de marchandises au niveau des ports nationaux. Des capacités portuaires inadaptées.
Sur ce plan, l’orateur fera un distinguo entre les capacités nationales estimées à 600 tonnes par jour, alors qu’en Mauritanie, elles sont de 2.000. Ceci étant, les pénalités de retard, pour les navires en rade et de prélèvement des conteneurs, appelées dans le jargon portuaire de suristaries, sont un autre facteur pénalisant, car même en temps normal, les dépenses supplémentaires d’entreposage et de gardiennage sont de l’ordre de 3,5 à 4 DA, le kilo, des dépenses qui sont doublées, voire triplées, en cas de dysfonctionnements.
Concernant le sucre roux importé pour le raffinage, le prix est fixé sur la place new-yorkaise par un indice de points, devait encore expliquer M. Berrahal, un mode d’évaluation distinct de celui du sucre en tant que produit. A titre comparatif, cette matière première est passée de 13,21 points, en 2009, à 23,57 durant l’année en cours.
Ce qui est l’équivalent de 83 DA TTC pour le kilo de sucre roux, alors que le sucre blanc atteint actuellement les 86 DA. L’intervenant a indiqué que depuis le forum organisé les 6 et 7 février à Dubai, le marché s’est stabilisé et que la solution définitive est de carrément annuler la TVA (17%) et de réduire à 20% les droits et taxes (30%) endossées par l’importateur, à hauteur de 52% étant donné que la TVA est doublement payée afin d’espérer de faire diminuer le prix du sucre.
A cela s’ajoute les contraintes engendrées par l’entrée en vigueur du crédit documentaire imposé aux importateurs dans le cadre de la LFC 2009, alors que le sucre est considéré comme une matière première étant donné qu’il est utilisé par plusieurs activités industrielles et artisanales.
Par ailleurs, M. Berrahal a dressé un tableau exhaustif en matière de production de sucre, notamment chez les gros producteurs comme le Brésil, l’Inde et l’Union européenne, pour conclure que le déficit mondial se situerait à hauteur de 13 millions de tonnes et la nouvelle tendance de certains producteurs de consacrer une partie de leur production de betteraves aux différents carburants afin de faire face à la hausse du pétrole, et ce, au détriment de la demande mondiale.
L’ALGÉRIE EXPORTERA LE SUCRE EN 2012 ?
Au plan des perspectives, M. Berrahal a affiché un optimisme justifié en premier lieu par le démarrage, à partir d’aujourd’hui, de la raffinerie de Khemis Milana et celle de Mostaganem, en mars prochain, et ce, pour une capacité quotidienne de production de 700 tonnes.
Selon lui, ces deux unités qui ne fonctionnent actuellement qu’à 30% de leur véritable potentiel sont appelées à aller de l’avant avec un investissement de pas moins de 100 milliards.
Pour rappel, ces deux unités qui emploient 700 agents et jadis sous la coupe de la défunte Enasucre, ont été cédées par le CPE à la Sarl Ouest Import, dans le cadre de leur privatisation.
La remise en marche de ces deux unités avec, notamment, un produit aux normes européennes ainsi que d’autres à travers le pays feront dire aisément à M. Berrahal que dans deux ans, l’Algérie possède tous les atouts afin de satisfaire le marché national et même d’exporter!
Salah C.