Crise de logements et passe-droits : Pour le ministre de l’Habitat, «les Algériens sont satisfaits»

Crise de logements et passe-droits : Pour le ministre de l’Habitat, «les Algériens sont satisfaits»

Favoritisme et népotisme dans l’attribution des logements sociaux? Révolte urbaine des mal-logés ? Pour Nourredine Mousssa, ministre algérien de l’Habitat et de l’Urbanisme, tout va bien dans les meilleurs des mondes. « Les gens sont satisfaits », s’est hasardé à dire samedi 10 septembre, le ministre au cours d’une conférence de presse animée à Alger en marge d’une réunion consacrée à l’évaluation de son secteur.

Si des émeutes éclatent périodiquement en Algérie pour une histoire d’exclusion des listes des bénéficiaires et de pratiques illégales dans l’attribution de logements sociaux, le ministre en charge du secteur de l’Habitat semble peu inquiet.

Les gens sont heureux »

« Est-ce que c’est tout le monde qui se révolte ? Les gens sont satisfaits. Ceux qui se révoltent, je les comprends, sont une minorité. Ceux-ci sont impatients comme si les programmes de construction vont s’arrêter », minimise-t-il.

Pour le ministre, ce sont des « affairistes » qui sont à l’origine des troubles liés au logement. « Ils bénéficient des logements de l’Etat pour les revendre. Cette minorité est nuisible à la société », fus tige M.Moussa. Des noms ? Ces affairistes sont ils tapis dans l’administration ou dans de hautes sphères ? Motus et bouche cousue.

Pour se donner un semblant d’autorité, le ministre menace : « Le logement public locatif est un bien de la collectivité. Ce n’est pas un don. Ceux qui font du commerce s’exposent au code pénal. Ils peuvent s’adonner aux combines, mais il arrivera le jour où ils seront redevables de leurs actes », promet-t-il.

« Le dispositif réglementaire garanti la transparence et l’équité »

Les opérations d’attribution des logements sont entachées de divers irrégularités, selon les témoignages des habitants-lésés. Là encore, le ministre nie tout en bloc. « Le dispositif réglementaire (décret 08-142 du 11 mai 2008,Ndlr), fixe les conditions d’éligibilité comme l’ancienneté de la demande, les conditions d’habitat, le statut marital et le revenu. Ce dispositif garantit la transparence et l’équité. Il y a des enquêtes sociales pour confirmer les informations avancées par le postulant ainsi que des recoupements avec la CNAS. Nous avons créée aussi le fichier national du logement », affirme avec beaucoup d’assurance M. Moussa.

Il s’emporte contre ceux qui dénoncent la mauvaise gestion du dossier du logement. « Il y a des choses sérieuses qui se font dans ce pays. Il ne faut pas accuser iniquement le gouvernement, en répondant l’idée selon laquelle les choses se font dans l’anarchie et par le biais de la corruption », peste le ministre, invitant les citoyens disposant de preuves liées à la corruption à les présenter publiquement.

Alors qu’au début de sa conférence, celui-là même qui affirmait que le dispositif d’attribution ne souffre d’aucun dysfonctionnement, M. Moussa se déjuge en partie. « Nous avons introduit un décret en cours d’étude au gouvernement pour renforcer la transparence et l’équité et faciliter les conditions d’attribution de logement », avance-t-il.

Interrogé sur les retards dans la livraison des logements sociaux dans la capitale, théâtre d’émeutes la semaine dernière, le ministre de l’Habitat recours au déni. « Il y a pas de retard dans la livraison des logements. La wilaya d’Alger a déjà entamé la livraison de 3 245 logements », affirme-t-il.

Manque d’assiettes foncières

Entre 2004 et 2009, Alger a bénéficié de plus de 10 % du programme national de logement, « une répartition appréciable » selon lui, malgré un le manque d’assiettes foncières.

Pour contourner cet écueil, la capitale a, en outre, bénéficié de 600 hectares d’assiettes foncières sur un total de 9 600 hectares retenus sur le foncier dit agricole, d’après lui.

Interpelé sur les critiques contenues dans le rapport Mme Raquel Rolnik, rapporteuse spéciale des Nations unies sur le logement, M. Moussa reproche à la presse de n’y voir que les aspects négatifs.

« Vous n’avez retenu que les points négatifs. Elle a dit que l’Algérie a consacré 17% de son PIB à la construction de logements, que notre pays est l’un des rares, sinon le seul pays du monde qui construit sans faire appel aux fonds privés et que les programmes sont énormes. Moi, je n’ai retenu que cela », réplique-t-il, affirmant que la rapporteuse onusienne est dans son « rôle et dans droit » d’établir un pareil rapport. « Nous attendons le rapport final », poursuit-il.

Pris sous le feu de la contestation social, né autour de la distribution de logements, le gouvernement a annoncé dimanche 10 début juillet un plan d’urgence : construire 500.000 logements d’ici à 2014

Outre la construction d’un million et demi de logements entre 1999 et 2009, le gouvernement avait annoncé également la réalisation d’un autre million avant l’année 2014. Cependant, la crise est loin d’être solutionnée.

La preuve ? Elles sont quelque 553 000 familles à s’être installées dans des habitations précaires, dont 50 000 dans des bidonvilles autour de la capitale.