Crise céréalière : L’urgence d’un dialogue

Crise céréalière : L’urgence d’un dialogue

Le président de la fédération nationale des boulangers cité par El-Khabar affirme que «les stocks des boulangers en farine se sont épuisés et que la crise s’est accentuée depuis quelques jours».

Le président de la fédération nationale des boulangers cité par El-Khabar affirme que «les stocks des boulangers en farine se sont épuisés et que la crise s’est accentuée depuis quelques jours».

Il rajoute que «ce produit reste introuvable et que s’il est disponible chez certains grossistes, il est souvent proposé à des prix plus élevés que celui subventionné par l’Etat, c’est-à-dire à 2.000 dinars le quintal». Il semble donc que la taxation à l’importation des céréales prévue par la LFC 2010 n’a pas eu l’effet escompté. Les industriels de la transformation persistent à rejeter les produits locaux au profit de l’importation de blés durs et tendres. Un marché qui selon l’agence Reuter « n’a pas connu de baisse significative», du fait de la demande sur les céréales, qui constitue la ration alimentaire de base des algériens, et qui ne risque certainement pas de chuter. «L’algérien consomme de 180 à 200 kg de céréales (blés dur et tendre) par an. C’est là un énorme marché que les industriels algériens ne veulent pas perdre au profit des importateurs de produits finis.

D’autant plus, qu’ils ont vraiment peinés pour asseoir leurs produits sur le marché national et même international», souligne un connaisseur qui avoue ne pas comprendre la logique des pouvoirs publics. De plus, il n’est pas le seul de cet avis, l’importation d’un blé de bonne qualité, vaut beaucoup mieux pour les industriels que l’utilisation de blés locaux quitte à payer des taxes supplémentaires. «L’algérien est un fin connaisseur en matières de pates et autres produits céréaliers, mettre des produits de qualité, même moyennes, sur le marché c’est courir le risque de mévente et surtout de perdre sa réputation», nous dira un meunier de la région. C’est d’ailleurs déjà arrivé, un meunier dans la wilaya d’Ain-Temouchent à mis la clé sous la porte après avoir travaillé exclusivement avec les produits locaux. La mauvaise réputation de la production nationale n’est pas abusive. Il semble que les céréales locales ont une très mauvaise réputation. Une réputation qui n’est pas surfaite mais la conséquence d’un mauvais «canevas technique». Les meuniers relèvent «un taux d’impureté de 25%, bien au dessus de la normale», lors de la réunion qu’ils eurent avec le ministre de l’Agriculture en mars dernier.

Ils avaient quasiment conditionnés leurs achats de produits nationaux par un nettoyage plus approfondi des récoltes. «La balle n’est pas seulement du coté des céréaliculteurs», nous dira un ingénieur spécialisé dans les grandes cultures. L’OAIC a une part de responsabilité non négligeable dans le traitement et le stockage des céréales. Un problème récurrent qui d’ailleurs fut largement discuté lors de la rencontre des céréaliculteurs organisée récemment par le groupe agro-industriel Benamor et qui fut «ovationné» par les pouvoir publics. «L’insuffisance des moyens de stockage, et la vétusté d’une grosse partie des infrastructures existantes est le point faible de l’OAIC qui a toutes les peines du monde à stocker dans de bonnes conditions les récoltes, particulièrement quand elles sont aussi exceptionnelles que celle de 2009 et de cette année. D’importantes déperditions sont constatées que d’aucuns estiment entre 5 et 8% des quantités stockées » selon un expert. En mars dernier, le conseil des participations de l’Etat (CPE) avait donné son feu vert au projet de réalisation d’infrastructures de stockage de céréales présenté par l’OAIC. Un programme qui se chiffre à quelques 32,5 milliards de dinars.

L’importation en urgence engagé par l’OAIC serait-elle la conséquence directe de la mauvaise qualité des blés durs locaux et des plaintes récurrentes des semouliers ? Ou est-ce la conséquence du forcing pratiqué par les pouvoir public omnibulé par la réduction de la facture céréalière et l’écoulement des 6 millions de quintaux de blés en stock au niveau de l’OAIC ? Quand à la crise sur les blés tendre qui se dessine, serait elle aussi la conséquence de la mauvaise qualité ? Ou est-ce, comme le souligne le ministre du Commerce lors de sa tournée oranaise «le fait des spéculateurs» ? A cet effet, le dit ministre, interpellé sur la concurrence déloyale faite au boulanger par les vendeurs de pain traditionnel, avait reconnu en tant que «citoyen » que le prix du pain n’est pas «juste» mais qu’il s’agissait là de «paix sociale».

La relance du Conseil inter professionnel des céréales enclenchée en mars dernier par le ministre de l’Agriculture bute sur une multitude de problèmes, dont le plus important semble être l’absence de véritable dialogue. Un dialogue dont les fondements seraient d’établir une véritable stratégie alimentaire qui implique producteurs, transformateurs et consommateurs et dont les principes ne se limiteraient pas à la seule réduction de la facture alimentaire mais à produire de qualité, c’est-à-dire «labéliser» le produit national.