Les choses se sont accélérées d’une façon incroyable
Il faut un plan bien précis et bien finalisé pour que l’intervention militaire soit efficace.
Au moment où le commandant de l’Africom, l’Américain Carter Ham, estimait lors d’une conférence de presse animée à Niamey qu’il n’y aura pas de solution satisfaisante au Mali sans l’Algérie, le président français décidait l’envoi de troupes françaises dans ce pays du Sahel. Selon des sources crédibles, une centaine de militaires français avaient déjà commencé à encadrer les troupes maliennes et à diriger les opérations bien avant l’intervention télévisée surprenante de François Hollande. Celui-ci a déclaré qu’il avait pris cette décision suite à la demande officielle présentée par le président Traoré. François Hollande n’a fait que confirmer un fait accompli salué par la majorité de la classe politique française.
Un fait accompli qui renseigne fort sur les intentions d’un chef d’Etat pressé de créer une diversion dans un pays qui éprouve de grandes difficultés à s’en sortir économiquement. A-t-il au moins pris la décision d’informer les Algériens? Rien n’est moins sûr si l’on s’en tient au mutisme observé par Alger. Le président français a-t-il informé les Américains? Probable; mais quel sens pourrait-on donner aux propos du commandant américain Carter Ham qui a déclaré le jour même que «nous savons que l’option militaire n’est pas la bonne, mais nous devons nous y préparer. Il faut un plan bien précis et bien finalisé pour que l’intervention militaire soit efficace». Carter Ham est-il en retard d’une guerre ou joue-t-il les ignorants? Difficile à répondre. Au moment où François Hollande confirmait l’engagement des troupes françaises au Mali, l’officier supérieur américain déclarait que son pays n’avait reçu aucune demande officielle de la part du Mali. «Nous n’avons pas reçu de requête spécifique, il est probable qu’on nous demande une assistance financière, un appui logistique […] en renseignements et en formation de militaires», a-t-il affirmé.

«Les Etats-Unis sont prêts à satisfaire ces requêtes», a-t-il ajouté. Pourquoi le président français a-t-il pris tout le monde à court? Pourquoi a-t-il choisi le moment où des parties maliennes étaient réunies à Adrar pour essayer de trouver une solution politique consensuelle? Pour le moment, il est prématuré de répondre à toutes ces questions, mais il serait intéressant d’attendre la réaction des Français au cas où l’information faisant état de la mort d’un pilote français serait confirmée.
Des sources ont rapporté hier qu’un avion français aurait été abattu dans le désert de Mopti, une ville devenue subitement plus importante aux yeux de François Hollande que les manifestations populaires prévues en France pour dénoncer le mariage homosexuel. Inquiétant! Mais prévisible dans la mesure où en réalité, François Hollande ne fait que rétablir l’ordre colonial pour préserver les intérêts de la France. L’Algérie, qui partage une frontière de près de 1500 km avec le Mali, a été prise de vitesse, voire trahie et le mot n’est pas exagéré, car au moment où elle réussissait à établir un ordre diplomatique du bien-fondé des négociations, elle est aussitôt poignardée. Désormais, elle fera face à Al Qaîda au Maghreb islamique, à sa prétendue dissidence le Mujao et finalement à Ansar Eddine. A l’évidence, ni le gouvernement malien, ni la rébellion touarègue, ne nourrissaient l’idée défendue par l’Algérie pour éviter une catastrophe à ses frontières. Ces dernières, confient des sources, seront fermées définitivement. C’est une décision souveraine.
Cependant, cela n’empêche pas que la France vise à réaliser un rêve colonial aux frontières algériennes. Ses troupes cernent parfaitement le pays. Elles sont présentes en Libye, en Mauritanie, au Tchad, en Côte d’Ivoire, au Niger et au Mali. Une présence remarquable qui laisse deviner que l’Algérie est ciblée. Les dessous logiques d’une intervention militaire inopinée.