Crise au Mali : Alger entre la diplomatie de Wachington et les pressions de Paris

Crise au Mali : Alger entre la diplomatie de Wachington et les pressions de Paris

Au sujet de l’intervention armée au Nord-Mali, les déclarations de la secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, en visite éclair à Alger, aujourd’hui, à l’issue de son entretien avec Abdelaziz Bouteflika, sont empreintes de diplomatie et de courtoisie alors que Paris se précipite et multiplie les déclarations. Entre diplomatie et pression, Alger est mis à l’heure de l’intervention au Nord-Mali.

Comme attendu, la discussion entre le chef de l’Etat, Abdelaziz Boteflika et la secrétaire d’ d’Etat américaine, Hillary Clinton, en visite éclair aujourd’hui, lunidi, à Alger, ont porté sur la situation sécuritaire qui prévaut au Nord Mali occupé depuis plus de six par les groupes armés d’Al Qaïda au Maghreb islamique. Sur ce sujet, Hillary Clinton a déclaré à l’issue de la rencontre « Nous avons fait le point sur nos relations bilatérales extrêmement  fortes et nous avons souligné le fait que nous venons tout juste de tenir une  excellente conférence de dialogue stratégique qui s’est tenue la semaine dernière  à Washington, comme nous avons eu des discussions très approfondies sur la situation  dans la région (Sahel) et surtout la situation qui prévaut dans le nord du  Mali »

La secrétaire d’Etat a déclaré avec beaucoup de diplomatie dans le propos avoir « apprécié l’analyse du président Bouteflika qui est fortement  enrichie de sa très longue expérience de la région pour faire face à la situation  très complexe et aux problématiques très compliquées au nord du Mali, mais aussi  pour faire face aux problèmes du terrorisme et de trafic de drogue dans la région« .

Cette rencontre, la deuxième, cette année, avec le chef de l’Etat, Abdelaziz Bouteflika, sera suivie, a-t-elle annoncé « le biais  des experts en mode bilatéral et dans le cadre de concertations avec les partenaires  de la région, avec l’Union africaine, la CEDEAO et les Nations Unies pour essayer  de trouver des solutions à ces problèmes »

Par cette visite de quelques heures à Alger, après celle du commandant en chef US de l’Africom,  Wachington a-t-il voulu arracher à Alger sa participation à l’intervention armée au Nord-Mali décidée par Bamako et la Cédéao sous mandat approuvé du conseil de sécurité de l’ONU qui, ainsi que l’a déclaré Hillary Clinton, après son aduience avec Abdelaziz Bouteflika, sont des partenaires clés des concertations dans lesquelles s’inscrit cette brève visite à Alger. A la différence de la France, Wachington prend son temps avec Alger sur ce dossier mais reste ferme sur la lutte antiterroiste contre Al Qaïda. Les Etats-Unis et la France, pays les plus engagés sur sur le front du Nord-Mali, sont disposés à fournir un appui logistique, mais considèrent avant tout que l’Algérie est « incontournable » dans le règlement de cette crise.

Intervenant à quelques semaines de la visite d’Etat à Alger du président de la république français, François Hollande, la présence de la visite de la secrétaire d’Etat américaine se veut-elle plus « stratégique » dans le temps que celle de Paris qui a multiplié ces derniers jours des déclarations, par la voix du ministre des Affaires étreangères, Laurent Fabius, à la fois sur la situation au Nord-Mali et sur la coopération avec l’Algérie, soulevant une certaine animosité chez son homologue, Mourad Medelci.  De plus, à la hâte de Paris de voir Alger rentrer dans les rangs des armées ouest-africaines, s’ajoute les fantômes du passé colonial qui ressurgissent au détour de tout dossier épineux. Alors que Paris presse Alger à donner son feu vert pour une opération internationale, Wachington use de diplomatie et n’entend pas se précipiter. Selon le point de vue des experts et des diplomates, Wachington a l’oreille d’Alger : « Au vu de l’étroite collaboration militaire et sécuritaire entre les Etats-Unis et l’Algérie, les Américains pourraient être plus compréhensifs que la France sur cette allergie algérienne face à une intervention militaire étrangère », analysait il y a quelques jours Gilles Yabi, de l’International Crisis Group (ICG).

Mais d’un autre côté,  Alger et Paris ont une longue expérience d’échanges de renseignements sécuritaires sur les cellules actives ou dormantes d’Al Qaïda au Maghreb islamique.

Dans tous les cas, courtisé ou pressé, Abdelaziz Bouteflika ne peut longtemps défendre une démarche dialoguiste au Nord-Mali. Il sera même contraint de se désavouer  sur les premières tentatives de dialogues engagées en juin dernier avec l’un des groupes armés d’Al Qaïda au Maghreb islamique, Ansar Eddine, une rencontre contre productive.  Wachington et Paris considèrent qu’Alger qui combat Al Qaïda au Maghreb islamique sur son propre sol, ne peut se rebiffer  face à ses « émirs » algériens qui menacent l’intégrité territoriale de ses frontières.

Pour rappel, la communauté internationale a adopté le 12 octobre, via le Conseil de sécurité de l’ONU, une résolution préparant le déploiement d’une force internationale de quelque 3.000 hommes au Mali. Le Conseil a donné jusqu’au 26 novembre à la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) pour préciser ses plans.

R.N