Le ministre des finances a fait deux déclarations contradictoires concernant l’endettement entre le 06 septembre et le 02 novembre 2015.
Ayant consulté des experts financiers de haut niveau, pour ne pas induire en erreur l’opinion publique, je donne les précisions suivantes :
Première déclaration du ministre des finances, M. Abderrahmane Benkhalfa :
1.-« L’Algérie n’a pas besoin de s’endetter de l’extérieur » ( source APS 06 septembre 2015- 15h38)

« L’Algérie n’a pas besoin pour l’instant de recourir à de l’endettement extérieur (c’est-à-dire s’endetter auprès d’institutions ou de pays étrangers) pour faire face à ses engagements budgétaires. L’Algérie a besoin de l’argent des Algériens, de ses ressources internes qu’elle veut intégrer dans le circuit bancaire » Abderrahmane Benkhlafa
2.- Deuxième déclaration ministre des finances M. Abderrahmane Benkhalfa :
« L’Algérie fera appel au crédit concessionnel » : (Forum -Radio nationale 02 novembre 2015)
« Concernant l’endettement extérieur, il ne s’agit pas de l’endettement classique, mais du crédit concessionnel qui sera destiné à l’investissement. Autrement dit, c’est de l’Investissement direct étranger (IDE). C’est le retour aux méthodes alternatives de financement de nos projets . »
3.- Qu’est ce que le crédit concessionnel ?
Le ministre des finances parle de crédits concessionnels, terme technique que ne connaissent pas les simples lecteurs qui sont des prêts non assortis des conditions traditionnellement exigées par les banques commerciales et autres prêteurs à l’égard de l’emprunteur en matière de garanties. Ces prêts offrent un certain nombre d’avantages à l’emprunteur au niveau soit des garanties soit des taux d’intérêt. L’une des conditions d’un tel prêt peut être un taux d’intérêt faible voire nul. En outre, dans certains cas, l’emprunteur peut bénéficier d’une exonération temporaire des remboursements. Autrement dit, ce sont des prêts qui comportent un élément « don ». Le problème qui se pose est ce que l’Algérie pourra lever ces prêts à des intérêts bonifiés, accordés non par des banques commerciales mais par les instituions financières internationales, non pas apr des banques commerciales, souvent d’un faible montant, à la demande des Etats qui souvent connaissent des difficultés ? Je précise au ministre qu’ un crédit est un crédit et il faudra toujours le rembourser avec des intérêts même faibles, sachant qu’au niveau international les taux directeurs bancaires le 02 novembre 2015 sont les suivants.
Taux directeur FED 0,25%
Taux directeur Banque d’Angleterre 0,50%
Taux directeur BEC 0,05%
Taux directeur Japon 0,10%
Ma position est connue : je ne suis pas contre, s’il est destiné non pas à accroître les importations mais à encourager l’investissement destiné à accroître la valeur ajoutée interne, à condition qu’il permette de rembourser le prêt initial et les intérêts. Je rappelle que le 29 octobre 2015, l’Inde vient d’offrir un crédit concessionnel de 100 milliards USD à l’Afrique, portant sur les cinq prochaines années, et a aussi octroyé une aide subventionnelle de 600 millions USD.
Précisons au lecteur la définition de la concessionnalité telle que définie par le FMI, la Banque mondiale et l’OCDE qui constitue un endettement dont le risque varie selon que le pays est vulnérable ou pas. Je cite les analyses des organismes internationaux.
« Le degré de concessionnalité d’un prêt se mesure à partir de son «élément don». L’élément don est la différence entre la valeur nominale du prêt et la somme de la valeur actuelle des futurs paiements que devra effectuer l’emprunteur au titre du service de la dette, exprimée en pourcentage de la valeur nominale :
valeur nominale – valeur actuelle
——————————————— x 100
valeur nominale
Si le taux d’intérêt du crédit est inférieur au taux d’actualisation, la valeur actuelle de la dette est inférieure à sa valeur nominale et la différence correspond à l’élément don (positif) du prêt. Le taux d’actualisation qui sert à calculer la valeur actuelle du prêt est une hypothèse fondamentale dans le calcul de l’élément don. Les taux d’actualisation dont se sert le FMI sont les «taux d’intérêt commerciaux de référence» (TICR) propres à chaque devise. Un pays qui accuse des vulnérabilités d’endettement relativement élevées devrait en effet adopter des exigences de concessionnalité plus rigoureuses. À l’inverse, si ces vulnérabilités sont relativement faibles, des exigences plus souples peuvent être considérées. Dans le même ordre d’idées, plus la capacité de gestion d’un pays est élevée, mieux il sera en mesure de gérer des exigences plus souples, mais aussi techniquement plus délicates, en matière de concessionnalité et de les mettre à profit » (fin de la citation).
4.-Il faut de la part de responsables un discours de cohérence si l’on veut attirer les investisseurs étrangers, rendre confiance aux investisseurs locaux et à la population algérienne inquiète de son devenir avec la chute du cours des hydrocarbures et le dérapage du dinar. Or je note une contradiction entre la déclaration de l’actuel Ministre des finances en date du 06 septembre 2015 et celle faire le 02 novembre 2015, à peine deux mois d’intercale.
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