Coupures d’électricité suivies par des perturbations dans l’alimentation en eau potable. Durant vingt-quatre heures, la population algéroise était coupée du monde. Le même phénomène a eu lieu il y a quelques jours dans plusieurs régions de l’intérieur du pays, suivi très souvent par des manifestations de colère des citoyens.
Abder Bettache – Alger (Le Soir) – Jamais les Algériens n’ont vécu une pareille situation, comme ce fut le cas durant ces derniers jours. La hausse des températures a mis à nu la précarité de notre système énergétique et surtout l’absence d’une démarche stratégique globale en vue de sécuriser le pays en matière d’électricité. Ce qui est loin d’étonner les professionnels du secteur qui rappellent, à titre d’exemple, que le Conseil national de l’énergie-instance chargée de dessiner les contours stratégiques de notre politique énergétique — ne s’est pas réuni depuis… 1998 ! Des carences de la part des politiques que les gestionnaires tentent à leur corps défendant de masquer en tentant de fourvoyer l’opinion publique dans des explications techniques, à l’instar de ce que s’échinent à faire les responsables de Sonelgaz. Ainsi, ces derniers amputent cette situation à plusieurs facteurs, dont la pollution, l’humidité et le brouillard. Selon les responsables du GRTE (Gestionnaire du réseau de transport d’électricité), «ce manque de tension partiel a été causé par l’accumulation de pollution naturelle et de pollutions dues à la fumée dégagée par les feux de forêt aggravées par des conditions atmosphériques exceptionnelles (taux d’humidité élevé et un brouillard très dense) observées hier dans les régions traversées par les lignes à très haute tension ». Selon des sources, près de 350 000 foyers (soit la moitié de la consommation de la capitale) ont été privés d’électricité mercredi dernier à 22 h 30, dans la région d’Alger suite au déclenchement successif de plusieurs lignes très haute tension alimentant la capitale. Selon le GRTE, un programme de dépollution sous tension a été mis en œuvre pour éviter les risques de déclenchement dans des conditions atmosphériques similaires à celles observées dans la soirée de mercredi. Toutefois, ses responsables ont déploré l’insuffisance de moyens face à «l’ampleur du phénomène et l’importance des réseaux affectés». Le recours au lavage sous tension par hélicoptère, mis en place par le GRTE, tarde à être opérationnel en raison du retard dans l’acquisition de l’appareil (prévu pour le 18 juillet, il a été réceptionné mardi dernier) et des autorisations nécessaires pour le survol. Or, pour les observateurs, cette situation que vit le groupe Sonelgaz n’est autre que «la conséquence directe de l’absence d’une stratégie à même de permettre à cette entreprise de faire face aux besoins de la population ». Selon Abdelkader Boussourdi, P-dg de la Société de distribution du gaz et d’électricité d’Alger, une filiale de Sonelgaz, «les investissements pour améliorer la production d’électricité sont ralentis par des lourdeurs bureaucratiques au niveau des collectivités locales, notamment la difficulté d’obtention des autorisations pour les travaux dans les sous-sols, ainsi que des assiettes foncières pour la création de nouveaux postes». L’avancement du plan d’investissement pour 2012 n’a atteint que 50% à fin juillet dernier, a-t-il précisé. D’autre part, les phénomènes de fraude, de piratage d’électricité, de vol d’équipements et d’agressions causés par les travaux au niveau du sol ont accentué la vulnérabilité du réseau. «La direction de Sonelgaz de Gué-de-Constantine a enregistré à elle seule, durant le premier semestre 2012, 14 vols d’équipements d’une valeur de 5 millions de dinars qui ont causé 8 heures de coupure pour chacun d’eux. En outre, 60 agressions sur le réseau ont été enregistrées par les entreprises des travaux publics dans la région Sud d’Alger», a-t-il expliqué. Selon lui, ces phénomènes causent plus de 400 coupures de lignes de moyenne tension qui alimentent des milliers de citoyens et sont enregistrées chaque année. «Mais si les réalisations prévues dans le plan d’investissement avaient évolué au bon rythme, ces problèmes aurait eu moins d’impact », a-t-il dit. En somme, cette situation a encore une fois démontré la situation dans laquelle se trouve désormais Sonelgaz. Une situation d’impuissance face à la réalité du terrain.
A. B.
