Coupe du monde : Une affaire de gardiens

Coupe du monde : Une affaire de gardiens

Si ce mondial a été marqué par un grand nombre de match conclus en prolongation, voir au tirs aux buts, ce n’est pas un hasard.Cette coupe du monde a été le rendez-vous des gardiens de but, acteurs de nombreux arrêts, grandioses et surprenants. Gros plan sur neuf gardiens qui auront marqué cette coupe du monde 2014.

La fin d’une génération de goals

Si on s’attendait à de grosses performances de la part de l’Espagne ou de l’Italie, c’est non seulement grâce à leur passé victorieux et la qualité de leur effectif, mais surtout parcequ’elles possèdent les deux meilleurs gardiens de la dernière décennie (classement IFFHS paru en février 2012), Gianluigi Buffon, et Iker Casillas. Pourtant ces deux équipes n’ont pas fait long feu, en quittant la compétition dès la phase de poule. Si le premier n’a encaissé que deux buts sur lesquels il est exempt de toute responsabilité, le second en a encaissé sept en tout, dont cinq dans le seul match contre les Pays-Bas, où il a été fautif en grande partie. L’actuel gardien remplaçant du Real Madrid est tombé de haut, et tout son peuple avec lui. Malgré tout, ces deux hommes sont des joueurs phares pour leur club et pour leur sélection respective, remportant de nombreux titres nationaux, européens, et une coupe du monde chacun. Dommage car, c’est sur une mauvaise note finale, que ces deux monstres sacrés, au palmarès sans fautes pourraient tirer leur révérence en coupe du monde.

Mors tua vita mea

Face au déclin des « dinosaures » cités précédemment, auquel peuvent aussi être ajoutés Petr Cech et Julio César, un petit nombre de gardiens de buts s’est révélé lors de la compétition. Plus tout jeunes pour la plupart ou déjà relativement connus du grand public, ces portiers ont tout de même impressionné par leurs réflexes, claquettes et autres plongeons, mais qui sont-ils ?

Quatre surprenants gardiens Sud-américains :

– Guillermo « Memo » Ochoa (Mexique) : En voilà un qui n’aura pas surpris les amateurs de Ligue 1. L’ex-gardien de l’AC Ajaccio (libre de tout contrat) a été remarquable, n’encaissant que deux buts dans une poule relevée avec le Brésil, la Croatie et le Cameroun. Il a emmené les Mexicains en 8e de finale, où ils auront mené pendant 40 minutes, jusqu’à l’égalisation de Sneijder pour les Hollandais, d’un tir puissant à l’entrée de la surface, des suites d’un corner repoussé par la défense Mexicaine. En plus d’être puissant, le tir est masqué par des joueurs, « Memo » ne peut rien faire pour éviter le but. 94ème minute, Robben s’écroule dans la surface, l’arbitre désigne le point de penalty. Huntelaar se présente face à Ochoa, le gardien est pris à contre-pied sur sa droite, c’est au fond des filets. Ce penalty fortement contesté propulse les Pays-Bas en quart et renvoie le Mexique chez lui. Ochoa, quand à lui, devrait du haut de ses 28 ans, rapidement trouver un nouveau club, car il aurait de nombreux courtisans en Liga et en Ligue 1, qui reste sa priorité.

– Claudio Bravo (Chili) : Lui a déjà trouvé chaussure à son pied. Celui qui gardait la cage de la Real Sociedad avant le début de cette coupe du monde a été enrôlé par le Barça pour 12 millions d’euros, une jolie somme pour un gardien de 31 ans. Il aura fort à faire dans cette équipe catalane, qui refonde un effectif nouveau après tant d’années de suprématie, et qui avec son arrivée et celle du jeune Allemand Ter Stegen à complètement renouvelé son quota de gardiens, libérant Pinto et Valdès. Bravo n’a encaissé que quatre buts durant la compétition, permettant à son équipe d’emmener son équipe aux tirs aux buts face à une équipe Brésilienne peu inspirée. Il n’aura pas l’occasion de qualifier le Chili. Ses prestations pourront être suivies de près lors de la prochaine Liga, ou encore en ligue des champions, il a désormais des responsabilités dignes d’un grand gardien.

– Keylor Navas (Costa Rica) : Il est peut-être la révélation de ce mondial. Keylor Navas à tout simplement été extraordinaire. Si le Costa Rica est parvenu à terminer brillamment en tête du « groupe de la mort » comprenant l’Italie, l’Angleterre et l’Uruguay, il le doit en majeur partie au excellentes prestations de Navas, doté d’impressionnants réflexes, et d’une grande sérénité. En 8e il a rendu malade les Grecs, surtout lors de la déterminante séance de tirs aux buts, un exercice où il excelle. En quart il a tenu 120 minutes face aux assauts répétés des Hollandais, avant de s’incliner lors des tirs aux buts, où il n’a pas été aidé par ses coéquipiers qui ont raté deux tirs. Lui aussi évolue en Liga, à Levante, et lui aussi pourrait très prochainement changer d’air. Il pourrait atterrir en Bundesliga, pour servir de doublette à Manuel Neuer, gardien du Bayern Munich. Un grand club pour lui, mais une place de remplaçant de luxe assurée. Un point négatif qui pourrait le convaincre de signer ailleurs, l’AS Monaco serait également sur les rangs pour s’assurer la venue du portier des Ticos.

– David Ospina (Colombie) : Tout comme Ochoa il est aussi bien connu du public français, puisque le dernier rempart des Cafeteros est également celui de l’OGC Nice depuis 2008. La Colombie a réalisé un très beau parcours au Brésil, en survolant sa poule (3-0 contre la Grèce, 2-1 contre la Côte d’Ivoire, et 4-0 face à la Corée du Sud), avant de dominer l’Uruguay en 8e (2-0). En quart, face au Brésil, les attaquants colombiens sont un peu moins brillants que lors des précédents matchs. C’est également le cas pour la défense, qui laisse un Thiago Silva esseulé pousser le ballon au fond des filets des suites d’un corner. Il réalise ensuite au moins trois parades fondamentales, avant de s’incliner face à David Luiz, auteur d’un splendide coup-franc des 30 mètres qui viens se loger dans la lucarne gauche du but. Ospina s’envole pour tenter la parade, mais ce genre de balle est imprenable pour n’importe quel gardien. C’est ici que se termine le parcours de la Colombie, malgré une équipe prometteuse, qui dans quatre ans pourra toujours compter sur David Ospina qui n’a que 25 ans. Notons également qu’il pourrait suivre l’exemple de ses homologues Sud-américains, et quitter le club Niçois pour rejoindre la cour d’Arsène Wenger à Arsenal, toujours à la recherche d’un gardien digne de ce nom.

Trois gardiens héroïques :

– Raïs M’Bolhi (Algérie) : Qui l’aurait prévu ? L’Algérie a historiquement atteint les 8e d’une phase finale de coupe du monde. Si beaucoup de joueurs ont émergé au grand jour comme l’attaquant du Sporting Lisbone Islam Slimani, et les milieux de Valence et de l’Inter, Sofiane Feghouli et Saphir Taïder, c’est bien le gardien du CSKA Sofia, Raïs M’Bolhi, qui a été le grand artisan du parcours Algérien.

Héroïque à plusieurs reprises face à la Russie, il a permis aux Fennecs d’accéder en 8ede finale, un rêve pour tous les Algériens. Et le rêve aurait pu continuer, puisque face à l’Allemagne, M’Bolhi a sorti le plus gros match de sa carrière, contraignant les désormais finalistes à jouer jusqu’à la 120ème minute. L’écart technico-tactique et la différence de préparation athlétique ont pris le pas sur la volonté et la détermination des Algériens, qui ont cédé à la 98ème minute, puis à la 120ème, avant de réduire le score à 2-1 à la 121ème. S’ils étaient parvenus à égaliser plus tôt, nul doute que M’Bolhi aurait pu tenir tête à l’Allemand Neuer. Raïs pourrait prochainement jouer en Europe et rejoindre son compatriote Nabil Ghilas au FC. Porto. Le club portugais serait également sur les traces d’un autre Algérien, Yacine Brahimi.

– Tim Howard (Etats-Unis) : Un seul match aura suffi au goal de 35 ans, évoluant à Everton, pour être hissé au rang de star aux Etats-Unis. 2 Juillet, Belgique-Usa, Howard réalise neuf parades en 90 minutes. Un chiffre qui a presque doublé 30 minutes plus tard, à la 120è : 15. C’est le nombre d’arrêts effectués par Tim Howard en 8e face aux Belges. Un record historique. Il devrait néanmoins rester dans son club actuel, puisqu’il a prolongé son contrat avec Everton jusqu’en 2018.

– Tim Krul (Pays-Bas) : Il n’a pratiquement pas joué une minute de jeu, et pourtant il a été très décisif. 121ème minute de jeu du quart de finale entre les Pays-Bas et le Costa Rica, le sélectionneur Hollandais Louis Van Gaal décide d’effectuer un coup de poker. Sortie du gardien Jasper Cillessen, entrée du Magpie Tim Krul. Le gardien de Newcastle s’adresse aux tireurs costariciens, prétextant savoir où ceux-ci vont tirer, il joue sur leur moral et leur concentration. Il s’investit à tel point dans sa ruse que l’arbitre est contraint de le reprendre à trois fois, car il est à la limite de l’acceptable. Mais sa technique fonctionne, et Krul parvient à arrêter deux tirs, la Hollande est en demi-finale.

Les deux derniers gardiens sont ceux qui auront été les plus décisifs, puisque ce sont les deux murailles qui seront opposées en Finale, Dimanche 13 Juillet à 21h00 :

– Sergio Romero (Argentine) : Que la saison fut longue pour Romero, à peine trois matchs disputés en Ligue 1 avec l’AS Monaco, pour lui qui était venu pour être le numéro un, rapiddment relégué sur le banc de touche. Romero arrive au mondial avec un temps de jeu quasi-inexistant. Et pourtant il va s’affirmer dans les buts de l’Albicéleste, en encaissant uniquement 3 buts en 7 matchs, avant la finale de dimanche. Même Neuer ne peut pas en dire autant puisqu’il en a encaissé un de plus. Romero brille d’autant plus que ses coéquipiers, Messi compris, ont énormément de mal à proposer du beau jeu.

Ce n’est pas un hasard si l’Argentine a remporté tous ses matchs par un petit but d’écart, malgré des joueurs du calibre de Messi, Aguero, Higuain et Di Maria, mais ce n’est pas un hasard non plus si elle a encaissé si peu de buts. Hier, Mercredi 9 Juillet, durant la demi-finale face aux Pays-Bas, il a posé de nombreux problèmes à Arjen Robben et à ses coéquipiers qui ne sont pas parvenus à trouver la faille pour marquer. Suite à quoi, le match s’est prolongé de 30 minutes, puis en séance de tirs aux buts. Van Gaal n’a pas fait entrer Tim Krul dans les derniers instants, comme en quart face au Costa Rica, puisque les trois changements autorisés avaient déjà été effectués. Pas besoin de faire du Krul pour Romero, qui parvient à arrêter deux tirs, ceux de Vlaar et Sneijder, bien trop lents et doux, mais chapeau tout de même.

– Manuel Neuer (Allemagne) : Ce n’est pas une révélation, mais il a encore prouvé qu’il était devenu, à tous les effets, le meilleur gardien du monde. A 28 ans il vante un palmarès important auquel pourrait s’ajouter la coupe du monde : 2 championnats Allemands, 3 coupes d’Allemagne, 1 Ligue des champions, 2 supercoupes d’Allemagne, 1 supercoupe de l’UEFA et 1 coupe du monde des clubs, ainsi que des titres de meilleur gardien, et sportif Allemand de l’année. Cependant il n’y a pas que le palmarès qui parle pour lui, ses prestations tout au long de l’année avec le Bayern Munich depuis trois ans, et la coupe du monde qu’il est entrain de réaliser sont le symbole d’une certitude, celle d’être le meilleur.

Peu sont les gardiens qui sortent autant de leurs cages pour anticiper un ballon trop long à destination d’un attaquant adverse, mais Manuel sait que s’il ne prend pas le risque de courir 20 mètres, cette passe trop longue peut vite se transformer en occasion de but. Alors il n’hésite pas avant d’aller s’empaler sur l’attaquant adverse afin de dégager le ballon. Mais Neuer c’est aussi un géant d’1m93, qui possède d’énormes reflexes et une telle confiance en lui, comme constaté lors du quart de finale entre la Mannschaft et la France quand il repousse d’une seule main tendue vers le ciel, une puissante frappe de Benzema, dans les dernières secondes de jeu. Vainqueur ou pas dimanche, une chose est sûre, c’est lui le numéro 1 des numéros 1.