Le lieutenant Amadou Konaré lisant le communiqué des putschistes, jeudi à la télévision malienne.
Le putsch au Mali, les velléités autonomistes dans l’est de la Libye, les accrochages récurrents dans le sud de la Tunisie sont autant de sources d’instabilité qui mettent la région du Sahel sur un volcan.
Très difficile et inquiétante est sans doute, l’aggravation de l’instabilité régionale induite par le coup d’Etat militaire perpétré au Mali, jeudi dernier. A cela s’ajoutent l’agitation constatée dans la sud de la Tunisie, l’appel à l’autonomie de l’est de la Libye et l’affaire des otages au Niger. Selon de nombreux observateurs, l’Algérie n’a jamais été confrontée à une telle instabilité à ses frontières Sud et Est. Le problème du contrôle des frontières, constamment soulevé par les autorités des pays du pourtour de la vaste région du Sahel, ne pourra que s’exacerber avec la crise malienne. Celle-ci induit un conflit supplémentaire suite au renversement du président malien avec les répercussions inévitables qu’elle pourrait avoir sur les pays voisins, particulièrement l’Algérie. La région du Sahel, ventre mou de l’Afrique, est transformée depuis des années en bastion et base arrière avérée d’Aqmi mais aussi comme couloir des organisations du crime organisé, trafiquants de tout acabit et contrebandiers. Cette vaste zone grise est en passe de devenir un véritable volcan d’instabilité et d’insécurité. Or, le Mali et l’Algérie ont une longue frontière commune. Dès lors, le coup d’Etat militaire, qui a renversé hier le président Amadou Toumani Touré, aura sans doute des conséquences négatives sur la situation sécuritaire au Sahel et sur les relations bilatérales des pays de ladite région. Etant donné la position géographique stratégique qu’occupe l’Algérie, sa qualité de leader régional ainsi que sa stabilité dans cet océan en ébullition, les spécialistes s’accordent à dire qu’elle devra supporter presque seule la charge de cette instabilité. L’intensification des conflits dans le Sahel, risque de s’inscrire dans la durée car il semblerait que les auteurs du putsch semblent souhaiter mettre un terme à la rébellion au Nord-Mali par la force. Certains analystes soutiennent que ce qui se passe au Mali entre dans le cadre d’un plan concocté par les puissances étrangères. En revanche, d’autres soulignent que l’incapacité du pouvoir central à répondre aux revendications très anciennes exprimées par des groupes sociaux comme les Touareg ainsi que la distribution inéquitable des ressources et l’absence de démocratie, ont favorisé la montée de la violence dans la région. C’est cette fragilité structurelle qui a permis l’exécution de ce genre de plans qui ont toujours existé, indiquent-ils. Par conséquent, on craint la transformation de toute la région sahélienne en «Afghanistan africain». Autre menace qui n’est pas des moindres, est l’éclatement de l’équilibre précaire libyen en un vaste «no man’s land». L’attentat perpétré à Tamanrasset le 3 mars dernier, dénote que l’Algérie demeure une cible privilégiée d’Aqmi. Pour rappel, une nouvelle organisation terroriste se revendiquant d’Al Qaîda a fait également son apparition dans cette région. Ainsi, dans un communiqué rendu public quelques heures après l’attaque criminelle du siège de la Gendarmerie nationale à Tamanrasset, le Mouvement unicité et jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) a revendiqué l’attentat-suicide commis dans la capitale de l’Ahaggar. Des accrochages violents sont signalés aux frontière entre la Libye et la Tunisie depuis la fin de l’année écoulée. Des affrontements ont ainsi opposé en août et septembre de l’an dernier, l’armée tunisienne et un groupe armé venant de la Libye voisine. Malgré la surveillance accrue des frontières où les autorités algériennes et tunisiennes coopèrent habituellement, en organisant des patrouilles, le groupe des assaillants a pu s’infiltrer à travers les mailles. Cela démontre la problématique relative à la perméabilité ou la porosité des frontières. Par ailleurs, la fracture due à la demande d’indépendance des rebelles touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (Mnla) depuis janvier dernier, risque de se transformer en conflit armé entre les rebelles touareg et les militaires au nord du Mali. Une autre guerre entre les militaires loyalistes et putschistes, est un autre scénario plausible. Enfin, l’Algérie, incontournable dans la lutte antiterroriste au Sahel a eu à plusieurs reprises à apaiser les tensions entre Bamako et les différents groupes organisés qui ont déstabilisé le nord du Mali, rappelle-t-on.