Coup de cœur-«Mouloud Feraoun – Maurice Monnoyer, Histoire d’une amitié» de Mehenni Akbal : «Feraoun, mon ami»

Coup de cœur-«Mouloud Feraoun – Maurice Monnoyer, Histoire d’une amitié» de Mehenni Akbal : «Feraoun, mon ami»

Raconter les liens d’amitié qui liaient Feraoun à Maurice Monnoyer c’est nous compléter ce que le lecteur sait de l’intimité de l’enfant de Tizi Hibel , déjà acquise à travers ses romans, « Le fils du Pauvre » en particulier.

L’auteur Mehenni Akbal, maître de conférence à l’université d’Alger, s’est rapproché de l’ancien journaliste, alors à «L’Effort algérien », à savoir M Monnoyer, lequel avait tissé des liens de forte sympathie dont il dit : «Mouloud était pour moi plus qu’un ami, un frère».



Les mots sont simples mais porteurs d’une intense émotion de la part de Maurice Monnoyer.

Il apparaît dans ce livre témoignage sur l’un des grands écrivains algériens de stature universelle, une certaine franchise naïve dans les questions posées par l’auteur. Faisant apparaître dans le texte une grande chaleur et une sensibilité qui sont le label «feraounien» et qui ne laisse pas indifférent le lecteur.

Cinquante ans après la mort de Feraoun le pur, il règne à travers cette nouvelle marque de reconnaissance littéraire, la transparence des mots et l’illumination intérieure qui irradie par delà le personnage que fut celui qu’on appelle «le fondateur de la littérature algérienne» et «l’écrivain probe».

Dans l’entretien accordé à «L’effort algérien» en 1951 et inséré dans le livre témoignage, nous pouvons savoir que s’agissant de la première partie de l’ouvrage, Mouloud Feraoun s’est mis à écrire poussé par une force invisible afin de «traduire l’âme paysanne et montagnarde».

On saura que Emmanuel Roblès, l’ami de toujours, le tarabustera pour l’encourager à produire en littérature que «l’écriture se faisait la nuit et les jours decongé» et que mû par cette force imperceptible il «sollicitait ses personnages»

Dans la deuxième partie, on retrouve la correspondance de Feraoun à Monnoyer. Des lettres inédites et à travers lesquelles, celui qui sera abattu en même temps que cinq de ses collègues le 15 mars 1962, on peut imaginer l’instituteur rigoureux et respectueux.

Et l’écrivain visité par la poésie des choses si malheureuses soient-elles qui écrit dans une de ses missives du 14 juillet 1953 : «J’ai passé ma soirée à écouter votre roman». Nous comprenons que Feraoun ne lit pas les romans, il tend l’oreille aux murmures et à la musique émanant des personnages.

L’amitié entre les deux hommes comme on peut le constater, s’intensifiera au fur et à mesure que les liens se tissent. Feraoun le discret, l’humble dans sa grandeur d’homme de lettres, et deux ans et demi après leur première rencontre, pourra écrire en juillet 1953 à Maurice Monnoyer et l’appeler «Cher ami», en remplacement du protocolaire, «Cher monsieur» qu’il avait l’habitude d’employer.

Au mois d’avril 2003, lors du colloque sur Feraoun, Maurice Monnoyer interviendra dans une conférence qu’il conclura en ces termes, reprenant la dernière phrase du «Fils du pauvre» : «Ainsi, tu ne vivras pas sans souci, mais tu mourras sans remords et tu seras bien reçu dans l’Au-delà».