Corruption : faut-il interdire le gré à gré ?

Corruption : faut-il interdire le gré à gré ?
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La propagation des affaires de corruption en Algérie pousse à s’interroger sur les causes essentielles de ce phénomène qui ne cesse d’entacher la réputation des grandes entreprises nationales. La majorité des spécialistes pointe du doigt les failles contenues dans le dispositif du Code des marchés, y compris le procédé du gré à gré. Les débats se multiplient où la formule du gré à gré revient tel un leitmotiv comme le procédé par lequel le scandale arrive.

L’abus toléré ! Il n’y a pas mieux comme définition pour résumer le recours exagéré à cette formule au sujet de laquelle on ne dira jamais assez qu’elle permet à des responsables indélicats de se tailler la part du lion à l’occasion de passations de marchés publics. Cette réalité est en effet connue de tous, et nul parmi les acteurs de la sphère économique, de la finance et même des hautes autorités de l’État n’est censé ignorer que la formule du gré à gré, érigée en pratique courante alors qu’elle n’est autorisée que dans des situations d’exception, ouvre la voie à bien des dépassements, provoquant des scandales répétés de corruption se traduisant par la dilapidation des deniers publics.

Bien qu’il existe plusieurs «astuces» pour le détournement des deniers publics à travers la technique du gonflement des factures, les révisions des marchés, la signature des avenants, les plus dangereuses restent «les pratiques qui s’en suivent, les passe-droits, le favoritisme». Les passations de marchés contraires à la réglementation sont souvent dénoncées. Pourtant, pour garantir une certaine transparence dans l’attribution des contrats, la loi a limité le recours, à titre exceptionnel, au gré à gré. Cette forme n’est valable que «lorsqu’il y a un partenaire unique, seul détenteur d’une technologie, urgence dans la réalisation. De plus, le marché de gré à gré est plafonné.

Dans la pratique, on déclare l’appel d’offres infructueux et on passe à la consultation restreinte. Pourtant le marché de gré à gré a été critiqué par divers experts et opérateurs économiques alors que le dernier code des marchés publics a maintenu la formule. Bien qu’il ait été établi que ce mode de passation de marchés entraîne des conséquences néfastes et se décrit, de l’avis des experts, comme une formule qui ouvre la porte à tous les abus, le gré à gré semble avoir de beaux jours devant lui. Preuve en est, tous les codes des marchés publics, qui ont été élaborés jusqu’ici, connaissant trois révisions, n’interdisent toujours pas le recours au gré à gré.

Depuis 2003, le Conseil des ministres a autorisé à maintes reprises l’utilisation du gré à gré pour des marchés plus ou moins importants. Il faut rappeler que dans la réglementation sur les marchés publics (contenant de nombreuses insuffisances), le gré à gré doit être l’exception, et encore en le balisant par des garde-fous. Or, à ce rythme, il est devenu la règle, ouvrant ainsi la voie à toutes les corruptions possibles. La corruption dans les marchés publics est un phénomène universel qui est répandu partout dans le monde. Les spécialistes proposent, dans le cas du maintien de ce procédé, de mettre en place des «outils de contrôle» d’application du code des marchés au plan national mais aussi local. Autre structure digne d’intérêt, la mise en place de la Caisse nationale de l’équipement et développement (CNED) qui devra lutter contre ce qu’on a appelé « les dérives» dans la gestion des gros marchés.

Ines B.