Le chiffre est pour le moins effarant ! Près de 948 affaires liées à la corruption ont été tranchées par les tribunaux en 2010
C’est ce qu’a indiqué, jeudi dernier à Alger, le directeur des Affaires pénales et des grâces au ministère de la Justice, M. Mokhtar Lakhdari. Intervenant lors d’une journée d’information sur le rôle de la société civile dans la lutte contre la corruption, M. Lakhdari a laissé entendre que les tribunaux avaient prononcé des peines contre 1 352 accusés dans 948 affaires liées à la corruption.
Dans le détail, viennent en premier lieu les détournements de deniers publics qui constituent les crimes de corruption les plus répandus avec 475 affaires pour la même année, suivis de l’abus de fonction avec 107 affaires, la corruption de fonctionnaires avec quelque 95 affaires et enfin l’octroi de privilèges injustifiés dans les marchés publics où 79 affaires ont été jugées. Selon les statistiques pénales, les collectivités locales viennent en tête des secteurs touchés par les affaires liées à la corruption avec 146 affaires, suivies par les secteurs de la poste avec 133 affaires, et des banques avec 78 affaires.
M. Lakhdari a indiqué, dans ce contexte, que les statistiques pénales font apparaître une propagation du phénomène de corruption en Algérie et aident à en définir les causes. Il soulignera, toutefois, que les statistiques ne reflètent pas la véritable ampleur du phénomène de corruption.
M. Lakhdari précisera, par ailleurs, que le taux de corruption dans la plupart des pays ne dépasse pas 10% de l’ensemble des crimes, ajoutant que beaucoup d’affaires ne sont pas dévoilées ou dénoncées. Par ailleurs, M. Lakhdari a évoqué les aspects cachés de la corruption qui se traduisent généralement par une richesse excessive, la dilapidation de deniers publics, la mauvaise réalisation des projets publics, le clientélisme et l’opacité en matière de prestations administratives.
Pour la circonstance, M. Lakhdari rappellera que le rapport de l’ONG Transparency International sur les indicateurs de la corruption a placé l’Algérie à la 92e place en 2008, la 111e place en 2009 et la 105e en 2010 sur une liste comprenant 178 pays.
M. Lakhdari a critiqué les rapports de l’ONG qui focalisent sur le critère de corruption passive ainsi que certains aspects liés à l’évasion fiscale et au mouvement illégal de capitaux. Selon des experts, le critère de cette ONG n’est pas exhaustif et trace les contours d’une carte géopolitique de la corruption, laquelle place les pays africains à la tête des pays corrompus ignorant leurs spécificités en tant que pays en voie de développement, estime-t-il encore.
Pour M. Lakhdari, la législation algérienne lutte contre la corruption, le clientélisme et les abus de fonction et les grandes mutations politiques qu’a connues l’Algérie ont toujours été accompagnées de mesures juridiques et judiciaires de lutte contre la corruption.
« L’ouverture économique et l’absence de mécanismes de contrôle ont favorisé l’émergence de nouvelles formes de corruption », a-t-il souligné, avant d’évoquer les spéculations sur les marchandises importées, les affaires liées au commerce extérieur et aux banques, à l’utilisation de faux registres de commerce et de transfert illégal de devises et de blanchiment d’argent.
Il a également mis en avant les réformes législatives initiées par l’Algérie en matière de lutte contre la corruption, notamment le jumelage des législations pénale et économique et la promulgation de textes de lois pour la lutte contre le trafic de drogue, le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et la corruption. Soulignons enfin que l’Algérie a créé durant la dernière décennie une cellule de traitement des renseignements financiers et procédé à l’adoption de la convention des Nations unies sur la lutte contre la corruption.
Lazhar.D