Le recentrage opéré par le ministère du Commerce extérieur sur les opérations d’importation en Algérie continue de susciter un vif débat. Portées par le ministre Kamel Rezig, les nouvelles mesures visent à mieux encadrer les flux entrants de marchandises et de services, dans un contexte de préservation des réserves de change et de soutien à la production nationale.
Si le gouvernement affirme qu’il s’agit d’une régulation nécessaire face à des abus persistants, certains élus, à l’instar du député Abdelwahab Yaâkoubi, appellent à une application plus progressive et mieux coordonnée pour éviter des perturbations économiques.
Des abus dans les importations : ce que dénonce le ministère Rezig
Dans une réponse adressée à une question parlementaire, Kamel Rezig a affirmé que les nouvelles mesures ne visent ni à interdire ni à restreindre les importations, mais plutôt à assurer un suivi rigoureux des opérations effectuées par les entreprises dans le cadre de leur fonctionnement ou de leur équipement.
Selon lui, le manque de contrôle effectif au cours des dernières années a permis à de nombreuses sociétés d’importer des biens destinés à la revente sous le prétexte d’activités industrielles ou de services. Ces pratiques ont, d’après Rezig, nuit gravement à la production nationale et ont contribué à l’érosion des réserves de change du pays.
Il pointe du doigt des cas d’importations opérées par des entités sans aucune infrastructure de production, parfois même enregistrées sous des noms d’agriculteurs ou d’artisans, illustrant ainsi ce qu’il qualifie de « fraude économique systématisée ».
Face à cette situation, le ministère affirme avoir mobilisé des moyens humains et techniques pour simplifier le dépôt et la validation des Programmes prévisionnels d’importation (PPI), exigés désormais pour toute opération de domiciliation bancaire. Un nouveau mécanisme plus souple et plus rapide est en cours d’élaboration, selon Rezig.
Yaâkoubi plaide pour une régulation plus souple et mieux coordonnée
De son côté, le député Abdelwahab Yaâkoubi a réagi aux explications du ministre en soulignant que si le principe de régulation des importations n’est pas contesté, c’est plutôt la méthode d’application qui soulève des préoccupations sur le terrain.
Il a notamment attiré l’attention sur les difficultés rencontrées par certains opérateurs depuis l’entrée en vigueur, début juillet 2025, de l’obligation de présenter un Programme prévisionnel d’importation (PPI) pour toute opération d’importation.
L’application rétroactive de cette mesure a, selon lui, entraîné des perturbations dans la chaîne logistique : blocage de cargaisons, retards de paiements, et annulation de commandes dans certains cas.
Le député a plaidé pour une meilleure coordination entre l’administration et les acteurs économiques, regrettant le manque de consultation préalable et de préavis suffisant pour permettre aux entreprises de s’adapter sereinement aux nouvelles exigences.
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Il a également souligné l’importance de rendre les procédures plus fluides et transparentes, afin d’éviter que les entreprises respectueuses des règles ne soient indirectement pénalisées.
Concernant les cas d’utilisation abusive de statuts agricoles ou artisanaux pour contourner les règles, Yaâkoubi a estimé que ces dérives doivent être corrigées par des mécanismes de contrôle ciblés, sans compromettre l’ensemble de l’activité économique.
Un contexte économique sous pression
Les mesures mises en place par le ministère du Commerce s’inscrivent dans une stratégie plus large de réduction de la facture des importations, qui a oscillé entre 50 et 60 milliards de dollars ces dix dernières années. Cette politique vise à préserver les réserves de change, tout en encourageant la production locale.
Depuis le mois de juillet 2025, de nouvelles règles ont été introduites, notamment l’obligation d’obtenir une autorisation préalable pour l’importation de services (comme la maintenance, la formation ou les logiciels), ainsi que la soumission obligatoire d’un Programme prévisionnel d’importation (PPI) comme condition pour la domiciliation bancaire.
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Si ces mesures ont été justifiées par la volonté de renforcer la transparence et de mieux orienter les importations vers les besoins réels de l’économie, leur mise en œuvre rapide a suscité des inquiétudes.