Contribution, Où va le parti du FLN ?

Contribution, Où va le parti du FLN ?

Dans cette contribution, Salah Goudjil, vieille figure du FLN, pleinement engagé dans le combat pour la destitution de Belkhadem, pose un diagnostic de la situation du FLN, sorte de bateau ivre, ballotté par les courants d’intérêt, et propose une direction collégiale le temps de sortir de la zone de tempête.

En janvier 2011, des cadres du parti du FLN, regroupés dans le Mouvement du redressement et de l’authenticité du FLN, ont publié une déclaration en relation avec la crise profonde que traversait depuis des mois le parti. Diagnostiquée sans complaisance, cette crise avait plusieurs dimensions identifiées comme suit :



1. crise identitaire par le fait que l’identité du parti, sciemment dénaturée, a brouillé les repères et les référents qui unissent ses militants ;

2. crise de confiance engendrée par les contradictions flagrantes entre les discours et les actes et par le non-respect des prérogatives des instances ;

3. crise d’organisation illustrée notamment par le non-achèvement de la mise en place des instances locales du parti, et ce, après de longues années, instances remplacées par des structures fictives basées sur des procès-verbaux généralement falsifiés ;

4. crise de fonctionnement par des pratiques de gaspillage, de fraude, de négligence et de laisser-aller et le bannissement de toute transparence dans la gestion administrative et financière ;

5. crise de représentation populaire en ignorant l’implantation humaine et les catégories sociales les plus influentes au sein de la société à l’image des milieux éducatifs et universitaires, de l’élite intellectuelle et scientifique, des couches moyennes et des grands centres de production économique ;

6. crise de représentation sociale par la difficulté d’identifier clairement la base sociale du parti, parallèlement à la perte graduelle de bases sociales qui lui sont traditionnellement acquises.

Les pratiques qui ont vu le jour après le 8e congrès, caractérisées par l’égoïsme, le clientélisme et l’allégeance aux personnes au détriment des idées, par l’arbitraire et la complaisance dans la désignation aux postes de responsabilité et par le bannissement du débat contradictoire tout en recourant systématiquement au chantage, au marchandage et à l’exclusion des cadres responsables reconnus pour leur militantisme, leur compétence et surtout leur intégrité, pour les remplacer par des intrus et opportunistes parmi les affairistes de tous bords, ont été exaspérées et généralisées au lendemain du 9e congrès (mars 2010).

Devant cette situation, la base militante n’a eu de cesse d’exprimer, à sa façon et souvent de manière brutale, son refus de voir les valeurs et principes du FLN devenir l’objet de manipulations, de compromissions et de déviations en réclamant l’assainissement du parti pour le ramener sur le droit chemin afin qu’il soit au service de la nation et concourir à la concrétisation des espoirs et aspirations des masses populaires.

Faisant écho et en réponse aux appels des militants, des tentatives de redresser le parti ont été initiées par des cadres animés par la même volonté, initiatives qui ont abouti à la destitution du secrétaire général. Et alors que tout le monde s’attendait à voir les vœux des militants enfin se réaliser, le parti se retrouve dans une situation plus grave, par la faute d’interférences extra-partisanes ayant imposé une direction illégitime qui, fuyant les problèmes purement internes au parti, recourt à des prises de position très graves touchant directement la stabilité des institutions nationales du pays, stabilité qu’en réalité le parti doit défendre et préserver à tout prix et dans toutes les circonstances.

Pour s’en sortir et éviter le pire, une solution existe et peut encore sauver le bateau FLN pour peu que l’on pense à l’intérêt général : il faut revenir très rapidement à un principe cardinal ordinairement appliqué par le parti et bafoué ces dernières années, à savoir le retour à la direction collégiale. Dans cette phase transitoire, cette direction aura une mission et des attributions bien précises. Composée d’anciens militants choisis parmi les sages ayant déjà occupé des responsabilités nationales au sein du parti et n’aspirant à aucune ambition politique, elle aura à diriger provisoirement le parti et doit s’atteler à rendre à ses instances nationales leur légitimité en s’appuyant sur les principes démocratiques universels. Une de ses premières tâches consistera à consolider les structures de base (kassamate et mouhafadhate) sous la supervision des membres du comité central.

Elle doit établir une feuille de route aux échéances bien précises avec l’objectif de rassembler sans aucune forme d’exclusion tout en encourageant les jeunes à investir ces structures de base. Le renouvellement des bureaux de kasma et de mouhafadha doit s’effectuer exclusivement sur la base d’élections libres dans le cadre des assemblées générales.

À l’issue de ces opérations, une conférence nationale des cadres du parti sera organisée.

Elle aura pour tâche essentielle de préparer le congrès d’où sortira une direction politique élue démocratiquement avec un programme qui permettra aux militants et aux militantes de se préparer à affronter sereinement les futures défis et enjeux, rassurés sur l’unité de leurs rangs, la crédibilité des positions de leur parti, convaincus que les idées et les actes des adhérents du parti du FLN seront en conformité avec ses véritables principes, à savoir les principes de Novembre 54 qui restent à jamais d’actualité.

Pour conclure, je m’adresse aux membres du comité central, à tous les cadres, à tous les militants et sympathisants du FLN pour leur demander de se ressaisir en faisant appel à la raison et d’œuvrer tous ensemble pour faire barrage à tout ce qui peut toucher à la stabilité de nos institutions, d’autant que nous sommes à la veille d’échéances électorales déterminantes pour l’avenir de notre pays.

S. G.

* Membre du comité central