Contribution: Le général Gaid salah et son “bourourou” de vide constitutionnel

Contribution: Le général Gaid salah et son “bourourou” de vide constitutionnel

Décidément plus on espère que le pouvoir simplifie la situation en donnant la primauté à la volonté populaire, plus il la complique par toutes sortes de détours, de non dits et de contre arguments qui n’ont de vrai résultat, que le ralentissement du processus de changement de régime revendiqué par des millions d’Algériens qui occupent la rue depuis 3 mois.

A force de ses allers-retours dans le statu quo, pratiquement à contre courant de la principale revendication populaire a savoir le départ de la issaba comme préalable à la transition, le général Gaid salah est en train de dilapider le capital confiance que le peuple lui avait accordé au lendemain de son annonce d’appliquer les articles 7 et 8 de la constitution. Une annonce faite à la fin du mois de mars et visiblement remise au placard depuis, puisque le général n’en fait plus mention dans ses discours successifs, alimentant ainsi un climat de méfiance nuisible à la mobilisation et la cohésion nationale.

De toute évidence, le pouvoir représenté par Gaid Salah n’est pas disposé à se départir de Bédoui et Bensalah malgré les demandes à répétition du Hirak pour le départ de ces 2 symboles du régime. D’ailleurs, le peuple n’est pas seul à ne pas être écouté par le pouvoir. C’est le cas des nombreuses personnalités qui s’expriment et proposent des initiatives de sortie de crise avec des feuilles de routes plus ou moins consensuelles. Aucune de ces propositions n’a les faveurs du pouvoir puisque Gaid Salah, non seulement il les ignore et n’en fait pas écho, mais dans son discours, il parle même d’un «désert» en la matière en déclarant en ces termes : «l’absence flagrante des personnalités nationales, des élites et des compétences nationales face aux évènements et évolutions accélérés que connait notre pays et qui requièrent des propositions constructives à même de rapprocher les points de vue divergents».

Cette déclaration est vite mise à mal par de nombreux observateurs et personnalités, notamment le Dr Ahmed Taleb Ibrahimi qui en plus d’exposer sa vision pour une sortie de crise rappelle au général Gaid Salah les « dizaines d’initiatives proposées par des partis, des syndicats et des personnalités.» Il souligne son étonnement « que toutes ces initiatives n’aient pas été visibles par les décideurs. » Une façon de dire que le pouvoir (représenté par Gaid Salah) ne semble pas intéressé à aller dans le sens des revendications du peuple, portées justement par les différentes initiatives. Toutes ces contradictions accentuent le malaise général, d’autant que des gestes répressifs apparaissent ça et là contre le mouvement de contestation, comme nous l’avons vu lors des marches des étudiants et d’autres rassemblements.

Demain ce sera le 14ème Vendredi et le bras de fer entre le pouvoir et le peuple va s’accentuer du fait de l’absence d’ouverture de canaux sérieux de dialogue de la part du pouvoir réel, sans Bédoui et Bensalah. Rappelons à Gaid Salah que de nombreux pays dans le monde ont vécu la même expérience que l’Algérie, notamment en Amérique du Sud, au Portugal, etc. quand il a fallu passer des régimes autoritaires à la démocratie. Ces pays ne se sont pas effondrés pour autant. La conjugaison des efforts de leurs élites, du peuple et de leurs armées ont permis des changements plus ou moins harmonieux et sécuritaires vers la démocratie. L’Algérie est tout à fait capable de la même performance pour peu que la volonté politique existe réellement dans l’enceinte du pouvoir comme elle le fut dans les pays en question.

Le fait que la crise se prolonge est dû essentiellement au flou qui entoure cette volonté politique. Car c’est elle la véritable source du blocage actuel et non l’absence de personnalités ou d’initiatives. Et encore moins le bourourou du vide constitutionnel que brandit le général Gaid Salah, sachant que les articles 7 et 8 ouvrent la voie à la satisfaction des revendications du peuple sans jamais mettre le pays en péril. L’esprit de novembre transcende les divergences et unit tous les Algériens de ce vaste Hirak au destin de leur pays. C’est pourquoi, la marche de ce 14eme Vendredi doit impérativement se solder par une action concrète d’un début de sortie de crise pour ne pas rompre cet élan historique et pacifique du peuple algérien pour la dignité et l’État de droit.

Zehira Houfani, écrivaine

Montréal

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