L’application de cette décision peut bien faire des mécontents.
Le compte à rebours pour la fin du délai concernant la régularisation des constructions inachevées dans le milieu urbain a commencé. Il ne reste en effet pour les citoyens concernés qu’un délai de 30 jours – le 3 août prochain- pour régulariser leurs constructions ou subir les sanctions prévues par la loi 08-15 du 20 juillet 2008. La première sanction, pour rappel, est la démolition pure et simple de la bâtisse.
Le payement d’amende et l’emprisonnement, selon le contenu de ladite loi, sont des sanctions allégées et qui ne seront prononcées qu’ au cas par cas. La possibilité de prorogation du délai est exclue, a affirmé à maintes reprises Abdelmadjid Tebboune, ministre de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Ville. «C’est la loi dans toute sa rigueur qui sera appliquée au-delà de ce délai», avait-il menacé.
Les citoyens ont eu le temps suffisant (8 ans) pour se conformer à la loi. «Ce délai a fait déjà l’objet de prorogation en 2012», a-t-il dit soulignant que normalement les propriétaires concernés n’ont après les facilités dont ils ont bénéficié dans le cadre des conventions signées avec le département des finances et celui de l’intérieur, aucune excuse pour justifier leur retard. Ces conventions ont porté, rappelons-le, avec le ministère de l’Intérieur sur la délivrance sans tracasseries administratives et bureaucratiques des permis de construire et des certificats de conformité aux citoyens concernés et avec le ministère des Finances sur la réduction du temps de l’étude des dossiers des citoyens sollicitant des crédits auprès des banques pour l’achèvement des travaux restants de leurs bâtisses. Ces deux obstacles constituent les deux principales raisons de non-régularisation des citoyens pour leurs bâtisses.
Néanmoins, pour bénéficier de ces avantages accordés, les propriétaires rencontrent deux entraves. La première entrave, apprend-on, est celle liée à la non-disposition des citoyens concernés par des actes de propriété des terrains sur lesquels ils ont construit. Ce document est indispensable pour demander un permis de construire ou un certificat de conformité auprès des services de l’habitat de l’APC. La deuxième entrave, est l’impossibilité de bénéficier d’un crédit bancaire sans la justification du motif du crédit. Dans le cas échéant le banquier s’inquiète de l’existence du permis de construire. Ce dilemme a poussé beaucoup de personnes concernées par le contenu de la loi 08-15 à ne pas se précipiter et attendre éventuellement une amnistie générale de la part des pouvoirs publics. Leur attente cette-fois-ci risque de ne pas être satisfaite. Car à voir le nombre de mises en demeures envoyées par les APC ces derniers mois et le nombre de fermeture de locaux de commerce situés en bas de ces constructions effectués par les services de l’ordre, il y a de quoi jurer que l’Etat ne reviendra pas sur sa décision.
Par ailleurs, pour les architectes et les urbanistes, la décision des pouvoirs publics aussi sage soit-elle, ne peut pas être applicable pour la simple raison que plus de deux tiers des villes d’Algérie sont construites d’une façon anarchique et sans aucun document justificatif de propriété ou de permis de construire pour leurs propriétaires. Décider de les démolir, s’accordent-ils à dire, c’est mettre à genoux toutes les villes du pays. La solution selon eux, c’est de procéder à la démolition des bâtisses vraiment contraignantes et de penser à l’avenir un autre modèle urbanistique pour les villes algériennes. «Il n’est dit nulle part que les villes algériennes doivent ressembler impérativement à celles de la France ou des Etats-Unis», dira Yacine Mezhoud architecte contacté par nos soins. Il est à rappeler enfin que le but de cette loi, tel qu’elle a été rédigée dans le Journal officiel, est de mettre un terme à l’état de non-achèvement des constructions, de promouvoir un cadre bâti esthétique et harmonieusement aménagé, instituer des mesures coercitives en matière de non-respect des délais de construction et des normes de construction.