En officialisant la date de la tenue du dixième congrès du FLN, ainsi que celle de la session extraordinaire de son comité central, le secrétaire général Amar Saâdani vient de prouver indirectement que le projet de révision de la Constitution sera, une énième fois, reporté.
Lui qui avait associé la tenue des travaux de son congrès à l’issue de la révision de la Loi fondamentale. Depuis des mois, Saâdani criait sur tous les toits que le congrès du FLN aurait lieu après la fin des débats et la promulgation de la nouvelle Constitution par les deux chambres parlementaires.
D’ailleurs, certains observateurs avaient expliqué l’échec de l’initiative du FFS sur la conférence du consensus, en raison du refus des partis de « l’allégeance », par la volonté du chef de l’Etat de lancer, avant la fin du premier semestre 2015, son projet de révision de la Constitution.
Certains chefs de parti politique réputés proches du clan présidentiel, comme Abdelkader Bensalah, lançaient dans leurs sorties médiatiques que cette révision est « imminente » et qu’elle sera « pour bientôt ».
D’autres personnalités, patrons d’institutions nationales, déclaraient publiquement qu’elles ont reçu des copies du texte en question et que le débat sur la révision ou « l’enrichissement », pour reprendre leurs propres termes, sera lancé d’ici peu.
Même des leaders de l’opposition avaient réglé leurs montres et leurs stratégies sur l’éventualité des plus probables d’une révision avant le mois de ramadhan, dont le début aura lieu, selon les indications du calendrier lunaire, les 17 ou 18 juin prochain.
Alors que tout le monde s’attendait à une déclaration officielle de Bouteflika annonçant un avant-projet de cette révision, voilà que celle-ci devient, en fin de compte, un sujet récurrent, un simple prétexte ou une ruse politique, pour ne pas dire une manœuvre tactique pour contourner l’impasse politique et la radicalisation systémique que l’opposition brandit inlassablement.
Il est d’ailleurs curieux de constater que les derniers messages de Bouteflika, lus dans des circonstances ou des cérémonies officielles, comme la commémoration du cessez-le-feu du 19 mars 1962 ou la nationalisation des hydrocarbures le 24 février 1971, ainsi que l’occasion de l’anniversaire de Youm el Ilm et l’ouverture à Constantine des festivités de l’année de la culture arabe, ne contiennent aucune indication sur un possible réaménagement de la Constitution.
Aucune ligne, aucune phrase ne sont venues trahir la pensée ou les intentions réelles de Bouteflika. Cela avait étonné certains analystes, qui expliquaient que tous les messages ou communiqués précédents, depuis son investiture à la mi-avril 2014, contiennent sa volonté de réviser tout ou en partie ce texte fondamental.
Plus qu’une promesse, qui date de son discours d’avril 2011 au début des révoltes arabes, plus qu’une réforme politique majeure qui tranche avec celle d’octobre 2008, la révision de la Constitution chez Bouteflika semble être une longue histoire sombre, secrète, passionnelle.
Quel est ce grain de sel qui fait capoter la machine de la révision ? Pourquoi ce chantier d’envergure bute-t-il depuis des années sur des « énigmes ? » Comment expliquer que quatre rapports et synthèses ont été finalisés sur une mouture, mais jamais divulgués ou adoptés ?
En effet, il y a eu la commission Abdelkader Bensalah, suivie des consultations officieuses du Premier ministre Sellal, puis de la commission « technique » dite de Kerdoun, un éminent constitutionnaliste, et enfin les tractations du chef de cabinet à la Présidence, Ahmed Ouyahia.
Jamais une révision de la Constitution n’a connu un pareil enrichissement, des débats aussi intenses et des propositions de toute la classe politique, de toutes les mouvances idéologiques et de toutes les sensibilités.
Alors, pourquoi tant de retards et d’ajournements ?
Nombre d’observateurs estiment que si la révision n’a pas lieu avant la prochaine rentrée sociale, elle pourrait bien être décalée vers le début de l’année 2016, si encore elle demeure une nécessité politique. Car, d’ici là beaucoup de choses risquent de survenir. Bien que tout le monde sait que le problème de cette obsédante révision de la Constitution n’est nullement une question de calendrier ou d’agenda.