La présence de la police sur les lieux n’a jamais empêché les cambistes de s’adonner à leur activité.
A l’instar de toutes les villes d’Algérie, Constantine ne peut pas échapper au marché parallèle de la devise. Un phénomène national qui semble pour l’heure irréductible. L’annonce de l’ouverture de bureaux de change n’a rien changé pour une clientèle insatisfaite de la somme acquittée par les banques: 120 euros, contre 15.000 DA. Faute de choix et par besoin, les voyageurs sont contraints d’aller vers la place en face de la Grande-Poste pour s’alimenter en devise, en dollars ou en euros.
Malgré le fait que le marché parallèle a connu une décadence, passant de 18.000 à 15.800 contre 100 euros, cela reste, pour le moins que l’on puisse dire excessivement cher, notamment pour ceux qui partent pour des soins médicaux, ou encore pour une visite familiale. Que dire des commerçants qui manipulent des sommes faramineuses au sein de ce marché! C’est l’économie de l’Etat qui est victime de cette pratique. Les spéculateurs, ne sont jamais gênés dans leur exercice frauduleux. La présence de la police sur les lieux, ne les a jamais empêchés de s’adonner à leur activité. Ce sont eux-mêmes qui vont chercher des clients en les abordant dans la rue sous les yeux des policiers.
L’Etat avait prévu d’augmenter le taux d’échange à 500 euros, mais rien n’a été appliqué. La chute du dinar a quant à elle donné plus d’avantages à ce métier illicite, favorisant ainsi une procédure qui nuit sans aucun doute au développement économique. Il faut reconnaître que cette pratique freine l’émergence du bon marché pour donner de l’essor au marché noir. Le cas en Algérie demeure singulier dans le marché de change pensent des spécialistes. Ces derniers estiment, qu’ «il y a comme un silence de l’Etat et ces tenants d’une Bourse au noir, même s’il n’est pas complice, ça reste un dérapage». Sur le site Réflexion, le Dr Abderrahmane Mebtoul revient sur le sujet pour souligner que «l’écart s’explique par la faiblesse de la production et la productivité, l’injection de monnaie sans contreparties productives engendrant le niveau de l’inflation. Selon un rapport de l’Ocde, la productivité du travail de l’Algérie est une des plus faibles au niveau du Bassin méditerranéen.

Le tissu industriel que certains voudraient redynamiser, sans vision stratégique, sans tenir compte des nouvelles mutations technologiques et managériales mondiales est une erreur stratégique que l’Algérie risque de payer très cher à moyen terme. L’industrie représentant moins de 5% du PIB et sur ces 5%, 95% sont des PMI/PME non concurrentielles, des surcoûts dévalorisant indirectement la valeur du dinar». Pour ce spécialiste, il revient de l’écart aussi «la diminution de l’offre du fait que la crise mondiale, combinée avec le décès de nombreux retraités algériens, a largement épongé l’épargne de l’émigration. Cette baisse de l’offre de devises a été contrebalancée par les fortunes acquises régulièrement ou irrégulièrement par la communauté algérienne localement et à l’étranger qui font transiter irrégulièrement ou régulièrement des devises en Algérie, montrant clairement que le marché parallèle de devises est bien plus important que l’épargne de l’émigration. Ces montants fonctionnant comme des vases communicants entre l’étranger et l’Algérie, renforcent l’offre.
Il existe donc un lien dialectique entre ces sorties de devises dues à des surfacturations et l’offre, sinon cette dernière serait fortement réduite et le cours sur le marché parallèle de devises serait plus élevé, jouant donc, comme amortisseur à la chute du dinar sur le marché parallèle».
Mais aussi «la demande provient de simples citoyens qui voyagent: (les touristes, ceux qui se soignent à l’étranger et les hadjis) du fait de la faiblesse de l’allocation devises (dérisoire). Mais ce sont les agences de voyages qui à défaut de bénéficier du droit au change recourent elles aussi aux devises du marché noir étant importateurs de services.
Majoritairement, elles exportent des devises au lieu d’en importer comme le voudrait la logique touristique comme au Maroc ou en Tunisie». Reste que les demandeurs n’ont vraiment pas le choix, permettant au marché noir de continuer à manipuler le devenir de l’économie du pays.