Constantine, Capitale de la Culture arabe 2015 : Première d’El Guerrab oua Salihine du Théâtre régional d’El Eulma

Constantine, Capitale de la Culture arabe 2015 : Première d’El Guerrab oua Salihine du Théâtre régional d’El Eulma
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En reprenant la pièce d’Ould Abderrahmane Kaki, Nabil Bensekka savait qu’il s’attaquait à un morceau de choix : elle-même adaptée de La bonne âme du Se-Tchouan de Bertold Brecht, El Guerrab oua Salihine (Le porteur d’eau et les marabouts) est de loin la pièce la plus connue du regretté dramaturge.

Aussi, Nabil Bensekka se devait d’y apporter sa touche personnelle, autant sur le plan des dialogues que sur celui de la mise en scène : « Ould Abderrahmane Kaki est l’un des géants du théâtre algérien, et son texte est l’un des plus réputés. Je me suis dit que la meilleure façon d’honorer la mémoire du dramaturge était d’apporter un plus à la pièce, au niveau des dialogues qui ont été remis au goût du jour, mais également en recourant à l’animation 3D et aux jeux d’ombres et ce, afin de permettre l’accès à cette œuvre au jeune public », a-t-il notamment expliqué.

Il y avait grande foule au théâtre régional de Constantine pour la première représentation, jeudi soir, de la nouvelle mouture d’El Guerrab oua Salihine par la troupe du théâtre régional d’El Eulma, renforcée à l’occasion par deux comédiens d’expérience : Saliha Idja et Moussa Lakrout, issus respectivement des théâtres de Tizi-Ouzou et Sidi Bel-Abbès. Au lever du rideau, les spectateurs sont transportés à Sidi Dahane où, par une nuit étoilée, Sid Ali, porteur d’eau, fait la rencontre de trois marabouts de passage dans la miséreuse bourgade. Après de nombreuses tentatives de leur trouver un gîte,            « El guerrab » pense à Saliha, jeune fille « émancipée ». Cette dernière accepte spontanément de les loger pour la nuit. Pour la récompenser, « Essalihine », Sidi Abderrahmane, Sidi Abdelkader et Sidi Boumediene, lui donnent une forte somme d’argent. Elle fit alors construire trois zaouïas au niveau desquelles se tiennent quotidiennement des « waâdas » en hommage à ses bienfaiteurs. À partir de ce moment, la magnanime Saliha sera confrontée à l’avidité des habitants du hameau. Ne pouvant plus faire face à la situation, elle se fait passer pour un prétendu cousin, Salim, censé être rompu aux affaires.

À la fin, les villageois découvrent que sous l’identité de Salim, se cache Saliha. Cette dernière décide alors d’utiliser le don des saints à bon escient et ce, en construisant une grande usine qui devra assurer du travail à chacun des habitants de Sidi Dahane. Au fil des tableaux, le public fait connaissance avec différents archétypes : le maire affairiste (Bouzid Sarra), le cadi corrompu (Tahar Grour), le prolétaire vaillant et fier (Mohamed Bouafia), mais également les tourtereaux entièrement voués à leur passion secrète, campés par Djamel Guechi et Houria Bahloul lesquels, par leur jeu frais, désopilant, provoqueront à plusieurs reprises l’hilarité générale dans la salle. Petit dommage collatéral de l’actualisation du texte, le recours systématique à un vocabulaire « moderne » (AADL, ANSEJ, papicha, selfie, etc.) a fait que les dialogues paraissent parfois « surchargés », ce qui a quelquefois nui à la fluidité du jeu des acteurs. À la fin de la représentation, Nabil Bensekka n’a pas caché son émotion devant le chaleureux accueil réservé par le public constantinois à la pièce. Il a également loué les efforts consentis par les comédiens et l’équipe technique et leur contribution à ce succès.

Issam Boulksibat