Constantine – Cadastre : L’avertissements des experts

Constantine – Cadastre : L’avertissements des experts

Les surfaces cadastrées en Algérie ont connu, depuis le lancement de l’opération en 1975, une certaine avancée mais sans pour autant atteindre les résultats escomptés. Une situation qui freine énormément le développement économique.

Le débat sur l’impact de l’opération du cadastre général sur le régime foncier en Algérie, a réuni deux jours durant (samedi et dimanche) à la salle des Conférences de l’université islamique Emir Abdelkader de Constantine, bon nombre de spécialistes, universitaires et membres du conseil de l’ordre des géomètres experts fonciers de toute la région Est.

Depuis son lancement en 1975, l’opération du cadastre a connu plusieurs phases, et selon les chiffres de l’agence nationale du cadastre (ANC), les surfaces cadastrées dans tout le territoire algérien ont connu une certaine avancée avec toutefois des complexités dans l’exécution des programmes.

Jusqu’à 2010, les régions rurales encore non cadastrées sont de 7,2 millions d’hectares alors qu’elles étaient de 11 millions ha, soit un taux de réalisation de 65 %. Pour les régions urbaines, alors qu’elles étaient de 400 000 ha, aujourd’hui elles sont de 150 000 ha, avec un taux de 37,5 %. «Des taux qui sont encore très faibles et qui peuvent freiner dans certains cas le développement économique», avertit M Ahmed Benaïssa géomètre expert foncier.

«En prenant 1989 comme date de référence, le taux de réalisation annuel tourne autour des 3 % pour les régions rurales, et selon les calculs, il faut 11,5 années pour terminer le travail, alors que pour les régions urbaines le taux est de 1,7 % et dans ce cas il faut attendre 37 années pour terminer le travail» a-t-il expliqué. En dépit des efforts consentis par l’Etat pour mettre au point une stratégie fiable et réduire ainsi le taux des territoires à cadastrer, proposition lancée notamment par le président de la République en 2009 et ayant un objectif précis à atteindre dans les trois prochaines années. De l’aveu des experts on a longtemps sous-estimé l’étendue du problème, et physiquement ce sera presque impossible d’achever une telle mission dans les délais : «J’ai peur que l’on soit encore obligé d’attendre», regrette M. Benaïssa. Pour sa part, Me Lamine Cheriet, docteur en droit, a estimé qu’à défaut d’achever l’opération du cadastre, il est évident que cette situation gênera considérablement le développement économique dans le pays, surtout si l’on projette des perspectives sans savoir comment contrôler l’aménagement du territoire et l’urbanisation des villes : «un Etat sans cadastre est un Etat aveugle» a-t-il déclaré.

M. Benaïssa s’est ensuite attardé sur la situation du foncier et ses dimensions en Algérie, le qualifiant de «malade», tout en proposant carrément le plan Marshall pour résoudre le dossier. Il dira à ce propos que la propriété foncière contient trop d’incertitudes, pour ce qui est notamment de la validité des titres, l’identité des ayants droit dans le cas des successions et la lourdeur des procédures pour les transcriptions des documents.

M. Benaïssa explique en outre que « la surcharge que connaissent les tribunaux dans le traitement des contentieux liés au foncier sont la résultante du flou qui entoure l’administration juridique avec la mauvaise interprétation de la notion de la propriété personnelle et celle d’autrui, mais aussi de l’existence d’un cadastre incomplet, la faillite des structures d’enregistrement et de conservation administratives, et un marché foncier irrégulier et dépendant de l’informel». Toutes ces données ont de surcroît engendré et encouragé, selon lui, la prolifération de constructions anarchiques.