Si des combats acharnés de plusieurs semaines avaient opposé les Fatim et les troupes d’élite françaises à des groupuscules terroristes dans les massifs des Iforas, c’était uniquement pour permettre au plus gros des «troupes djihadistes» de se replier vers la Libye, ce nouveau sanctuaire intégral pour les terroristes de tous poils et de tous acabits.
Une explication rationnelle vient enfin d’être fournie à la résistance farouche, quasi suicidaire, qu’avaient déployée des groupuscules terroristes pour tenir têtes aux troupes d’élites françaises et aux Fatim, lourdement armés, pendant une vingtaine de jours, alors que ces mêmes terroristes avaient quitté sans résistance toutes les villes et garnisons qu’ils occupaient pendant plusieurs mois au niveau de tout le nord du Mali.
Au Mali, durant une vingtaine de jours de combats dans la région des Iforas, les forces françaises se sont heurtées à la farouche et, en apparence inexplicable, résistance de petits groupes de combattants. Ceux-ci étaient en réalité engagés dans une manoeuvre de retardement pour permettre à l’essentiel des combattants islamistes, qui occupaient le nord du Mali, de se réfugier en Libye.
C’est ce que nous avons pu apprendre de sources crédibles, qui suivent de très près ce dossier. Voilà qui explique, au reste, les faibles pertes humaines essuyées par ces groupes djihadistes et terroristes, formés par Ançar Dine, AQMI (Al Qaïda au Maghreb islamique), les Signataires par le Sang et le MUJAO (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest).
Comme rapporté par nous dans une précédente édition, ces mêmes terroristes ont établi aujourd’hui en Libye leur base d’action et ils peuvent, à tout moment, lancer des opérations dans l’ensemble de la zone sahélienne.
C’est, d’ailleurs, à partir de ce pays, limitrophe de l’Algérie, qu’a été orchestrée, planifiée et lancée la sanglante prise d’otages du site gazier de Tiguentourine.
C’est également dans le sud de ce pays qu’aurait trouvé refuge l’auteur de cette attaque terroriste, l’Algérien Mokhtar Belmokhtar, dont la tête a été mise à prix par Washington pour la somme de cinq millions de dollars. Aujourd’hui, le Niger, le Tchad et le Cameroun sont menacés, et c’est au Nigeria que la situation est la plus explosive. Dans cet État mastodonte et fragmenté, les islamistes disposent en effet d’un terreau favorable.
Par conséquent, l’armée fédérale mène actuellement de nombreuses actions contre les fondamentalistes de Boko Haram qui contrôlent une partie du nord du pays. Le risque est grand, cependant, de voir que ces actions ne seront que ponctuelles, et n’affaibliront que peu ou proue un mouvement terroriste qui a déjà survécu à des coups de boutoir autrement plus percutants.
UNE GANGRÈNE QUI S’ÉTEND À LA VITESSE GRAND V…
Quant au Niger, il vient d’être durement frappé par deux attentats qui ont fait plusieurs dizaines de victimes. Ce pays aussi vaste que pauvre partage près de 3 000 km de frontières poreuses avec le Mali à l’ouest, le Nigeria au sud et la Libye au nord.
La gangrène s’étend à tout le Sahel. Il fallait s’y attendre. Un expert de ce genre de question écrit ceci à ce propos : « la situation malienne cache l’incendie qui est actuellement en train de se développer dans la zone péritchadique.
Le chaos en retour se fait en effet sentir dans tout le sud de la Libye, cependant que la contagion n’est plus qu’une question de temps au Tchad et au Darfour, avec le risque de voir un continuum fondamentaliste s’établir avec les islamistes de Boko Haram du Nord-Nigeria. Quant au sud de la Tunisie, la contamination y a largement commencé ». Sic ! Tout découle de cette erreur majeure que fut l’ingérence franco-otanienne dans la guerre civile libyenne.
Le problème n’est pas seulement né de l’élimination du colonel Kadhafi par la France de Nicolas Sarkozy, mais également du fait que le gouvernement a libéré les forces qu’il contrôlait ou qu’il aurait pu aider à contrôler.
Nicolas Sarkozy et son ami BHL peuvent donc être remerciés par ces islamistes auxquels ils ont offert une base d’action pour le moment inexpugnable. Grâce à eux, le Sahélistan, simple vue de l’esprit hier, est peu à peu devenu une réalité aujourd’hui.
Il aura fallu l’attentat à la voiture piégée qui a visé l’ambassade de France à Tripoli le 23 avril dernier, pour que la presse française découvre enfin une réalité : la Libye est devenue une zone grise dans laquelle évoluent les terroristes chassés du Mali par l’Opération Serval.Le président nigérien, Mahamadou Issoufou, a de son côté déclaré que les auteurs de l’attentat meurtrier du 23 mai venaient de Libye.
Toutes les forces de déstabilisation se sont en effet regroupées dans le sud de ce pays où elles disposent d’un véritable sanctuaire puisque l’État libyen n’y est plus du tout représenté.
Et c’est aussi à partir de cette partie de la Libye, où des camps d’entraînement terroristes sont installés au vu et au su de tous, que la sanglante prise d’otages du site gazier de Tiguentourine a été lancée. Même Tripoli en avait été tenue informée sans rien entreprendre pour l’empêcher ni même prévenir Alger tant qu’il en était encore temps…
Kamel Zaïdi