L’état d’urgence sera levé incessamment. La décision a été prise jeudi par le président de la République à l’issue d’un Conseil des ministres.
D’autres mesures tout aussi importantes, visant à calmer le front social et la classe politique, ont été aussi prises à l’issue de ce Conseil. Intervenant dans le cadre de ce Conseil, le président de la République a indiqué que la levée de l’état d’urgence interviendra dans un très proche avenir.
«Aussi, pour mettre un terme à toute polémique infondée sur cette question, je charge le gouvernement à s’atteler, sans délais, à l’élaboration de textes appropriés qui permettront à l’Etat de poursuivre la lutte antiterroriste jusqu’à son aboutissement, avec la même efficacité et toujours dans le cadre de la loi», a souligné le président de la République.
A ce propos, le chef de l’Etat a rappelé que l’état d’urgence a été instauré «pour les seuls besoins de la lutte antiterroriste, et c’est cette raison uniquement qui en a dicté le maintien sur une base légale ». Pour le président de la République, l’état d’urgence «n’a, à aucun moment, entravé une activité politique pluraliste des plus riches, ni contrarié le déroulement de campagnes électorales intenses, de l’avis même des observateurs qui les ont suivies».
Mardi, vingt et un députés avaient déposé, au niveau du bureau de l’APN, une proposition de loi en faveur de la levée de l’état d’urgence, en vigueur depuis le 9 février 1992. Les promoteurs de cette initiative considèrent que l’amélioration de la situation sécuritaire «enlève tout argument pratique au maintien de cet état de fait».
Pour les élus, le décret législatif 93-02 du 6 février 1993 «ne trouve pas de fondements au triple plan juridique, sécuritaire et politique. Le caractère législatif du décret de prorogation entendait suppléer à l’écueil institutionnel de l’absence de Parlement à l’époque», explique-t-on. L’article 119 de la Constitution stipule que «l’initiative des lois appartient concurremment au chef du gouvernement et aux députés».
Les propositions de lois, pour être recevables, sont déposées par vingt députés. Le vice-Premier ministre, M. Noureddine Yazid Zerhouni, pour sa part, avait indiqué mercredi que les autorités publiques n’ont jamais pris de décisions, au titre de l’état d’urgence, qui ont «réduit ou limité» les libertés individuelles et collectives.
«Nous n’avons jamais pris de décisions au nom de l’état d’urgence qui réduisent, limitent ou portent atteinte aux libertés individuelles ou collectives », a déclaré M. Zerhouni à la presse en marge de la cérémonie de clôture de la session d’automne de l’APN. «Existe-t-il en Algérie, aujourd’hui, un prisonnier politique ?», s’est interrogé M. Zerhouni, mettant en exergue la liberté dont jouit la presse. «Les journalistes écrivent ce qu’ils veulent et sans censure », a-t-il fait valoir.
LES MARCHES AUTORISÉES SAUF DANS LA CAPITALE
Outre la levée de l’état d’urgence, le chef de l’Etat a indiqué que, hormis la wilaya d’Alger, les marches sont autorisées dans les autres wilayas, pour autant que les demandes et les conditions exigées par la loi soient réunies.
«Certes, la capitale fait exception dans ce domaine pour des raisons d’ordre public bien connues, et certainement pas pour y empêcher une quelconque expression », a-t-il précisé. «Au demeurant, Alger compte plusieurs salles publiques de capacités diverses, qui sont gracieusement disponibles pour tout parti ou association en faisant légalement la demande, en vue d’y faire entendre son point de vue», a rappelé le président de la République.
Dans la foulée, le chef de l’Etat a affirmé que la télévision et la radio doivent assurer la couverture médiatique de l’ensemble des partis et organisations nationales agréés en leur ouvrant équitablement leurs canaux. Bouteflika a souligné que «s’agissant (…) de l’accès des partis politiques à la télévision et aux radios, aucune loi ou instruction ne l’ont jamais interdit à quelque formation ou association légale que ce soit».
Dans le même contexte, le chef de l’Etat a fait observer que, de leur côté, «les partis politiques et les organisations nationales agréés devront notamment tenir compte des dispositions de la Constitution et des lois relatives aux activités politiques», car, a ajouté Bouteflika, «la liberté ne devra pas aboutir dans quelque circonstance que ce soit aux dérapages ou à l’anarchie auxquels l’Algérie a déjà versé un lourd tribut».
Enfin, Bouteflika a relevé que les récentes manifestations qui se sont déroulées en Algérie sont «l’expression d’inquiétudes et d’impatiences » chez les citoyens. Il a déclaré qu’il est de «notre devoir d’en tenir compte et d’y répondre par des efforts accrus (…), quels que soient les résultats déjà atteints dans la réponse aux aspirations de notre peuple».
Il a, en outre, ajouté que les actes de violence et les atteintes aux biens qui ont accompagné ces manifestations sont «condamnables et regrettables» et affirmé qu’ aucune revendication «ne saurait autoriser l’atteinte aux personnes et aux biens», avant de rappeler les grands chantiers mis en oeuvre par le gouvernement pour garantir l’amélioration des conditions de vie des Algériennes et des Algériens.
Il a mis l’accent sur les réalisations enregistrées jusque-là pour «rattraper ces retards et répondre aux diverses attentes sociales de la population» à travers, notamment, le lancement de «nouveaux programmes massifs» et les «réformes fondamentales » actuellement en cours.