A l’issue des travaux de la tripartite organisée sur les questions économiques, notamment le développement de l’entreprise et la promotion de l’investissement, le Premier ministre, M. Ahmed Ouyahia, a donné une conférence de presse au cours de laquelle il a fait le point sur plusieurs questions d’actualité. Il donne une vision complète des efforts et des réformes à réaliser sur tous les plans.
De prime abord, le Premier ministre a tenu à préciser que son bilan n’est pas un constat d’échec. Avec son franc-parler habituel, il fait remarquer que certains journaux se sont fourvoyés, en se délectant de parler de constat d’échec et d’aveu d’échec. Il balaie tout ça d’un revers de la main, assurant qu’il y a une réalité que le gouvernement assume pleinement au côté du monde des affaires. Il reconnaît néanmoins l’existence de retards en matière de climat des affaires, précisant que le bilan qu’il avait exposé devant les partenaires de la tripartite est le fruit d’une étude de la Banque mondiale qui lui a été commandé par la Banque d’Algérie.S’agissant du rachat d’Orascom Télécom Algérie, Ouyahia confirme le rachat par l’Etat algérien de l’opérateur de téléphonie mobile OTA. Il souligne ensuite que la procédure de rachat se poursuivra jusqu’à son terme.
Mesures concrètes
Pour ce qui est du soutien fiscal aux entreprises, il explique qu’il coûte à l’Etat une bagatelle de 450 milliards de dinars/an, octroyés aux entreprises qu’elles soient publiques ou privées. A cela viennent s’ajouter, a-t-il rappelé, la bonification des crédits à l’investissement et l’octroi quasi gratuit du foncier dans certaines régions du pays. Pour lever tout équivoque sur ce qu’apporte le gouvernement comme soutien aux entreprises, il exclut catégoriquement un retour de l’Algérie aux années 1970. Abordant ensuite, le dossier de la privatisation, il affirme, que désormais c’est l’intérêt de l’économie nationale qui le commande et selon les besoins exprimés. Il n’est plus question d’objectifs chiffrés, fixés au préalable, a-t-il précisé.
Dans cet esprit, l’ouverture du capital des entreprises, selon l’offre et la demande, sera privilégiée, en tenant compte, à l’évidence, de l’intérêt de l’entreprise et de l’économie algérienne. A la question se rapportant au chiffre de 1.200 entreprises proposées à la privatisation, il rappelle que cela remonte à 1996, date durant laquelle l’Algérie était sous l’emprise de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. A l’époque la décision a été prise dans le cadre d’un plan d’ajustement structurel que l’Algérie a réussi. Il indique ensuite qu’une nouvelle règle en matière de cession des entreprises publiques au profit des nationaux stipule que l’Etat restera actionnaire dans l’entreprise à hauteur de 34%, jusqu’à ce que son acquéreur puisse la redresser. Mais si le repreneur est un étranger, l’Etat lui cèdera jusqu’à 49% dans le capital de l’entreprise.
Ouverture politique : signes avant-coureurs
L’occasion a été pour lui de répondre aussi à des questions relatives aux réformes politiques, qui ne sont pas en réalité les premières. Ces réformes si elles sont contestées par certains, elles sont admises par la majorité. Grosso modo, le Premier ministre souligne leur nécessité et les consultations conduites par le président du Conseil de la nation, M. Abdelkader Bensalah,
devrait débouchées sur l’analyse des critiques et des propositions qui ont été faites par les uns et les autres. Il faut admettre, qu’on peut tourner le sujet dans tous les sens, on peut évoquer toutes les alternatives possibles,on en revient toujours à un moment ou à un autre à la nécessité du dialogue. Tenant compte de cette certitude, Ouyahia n’a pas manqué d’appeler les partis de l’opposition à participer de manière forte et active aux consultations en cours, en mettant à l’épreuve les engagements pris par l’Etat.
Il souligne que la décision d’initier ces réformes a été prise en toute souveraineté et sur instruction du Président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika. Et contrairement aux spéculations qui allaient bon train ces derniers mois quant à une crise en Algérie, il affirme que le pays n’est pas en crise et n’a rien à voir avec ce que d’autres pays ont connu ces derniers mois. Preuve à l’appui, il fait savoir que l’Algérie a fait son propre parcours dans le processus démocratique et en compte 40 partis politiques, 80 quotidiens et 60 syndicats, soit autant de signes d’un progrès non négligeable. Ouyahia a souligné également le caractère effectif et sans ambages de la coopération sécuritaire entre les pays du Sahel, ajoutant que des réunions de coordination se tiennent dans le cadre d’une instance commune.
L’autre élément évoqué lors de cette conférence de presse concerne l’annonce de l’adoption très prochainement d’une loi organique sur une représentation féminine de 30% dans les assemblées élues. D’autres projets de loi sont inscrits dans l’agenda du gouvernement et seront soumis à plusieurs parties pour consultation et enrichissement, comme la loi sur les partis, a-t-il indiqué.
Dialogue et écoute
La bonne gouvernance est également invoquée par le Premier ministre, expliquant que si l’Algérie a pu maîtriser l’ordre public c’est grâce en grande partie aux instructions fermes du Président de la République.
Il reconnaît que les manifestations de ces derniers mois étaient liées aux problèmes de logement et de chômage, aggravées. Il ajoute que des conflits d’intérêts des lobbies de l’économie informelle sont également à l’origine des troubles enregistrés. Le volume des attentes en logements est estimé à Alger, précise le Premier ministre, à 120.000 demandes de logements sociaux, alors que les demandes d’emploi des jeunes, en particulier, se comptent en dizaines de milliers. Il a exprimé sa satisfaction quant aux résultats obtenus par la mise en œuvre des dispositifs d’emploi, qui ont permis l’insertion professionnelle de plus de 200.000 jeunes diplômés de l’université et de la formation professionnelle, voire même des sans niveau. Les micro-crédits accordés par l’ANSEJ et la CNAC ont atteint le nombre de 15.000 dossiers représentant 30.000 emplois. A ceux qui accusent à tort les forces de sécurité de recourir à la violence, il fait remarquer que la police n’a même pas fait usage de grenades lacrymogènes, saluant par là les forces de l’ordre pour leur rôle dans le rétablissement de l’ordre public. Il relève ensuite que l’état d’urgence n’a jamais constitué un obstacle pour le processus démocratique. A la question sur l’éventuelle ouverture des frontières avec le Maroc, il répond clairement que ce n’est pas à l’ordre du jour.
Sur la crise en Libye, Ouyahia persiste et signe avançant que l’Algérie s’en tient à la position de l’UA et aux décisions du Conseil de sécurité, il n’a pas manqué de souligner la profondeur des liens de fraternité historiques qui existent entre les deux peuples algérien et libyen. Le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a démenti formellement l’existence d’une quelconque initiative d’amnistie générale en faveur de détenus de l’ex-FIS dissous (4.000 au total), impliqués dans des affaires de terrorisme, précisant que ce chiffre est loin de refléter la réalité qui le représente à moins de 10% de ce prétendu total. Par ailleurs, il relève que cette tripartite suscite une intense ferveur collective autour du dossier de l’entreprise et que le gouvernement s’attellera à une relance rapide de l’économie nationale et de l’entreprise en tant qu’impératif pour l’essor économique.
Farid B.
Les points forts
Lors de sa sortie médiatique le Premier ministre a remis les pendules à l’heure. Voici les points forts abordés par M. Ahmed Ouyahia lors de la conférence de presse qui a duré prés d’une heure trente minutes. Plus d’une trentaine de questions ont été posées par les représentants de toute la presse nationale ainsi que des médias étrangers venus en force.
• les réformes engagées par le Président de la République reposent sur des décisions souveraines et ne sont, en aucun cas, dictées par des forces étrangères
• Le Premier ministre, M. Ahmed Ouyahia, a affirmé que le bilan sur le climat des affaires qu’il avait dressé durant les travaux de la tripartite, »n’est pas un constat d’échec ».
• L’Algérie a engagé des réformes politiques en toute souveraineté.
• La position de l’Algérie à l’égard de la situation en Libye est « claire » et s’en tient à la positon de l’Union africaine (UA) comme elle respecte les décisions du Conseil de sécurité de l’ONU, y compris celle portant sur l’embargo aérien contre ce pays.
• L’ouverture des frontières terrestres entre l’Algérie et le Maroc n’est « pas à l’ordre du jour ». Cela « arrivera un jour ou l’autre ».
• L’Algérie décidée à racheter Orascom Telecom Algérie.
• « L’Algérie est parvenue à maîtriser l’ordre public grâce aux instructions fermes du Président de la République ».
• la coopération entre les pays du Sahel aux plans militaire et sécuritaire est « effective et sans ambages ».
• Le soutien fiscal accordé par l’Etat aux entreprises nationales dans le cadre de la promotion de l’investissement coûte chaque année au Trésor public quelque 450 milliards de dinars.
• Le gouvernement soumettra bientôt un projet de loi sur une représentation féminine de 30 % dans les assemblées élues.
• Privatisation: l’Etat ne se fixe plus un objectif chiffré mais selon l’intérêt de l’économie nationale.
• Ahmed Ouyahia a catégoriquement démenti l’existence d’une initiative d’amnistie générale des détenus de l’ex-FIS condamnés pour terrorisme.