Conférence d’Ali Yahia Abdenour à Montréal “Ce pouvoir va partir en avril 2015”

Conférence d’Ali Yahia Abdenour à Montréal  “Ce pouvoir va partir en avril 2015”

ali-yahia-abdenour_278090.jpgC’est la conviction de Abdenour Ali Yahia qui s’est exprimé, dimanche, à l’occasion d’une conférence publique à Montréal. “Le pouvoir va finir par partir, probablement en avril prochain”, prévoit le vieux militant.

Pour lui, le président de la République a fait une seule chose en arrivant au sommet de l’État : comment garder le pouvoir. “Pour ce faire, il s’est attelé à une mainmise en règle sur l’armée, car c’est elle qui désigne les présidents”, a déclaré l’orateur pour qui Bouteflika a dépensé plus de 700 milliards de dollars pour asseoir son pouvoir, sans pour autant développer le pays.

Faisant un constat sans complaisance de la gouvernance de Bouteflika, Me Ali Yahia estime que la souveraineté populaire est encore confisquée par le pouvoir, puisqu’il n’y a ni justice, ni liberté, ni élections libres.

Plaidant pour un changement pacifique du système, le président d’honneur de la Laddh a fait sienne la proposition de la CNLTD (Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique). Pour lui, le changement adviendra tôt ou tard, pour sûr. Il faut juste veiller à ce qu’il soit pacifique. Il a affirmé, par ailleurs, que Ferhat Mehenni a le droit d’exprimer ses opinions politiques et que son mouvement doit être reconnu. “Il faut laisser les idées mûrir ; ensuite, c’est au peuple de trancher”, a-t-il recommandé, en plaidant pour une régionalisation synonyme, à ses yeux, de plus de pouvoirs pour les régions.

Par ailleurs, le président d’honneur de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme est revenu longuement sur l’épisode de la crise dite berbériste de 1949, objet d’un essai publié aux éditions Barzakh. Gardant une lucidité à toute épreuve, en dépit de son âge (93 ans), le conférencier est remonté dans les profondeurs du Mouvement national pour une meilleure compréhension des événements.

Comment la crise berbériste a-t-elle éclaté ? Fin 1948, le bureau politique du PPA-MTLD adresse à l’ONU un mémorandum dans lequel Messali qualifie l’Algérie de “nation arabe et musulmane depuis le 7e siècle”, gommant ainsi d’un trait la période antéislamique de l’Afrique du Nord, affirme l’orateur.

Les militants de la région de la Kabylie, sous la houlette de Ouali Bennaï, décident de riposter à cet ostracisme identitaire et culturel. Ils tiennent conclave, sans Hocine Aït Ahmed, alors chef de l’OS et membre du bureau politique du parti dont il n’avait pas voulu démissionner. “En avril 1949, poursuit Ali Yahia, des étudiants militants de la région rendent public un opuscule sous le titre L’Algérie vivra. C’est pendant ce temps qu’Amar Ould Hamouda, un des adjoints de Bennaï, sera arrêté.”

Le démantèlement de l’OS, l’arrestation des militants berbéristes et les dissensions entre messalistes et centralistes feront reléguer la crise identitaire au second plan. “En janvier 1956, les chefs de la Wilaya III avaient convoqué les berbéristes Amar Ould Hamouda et Yahia Henine. Krim Belkacem, Ouamrane, Mohamedi Saïd et Amar Ath Cheikh s’étaient réunis au village Aït Wabane dans le Djurdjura pour prononcer la condamnation à mort des militants berbéristes. Mais la décision n’a pas été exécutée sur-le-champ. Peut-être que Krim voulait en parler à Abane. Il reste que Ould Hamouda sera assassiné, alors que Henine a été empêché de se rendre au rendez-vous donné par Amar Ath Cheikh à cause d’un accrochage à Thenia”, raconte le vieux militant qui s’est dit encore choqué par la mort de Bennaï, “un visionnaire” de la Révolution.

Nous sommes en septembre 1956. Après le congrès de la Soummam qui a donné naissance aux nouveaux organes de la Révolution, le CCE a condamné les messalistes et les berbéristes. “Or, ces derniers, contrairement aux messalistes qui étaient contre la Révolution, étaient les premiers à avoir pris les armes dans les maquis”, précise l’intervenant.

Ce dernier rappelle le reproche qui lui a été fait par le CCE pour avoir déjeuné avec Ouali Bennaï, alors condamné par le CCE. “Ouamrane, qui était au courant de la décision, avait envoyé un message à Bennaï lui demandant de quitter le pays. Quand j’ai rencontré Bennaï, il était déjà au courant de sa condamnation à mort. Il m’a alors chargé de transmettre le message au CCE. Il m’a dit : ‘Tu dis à Abane,  en creusant ma tombe, tu creuses aussi la tienne’”, se rappelle encore Me Ali Yahia, ajoutant que Bennaï a été assassiné par le colonel Mohamedi Saïd le 13 février 1957.

Y. A.