Pyongyang, force la porte du «club nucléaire» en y faisant une entrée condamnée par les puissants du monde (NPM le site supposé de l’essai)
L’essai nucléaire auquel a procédé hier matin la Corée du Nord a suscité une levée de boucliers dans le monde, y compris parmi les soutiens traditionnels de Pyongyang, la Chine et la Russie.
La Corée du Nord a procédé hier à son troisième essai nucléaire, d’une puissance bien supérieure aux deux précédents et avec un engin miniaturisé selon ses dires, un acte de défiance condamné par la communauté internationale. «Un troisième essai nucléaire a été mené avec succès», a annoncé l’agence officielle KCNA. «Ce test nucléaire de haut niveau avait, contrairement à ceux du passé, plus de puissance explosive et a utilisé un engin miniaturisé et plus léger». Pour le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, cet essai «profondément déstabilisateur» est «une violation claire et grave des résolutions du Conseil de sécurité», selon des propos rapportés par son porte-parole Martin Nesirky. Un acte «provocateur» qui ne rend pas le pays «plus sûr», selon le président américain Barack Obama qui a appelé à une action internationale «rapide» et «crédible» de la communauté internationale. Le Conseil de sécurité se réunissait en urgence hier, pour examiner la façon de réagir à ce test, qui contrevient aux résolutions de l’ONU. En Asie, le Japon et la Corée du Sud ont vivement critiqué l’opération nord-coréenne. Un diplomate à l’ONU a estimé, sous le couvert de l’anonymat, que le geste des Nord-Coréens était «un vrai défi lancé aux Chinois». Pékin, seul allié de poids de Pyongyang, avait prié son voisin communiste de ne pas effectuer un 3e essai nucléaire. Selon ce diplomate, Pékin, Moscou et Washington se sont concertés depuis quelques jours et «vont rapidement s’entendre sur le fait qu’une action ferme s’impose». Le ministère chinois des Affaires étrangères a fait part de «la ferme opposition» de Pékin au geste nord-coréen, sans employer toutefois le mot «condamnation». Un ton plutôt modéré qui contraste avec les avertissements de Pékin la semaine dernière, via un éditorial de la presse officielle, qu’en cas de nouveau test, Pyongyang devrait en «payer le prix fort», allant jusqu’à invoquer le mot de «rupture» et la réduction de l’aide chinoise, vitale pour l’économie exsangue de la Corée du Nord. L’Iran, accusé par les Occidentaux de chercher à fabriquer l’arme atomique malgré ses dénégations, a désapprouvé Pyongyang, estimant qu’ «aucun pays» ne devait posséder d’arme atomique. L’utilisation d’un engin miniaturisé est source d’inquiétude pour les puissances internationales, car elle laisse entendre que Pyongyang maîtrise désormais la délicate technologie permettant de fabriquer une bombe suffisamment petite pour être fixée sur une ogive. Jusqu’à présent, l’incertitude demeurait sur la capacité du régime communiste à développer une tête nucléaire pour missile à longue portée. Si Pyongyang est effectivement parvenu à mettre au point une bombe miniaturisée, la donne serait radicalement changée. D’autant que le Nord a réussi début décembre à envoyer dans l’espace une fusée, progrès significatif dans sa technologie balistique. Le ministère sud-coréen de la Défense estime entre 6 et 7 kilotonnes la puissance de l’explosion de mardi, contre seulement un kilotonne pour le test de 2006, et entre deux et six pour celui de 2009. La bombe atomique larguée par les Américains sur Hiroshima était de 15 kilotonnes. Pour l’organisation du traité d’interdiction complète des essais nucléaires (Ctbto), basée à Vienne, le test de Pyongyang constitue «une menace claire» pour la sécurité internationale. Le Nord a précisé avoir mené ce test «dans le cadre de mesures visant à protéger (sa) sécurité nationale et (sa) souveraineté contre l’hostilité incessante des Etats-Unis, qui ont violé le droit de (sa) république à mener des lancements pacifiques de satellite», selon un communiqué de KCNA. Les analystes notent que le test a eu lieu à quelques heures du discours sur l’état de l’Union de Barack Obama. «La tactique (nord-coréenne) est de créer une situation de crise et de presser la communauté internationale de négocier avec eux», estime Masao Okonogi, professeur à l’université Keio au Japon. Le Nord «ne va certainement pas s’arrêter là et il va faire traîner cette crise nucléaire jusqu’en juillet, lorsque Washington célèbrera le 60e anniversaire du cessez-le-feu de la guerre de Corée (1950-1953)», ajoute l’analyste. Pyongyang veut que cet armistice soit transformé en traité de paix, jamais conclu depuis 60 ans, selon le professeur.
La secousse, dont la magnitude a été estimée entre 4,9 et 5,1, s’est produite à 11H57 (02H57 GMT) et son épicentre était dans la région de Kilju (nord-est), où se trouve le site de Punggye-ri utilisé par le Nord pour les tests nucléaires. Elle a été ressentie dans la province du Jilin, mitoyenne de la Corée du Nord. «Cela a tremblé moins d’une minute, mais aucun bâtiment ne s’est effondré», a raconté une habitante de cette région du nord-est de la Chine.