Ces derniers jours, rien ne va plus au complexe sidérurgique d’ArcelorMittal d’El Hadjar. Tous les ingrédients d’une tension sociale sont réunis, entre autres les difficultés financières auxquelles doit faire face AMA, vu la conjoncture de crise au niveau mondial et, par conséquent, la fermeture de plusieurs sites en Europe.
Joe Kazadi, directeur général, dans une note d’information adressée aux travailleurs, place l’année 2013 sous le signe de la survie de l’entreprise grâce à la contribution des 5500 salariés. Il annonce que l’objectif de la production en 2013 sera à hauteur de 900 000 t d’acier avec une rigoureuse politique de gestion de ressources humaines, et donc les salariés doivent s’impliquer davantage au fonctionnement de l’entreprise.
Joe Kazadi reconnaît ouvertement que la trésorerie actuelle est très difficile. «Nous sommes très endettés», sans citer le seuil d’endettement ; cette situation met donc potentiellement en péril l’emploi des 5500 travailleurs.
Dans le même contexte, Frédéric Bayle, directeur des ressources humaines, met en branle le plan Omega qui a été longtemps décrié par le partenaire social, ce plan étant synonyme de compression des effectifs.
Ainsi, dans sa politique de ressources humaines, il prône la gestion du changement. Il est aussi question de mobilité et de flexibilité des salariés par la création du fameux centre de mobilité, structure qui est qualifiée par certains syndicalistes de «centre de concentration des travailleurs».
D’après certaines sources crédibles, tous les directeurs ont été instruits, dernièrement, de réduire leurs effectifs de 20%. Ce personnel en surplus, gonflera, dans les prochains jours, les rangs «du centre de mobilité». En outre et dans la même lignée, dans une première phase, 500 ouvriers des deux aciéries à oxygène seront également redéployés.
Et toujours dans le cadre de cette politique d’austérité, caractérisée par des licenciements collectifs et la production à moindre coût pour dégager des profits, la direction d’AMA compte abandonner la filière classique communément appelée «zone chaude» qui comprend le haut fourneau (HF), PMA, ainsi que la cokerie. Cette mesure équivaut au licenciement de près de 2000 salariés.
Toutes ces décisions draconiennes, qui menacent outre mesure l’emploi, prennent en compte l’amélioration de la productivité d’une société en difficulté. Alors que les structures syndicales de l’UGTA, l’union locale, l’union de wilaya et le nouveau syndicat d’entreprise, mais aussi le Comité de participation (CP) vivent des tensions extrêmes.
Dans cette tourmente, les membres du bureau syndical, élus le 28 février 2013, ne savent plus à quel saint se vouer. Leur réunion avec la direction a été reportée à deux reprises et ils seront finalement reçus que le 8 avril. Le nouveau partenaire social a vraiment du pain sur la planche pour relancer les négociations de la convention collective et autres revendications sociales mises aux oubliettes par la direction depuis la nouvelle donne.
Rejet du projet de règlement intérieur
Autre pomme de discorde, le lancement du projet portant règlement intérieur de l’entreprise ArcelorMittal que le CP, instance consultative, rejette en raison des abus constatés et de la sévérité des sanctions à l’encontre des travailleurs. Il prône le maintien du règlement intérieur en vigueur depuis 2012, notamment son chapitre disciplinaire.
Le comité de participation estime que ce règlement intérieur conviendrait parfaitement à des établissements carcéraux tant il est restrictif des libertés. Il s’adresse plus à des détenus qu’à des travailleurs évoluant en usine.
A travers toutes ces décisions et mesures, les dirigeants d’ArcelorMittal replongent le monde ouvrier dans une ère révolue, au moment où les pouvoirs publics font face un véritable problème social qu’est le chômage. La violente contestation des jeunes sans emploi, il y a seulement quelques jours, en est la parfaite illustration. Et cela à quelques encablures du complexe sidérurgique d’ArcelorMittal.
A.I.