En dépit des efforts déployés pour le développement de l’outil internet et des stratégies mises en œuvre en ce sens, notamment dans le cadre du programme e-Algérie 2013, des retards importants sont accusés.
A titre d’illustration, on peut citer l’état des sites web et des portails officiels qui demeurent pour la plupart hors service et loin de renseigner suffisamment l’internaute. Etat des lieux.
La nouvelle stratégie e-Algérie 2010 a fixé les chantiers à mettre en œuvre. Il s’agit d’abord de lancer le portail e-gouvernement, qui sera le point de contact unique entre les citoyens et les administrations. Le e-banking est le second système qui permettra,
en plus de la possibilité offerte aux banques aujourd’hui d’effectuer des transactions électroniques entre elles, d’offrir aussi à leurs clients, en particulier les entreprises, des services en ligne.
La stratégie de développement des nouvelles technologies évoque aussi le e-investissement, le e-business et le e-procurement (système pour la passation de marchés publics, avec l’établissement d’une procédure informatisée standard pour l’administration centrale et locale et les organismes publics).
Le développement de services en ligne à destination des citoyens, des entreprises, des salariés et d’autres administrations a été également souligné.
L’ancien ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication, Hamid Bessalah, avait indiqué que la e-gouvernance est sur la bonne voie grâce aux différents projets qui sont actuellement en cours de développement. Le premier responsable des postes et des télécommunications avait insisté dans ses déclarations à la presse
sur le développement de plateformes de service en ligne en direction du citoyen, notamment le service en ligne informationnel et de façon à ce que chaque ministère ait son portail avec tous les services qui concernent le citoyen. Cela constitue, selon lui, une priorité, étant donné que le nombre d’abonnés à la toile a dépassé les 3 millions.
Le développement de la plateforme e-gouvernance a été lancé avec l’opérateur historique coréen Korea Telecom (KT), qui a signé en 2009 un contrat avec le ministère portant sur la formation dans le domaine de la e-gouvernance.
Cet accord portait sur la formation en technologies de l’information et de la communication des ingénieurs et des cadres de différents ministères et la mise en place d’une équipe composée d’experts des deux parties pour réaliser des études de faisabilité en Algérie de la e-gouvernance.
Dans le cadre du plan quinquennal 2010-2014, une enveloppe de 100 milliards DA a été dégagée pour la mise en place de la «e-gouvernance». Parallèlement à ces projets et intentions de développer l’outil de l’internet et son usage, la réalité nous donne un autre constat, peu reluisant, notamment sur la conception et la gestion de portails institutionnels et des opérateurs économiques.
En effet, des liens de sites de ministères ne sont pas actualisés. Il s’agit, entre autres, des sites du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, du ministère du Commerce, du ministère des Transports, du ministère de la Culture, ainsi que du ministère de l’Energie et des Mines. Le site du ministère de la Jeunesse et des Sports n’est pas également disponible.
Le message affiché est celui de «site introuvable» ou «non disponible». Des départements ministériels, à l’instar du secrétariat chargé de la Communication, ne dispose pas encore d’un site d’information. Du point de vue textes et images, les sites accessibles sont caractérisés par une pauvreté et une qualité médiocre. Les services et les dossiers importants ne sont pas également accessibles.
Exceptionnellement, le site du ministère des Affaires étrangères (www.mae.dz), riche en informations et services, nous permet de surfer sur les portails des ambassades et des postes consulaires algériens se trouvant à travers le monde.
Mise à part les sites des ambassades d’Algérie en Allemagne et en Italie, disponibles dans les langues officielles de ces deux pays, la plupart des autres liens des ambassades et consulats sont en version francophone.
Les e-mails affichés ne sont pas conformes aux règles professionnelles en la matière. Les comptes de messagerie sont créés, en effet, sur des moteurs de recherche, à l’exemple de Google, Wanadoo et Yahoo, alors que les conditions de confidentialité et de marketing exigent que les adresses soient créées sur les noms des domaines nationaux (.dz).
A titre indicatif, plusieurs ambassades utilisent Yahoo et Hotmail dans leur adresse électronique, sachant que les informations échangées sont particulièrement sensibles et certaines relèvent du secret d’Etat.
Pour les professionnels de la toile, cela est inadmissible pour un département ministériel de souveraineté. La diplomatie devrait donner l’exemple en matière de règles de communication et d’information.
Elle est considérée comme la vitrine du pays à l’étranger. D’autant plus que la gestion de la messagerie et des portails relève d’un département ou d’une direction ayant la compétence requise. Du point de vue graphique et esthétique, c’est une véritable mosaïque.
Les sites des ambassades et des consulats algériens ne répondent à aucune charte graphique. Il n’existe pas une certaine harmonie et une identité visuelle pouvant attirer l’internaute.
La qualité des textes, ainsi que des illustrations laisse comprendre que les concepteurs sont venus d’horizons divers, d’où une multitude de couleurs et de concepts.
En outre, le site du ministère des Affaires étrangères est disponible uniquement dans la version arabophone et francophone, alors que la version anglophone est indispensable étant donné sa dominance à l’échelle mondiale.
Par ailleurs, les liens mis en ligne pour consulter la presse algérienne ne tiennent pas compte de la disparition ou de la naissance de certains titres. Le site d’un quotidien est toujours dans l’annuaire, alors que le journal n’existe plus sur les étals. Des liens de quotidiens sont hors service, alors que d’autres ne sont pas intégrés.
Il faut, à ce propos, rendre hommage aux ambassades algériennes en Italie (Rome) et en Allemagne (Berlin) dont la réactivité et le professionnalisme sont indiscutables, comme nous avons eu à le constater à travers des correspondances à ces chancelleries.
Ce n’est malheureusement pas le cas des autres représentations diplomatiques algériennes à l’étranger.
Erreurs d’orthographe et de syntaxe
Notre recherche sur les sites officiels nous a permis de relever d’autres insuffisances.
Nous avons remarqué que des portails de ministères, à l’exemple de celui du département des postes et des télécommunications dont la qualité laisse à désirer, où la version en langue française est truffée d’erreurs de syntaxe et d’orthographe.
Les textes disponibles sur le site sont également des reproductions intégrales de documents administratifs du ministère. Les responsables et les créateurs n’ont pas fait l’effort de synthèse et de rendre attrayantes les informations communiquées.
Censé être la véritable interface entre les différents sites et liens d’information, le portail du ministère de la Postes et
des Technologies de l’information et de la communication n’offre aucune possibilité dans ce sens, se limitant à donner les liens d’organismes placés sous sa tutelle.
Les carences ne se limitent pas aux points soulevés. Les sites des ministères des Affaires religieuses et des Moudjahidine sont disponibles uniquement dans la version arabophone, privant des lecteurs francophones et anglophones.
A quand le billet électronique ?
Les sites internet des institutions économiques et des grandes entreprises publiques sont également loin de répondre aux attentes des internautes. Mise à part la poste qui a permis aux clients de consulter leurs comptes
via le net, les banques algériennes peinent à généraliser ce mode, obligeant les usagers à se déplacer au niveau des agences bancaires parfois au prix d’une demi-journée d’absence à cause des embouteillages dans les grandes agglomérations du pays.
La compagnie nationale Air Algérie avait fait toute une campagne médiatique depuis plus d’une année sur l’achat de billets électroniques par internet. Or à ce jour, le service en question n’est pas opérationnel.
«Nouveau ! Air Algérie lancera prochainement le paiement online en DZD des billets avec la carte CIB.»
C’est le message annoncé sur le site depuis plusieurs mois. Elle est vraiment drôle et paradoxale la politique de communication via le net des entreprises algériennes.
Malgré la croissance qu’a connu en matière d’utilisation des TIC, avec un nombre d’internautes estimé à 7 millions, l’usage du réseau internet et les services (la consultation de compte, les formalités et dossiers administratifs) sont en deçà des attentes.
Les professionnels du domaine ont souligné à maintes reprises la nécessité de codification des sites institutionnels afin de donner une autre image et une identité aux outils d’information des autorités publiques.
La création d’une charge graphique et d’une institution chargée de cette mission est recommandée, à défaut de solliciter des boîtes de communication privées.
L’Algérie demeure très en retard dans la mise en place de la société de l’information. Entre le discours et la réalité, on se rend compte des lacunes et du fossé existants.
Par Farouk Belhabib