Qui sont ces Algériens établis dans les coins les plus reculés de la planète ? Comment vivent-ils et dans quelles conditions ? Connaissent-ils leurs droits en Algérie tout en étant à l’étranger ? Ce sont les questions qui ont motivé le déplacement du parlementaire Mohamed Gahche, député à l’APN, représentant la communauté nationale établie dans les régions de l’Amérique, de l’Océanie et de l’Asie.
Durant 40 jours, il a sillonné plusieurs villes où il a pu recueillir les préoccupations des Algériens vivant loin de la patrie. Un périple qu’il a bien voulu nous faire «découvrir». Le nombre d’Algériens établis de façon irrégulière en Indonésie et en Malaisie est très fort, selon lui.
«Ce sont des pays sans visa, ce qui fait que l’accès est facile pour les Algériens qui y vont et restent des années jusqu’à ce qu’ils se rendent compte que leur passeport a expiré. Sans immatriculation dans le pays d’accueil, la loi exige à ce que le passeport soit établi dans le pays d’origine. Ces milliers de jeunes sont dans l’embarras», a-t-il confié
La mesure de complaisance consistant à délivrer un passeport d’une année aux Algériens, en guise de solidarité, prise par un certain nombre d’ambassadeurs, notamment en Australie, en Chine, en Malaisie, en Indonésie et en Thaïlande a contribué énormément à réduire l’impact de cette situation. «Ces consulats délivrent des passeports d’une année ou deux, ça dépend des cas, pour les Algériens qui souhaitent se marier ou faire une résidence dans le pays d’accueil.
Ça les aide à constituer un dossier administratif en attendant une régularisation définitive de leur situation. Une fois les choses faites, on leur délivre un passeport de cinq ans comme en situation normale», a-t-il ajouté en saluant cette décision courageuse prise par les ambassadeurs dont l’impact est très bénéfique pour les jeunes. Plusieurs questions relevant de l’état civil ont été posées au courant de cette tournée.
«Les gens posent des questions sur l’application de la loi sur la nationalité, sur la possibilité de délivrer l’extrait de naissance n°12 S pour le passeport biométrique dans les consulats comme cela a été fait pour le casier judiciaire, d’augmenter le nombre de pages dans le passeport, de supprimer la profession et l’adresse de ce document et bien d’autres», a-t-il confié.
En Thaïlande, la plus grande partie des Algériens n’a pas accès aux postes de travail. «Les patrons thaïlandais ne font pas travailler les algériens. Pour accéder à un poste, ces derniers prennent des noms français et circulent avec des documents falsifiés», a fait savoir notre interlocuteur.
«Ce sont des fugitifs. Ils ont de fausses identités et de faux noms qui n’ont rien à voir avec leurs propres convictions ou leur personnalité», a-t-il poursuivi. Ils interpellent les pouvoirs publics à intensifier leurs relations avec la Thaïlande pour trouver une solution à ce problème. Beaucoup d’Algériens se sont plaints du traitement qui leur ait réservé aux aéroports de Singapour.
«Les services de police les font attendre quelques heures à l’intérieur de l’aéroport avant de les soumettre à un contrôle particulier», soutient M. Gahche, qui a ajouté que «les membres de notre communauté sollicitent l’intervention des autorités algériennes en vue d’améliorer les relations avec ce pays afin de mettre fin à ce genre de pratiques».
Système de notation
Selon le député de l’APN, des professeurs de l’université de Hong Kong en Chine, de Malaisie, de Corée ou d’Australie ont émis le souhait de faire profiter les étudiants algériens des formations dans ces universités dans diverses spécialités. Ils regrettent que le système de notation des moyennes générales dans les universités algériennes ne soit pas compatible avec celui établi dans les pays anglophones, ce qui prive des milliers d’étudiants de stages et d’emplois au sein de ces universités.
«Ces professeurs gèrent des budgets de milliers de dollars destinés pour le recrutement des meilleurs étudiants dans divers pays. Ils leur assurent une formation avec un salaire mais le système de notation en Algérie n’est pas compatible avec celui des pays anglophones, ce qui fait que les Algériens sont systématiquement exclus.
Ces professeurs souhaitent que le ministère procède à une révision du système de notation», a-t-il expliqué. Les étudiants bénéficiaires d’une bourse d’une année pour étudier la langue chinoise estiment que la durée n’est pas suffisante pour apprendre une langue nouvelle qu’ils n’ont jamais connue.
«Ils veulent que ce soit deux ans pour mieux apprendre et maîtriser. Le problème se pose aussi pour les étudiants envoyés pour étudier l’Anglais. On se demande pourquoi ils sont en Chine au lieu que ce soit en Angleterre ou aux Etats-Unis», s’est-il demandé.
Réconciliation ?
Les cas des Algériens condamnés pour terrorisme et qui ont quitté le pays durant la décennie noire reviennent également. Beaucoup d’entre eux sont toujours à l’étranger. Ils sont privés de retour au pays et n’ont droit à aucun document administratif délivré par les autorités algériennes après qu’ils aient été condamnés par contumace pour appartenance à des groupes terroristes.
«J’ai rencontré des cas de cette catégorie en Australie et en New Zeland. Ils demandent de bénéficier des mesures de la réconciliation nationale. Ils ignorent s’ils ont droit ou non et ne connaissent pas les procédures qu’il faut suivre pour atteindre cet objectif», dira M. Gahche. «Ce sont des citoyens algériens qui n’ont jamais remis les pieds dans le pays. Ils sont mariés avec des étrangères et ont des papiers, mais ils souhaitent rejoindre leurs familles», a-t-il ajouté.
Durant ses rencontres avec les membres de la communauté algérienne établis à l’étranger, Mohamed Gahche a insisté sur les mesures prises par les autorités en leur faveur. Les Algériens vivant à l’étranger peuvent bénéficier des crédits accordés par l’Ansej, l’Angem et la Cnac, sachant que des mesures ont été prises par les pouvoirs publics pour faciliter l’accès à ces dispositifs.
Les Algériens établis à l’étranger ont droit également d’acheter ou de construire une maison en présentant les fiches de paie de la compagnie où ils travaillent dans le pays d’accueil à une banque algérienne afin d’obtenir un crédit.
En encourageant ces membres à venir en Algérie pour lancer des projets d’investissement dans divers secteurs d’activité afin de créer les postes d’emploi, le député a relevé le manque d’information sur la politique économique du pays et les diverses décisions prises à l’égard de cette communauté. «Les gens ignoraient qu’ils avaient droit à tout cela.
Ils n’ont pas de domicile ni dans le pays d’accueil ni chez eux mais ils ne savent pas comment y arriver. Il a fallu leur parler et les convaincre que c’est devenu aujourd’hui possible avant de les inciter à profiter de ces opportunités», a-t-il constaté en soulignant que beaucoup d’entre eux ont accumulé une expérience intéressante qui peut être très bénéfique pour le pays. «A condition de lui trouver une forme pour la concrétiser», a-t-il souligné.
Par Nouria Bourihane