Après la ratification de la convention internationale des droits des personnes handicapées, en 2009, l’Algérie s’oriente vers l’adoption d’une approche intégrale qui dépasse celle purement solidaire permettant ainsi de développer une approche globale et intégrée qui interpelle la citoyenneté de la personne handicapée lui garantissant l’exercice de ses droits.
Dans ce cadre, et à l’occasion de la Journée mondiale des handicapés, la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’homme a organisé, hier, à l’hôtel El-Djazaïr, une journée d’étude sur le thème « Fixer des objectifs au millénaire ».
En présence du secrétaire général de la commission, M. Abdelouahab Merdjana, Mme Atika El-Mamri, présidente de la Fédération algérienne des personnes handicapées, M. Bruno Gaurier, membre du Conseil français des personnes handicapées pour les questions européennes, les intervenants ont mis l’accent sur le fait que la convention ne limite pas les problèmes des personnes handicapées au domaine purement médical, mais adopte une approche «droits de l’homme».
En effet, selon eux, ce texte prend note du fait que «la notion de handicap évolue et que le handicap résulte de l’interaction entre des personnes présentant des incapacités et les barrières comportementales et environnementales qui font obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres dans l’analyse des problèmes socio-économiques et culturels».
Ainsi, la convention internationale des droits des personnes handicapées a pour objectif de promouvoir et de protéger les droits de l’homme de toutes les personnes handicapées, y compris celles qui nécessitent un accompagnement plus poussé, leurs permettant de jouir pleinement de leurs droits et liberté en toute égalité avec les autres personnes et en respect de leur dignité.
Dans son allocution, le secrétaire général de la commission a indiqué que «la Commission nationale souligne l’impératif de mise en place d’un mécanisme national de concertation, associant tous les acteurs et tous les intervenants autour des personnes handicapées».
Par ailleurs, M. Merdjana s’est félicité du lancement de l’enquête nationale sur le handicap en Algérie, estimant que cette action vient au bon moment et devrait faire connaître ses résultats à l’ensemble des partenaires concernés. Les données chiffrées attendues de cette enquête, a-t-il poursuivi, sont de nature à garantir la qualité et l’ampleur des actions à entreprendre au service des personnes handicapées.
A ce titre, la Commission a tenu à souligner que la question de l’accessibilité ne devrait souffrir aucune approche de type approximatif, mais reposer sur une large concertation des acteurs concernés et des compétences nécessaires. L’accessibilité devrait, également, reposer, selon M. Merdjana, sur la base d’actions programmées, budgétisées et qui font l’objet d’un contrôle approprié avant la mise en service des voies et moyens de circulation ou encore des moyens de travail ou des équipements de formation.
De son côté, la présidente de la Fédération algérienne des personnes handicapées, Mme Atika El-Mamri, a mis en exergue la nécessité de mobiliser des compétences et des experts aus côtés des pouvoirs publics et des partenaires afin de renforcer les actions en cours visant la mise en œuvre de cette convention internationale.
Dans cet ordre d’idées, elle a proposé l’élaboration d’une stratégie nationale accompagnée d’un calendrier pour chaque programme d’application à l’effet d’être à jour dans la mise en œuvre de cette Convention internationale.
Pour rappel, les pays concernés sont tenus de présenter leurs rapports Etat-parties sur l’application de cette Convention internationale, trois ans après la ratification.
Sihem Oubraham
Ils ont dit…
Atika El-Mamri :
«200 enfants handicapés, recensés à Alger, ne sont pas scolarisés»
«La journée d’aujourd’hui est consacrée pour faire connaître la Convention internationale relative aux droits des personnes handicapées qui a été ratifiée par l’Algérie le 12 mai 2009. Qu’elles sont les obligations de l’Etat vis-à-vis de cette convention ? Quel est le rôle des associations et de la société civile dans la mise en œuvre de cette convention et aussi que peut apporter cette convention ? Nous sommes très contents qu’il y ait enfin un texte de loi international qui a été ratifié par notre pays ; cela signifie que ce dernier s’engage, non seulement à respecter toutes les obligations qu’il y a dans ce texte, mais aussi à donner les moyens pour mettre en œuvre les droits qui sont contenus dans la convention. La personne handicapée n’est plus vue comme étant porteuse d’un handicape, mais comme étant porteuse de droits. La convention ne parle pas de droits nouveaux, mais elle explique comment la personne handicapée peut avoir accès aux droits de tous.
A titre d’exemple, selon notre Constitution, tout enfant a droit à la scolarisation sans discrimination, mais si l’école n’est pas équipée pour accueillir cet enfant, et que les enseignants ne sont pas préparés à prendre en charge cet enfant et pour son suivi. Car les enseignants doivent être soutenus, formés et prêts pour la prise en charge de ses enfants. Il y a une liste de 200 enfants handicapés au niveau de la wilaya d’Alger, qui ne sont pas scolarisés, et ce n’est pas parce qu’ils ont des déficiences intellectuelles. Malheureusement, c’est parce qu’il ne peut pas écrire que l’école ne lui est pas accessible. Que faire pour que les enfants handicapés, quels que soient leur rythme et leur capacité, puissent jouir du droit à scolarisation au même titre que tous les enfants ?»
Bruno Gaurier : «Cette convention sera bénéfique»
Cette journée est tout à fait essentielle, parce que les représentants des associations sont présents. Pour que les personnes connaissent leurs droits, il faut que leurs associations soient présentes et qu’on leur explique leurs droits. C’est un devoir pédagogique, et c’est le devoir des associations. Cette journée est importante, car elle se passe sous l’égide de la Commission nationale consultative des droits de l’homme et que cette commission nationale, c’est un peu leur rôle, les commissions des droits de l’homme puisqu’elles relèvent des Nations unies et la convention est une convention des Nations unies. C’est essentiel le fait que la commission des droits de l’homme, non seulement soit présente mais organise aussi des journées importantes. Cette convention va être bénéfique aux personnes handicapées, on l’espère tout de même, parce qu’une convention internationale, quand elle est ratifiée par un pays, elle prend force de loi au même titre que la Constitution elle-même. Cela veut dire que d’une certaine façon, les droits des personnes handicapées figurent quasiment dans la Constitution. C’est-à-dire que ça devient incontournable, et qu’un Etat que ce soit l’Algérie, l’Europe ou l’Amérique, en ratifiant cette convention, s’obligent à faire rentrer les personnes handicapées dans les droits de tous.»
Propos recueillis par S. O.