Il est inévitable que le débrayage entamé depuis le 9 octobre dernier par les travailleurs de la laiterie de Draâ Ben Khedda (DBK) de Tizi Ouzou dévoile ses résultats au lendemain de l’annonce, par les grévistes, de suspendre leur mouvement à partir d’aujourd’hui.
Il faudra surtout s’intéresser aux pertes financières occasionnées durant toute cette période, jamais enregistrées dans les anales des grèves dans les entreprises publiques ou privées en Algérie.
Les pertes sont, en effet, estimées à 130 millions de dinars. «Il faut dire qu’il y a un énorme manque à gagner. On estime à 130 millions de dinars le chiffre», nous a déclaré hier, Ali Aired, propriétaire de la laiterie Tassili, joint par nos soins. Notre interlocuteur s’appuie sur les évaluations et les rentabilités de la laiterie depuis qu’il est devenu le propriétaire, à la faveur de la privatisation de plusieurs entreprises publiques décidée par le gouvernement.
En d’autres termes, et parlant du chiffre d’affaires de l’entreprise, M. Aired explique que ce dernier est estimé à 10 millions DA chaque jour (1 million de dinars), en incluant bien évidement toutes les charges de la production. La grève, au-delà de son caractère qui, faut-il le souligner, n’a pas été en droite ligne de réclamer une quelconque réévaluation salariale ou amélioration des conditions socioprofessionnelles, a fait plusieurs victimes,
à commencer par les travailleurs eux-mêmes. A en croire les dires de M. Aired, il est fort probable que ces derniers ne seront pas payés pour la période de grève qu’ils ont observée. «Avec les pertes que je viens de citer, je ne souhaiterai pas parler des salaires des travailleurs pour les cinq mois de débrayage», dit-il. Pis encore, les cotisations des grévistes à la sécurité sociale, les indemnités, les primes… ce sont toutes des pertes qu’il faudra prendre en considération, estime-t-il.
Les autres victimes de la grève…
Mis à part les pertes occasionnées à l’usine et ses travailleurs, d’autres victimes ne sont pas, cependant, en reste, bien qu’elles ne fassent pas partie intégrante de l’usine.
Pour ce qui est des éleveurs, M. Aired fera savoir que ces derniers, estimés à 1700, ont été pris en charge malgré la grève. «Ils continuaient à nous livrer du lait qu’on a, malheureusement, distribué par la suite à d’autres concurrents. Il fallait le faire pour ne pas les pénaliser», explique-t-il.
Et d’affirmer : «Ils ont été payés normalement. S’agissant des distributeurs, leur manque à gagner est minime par rapport aux autres. Ce sont des distributeurs agréés qui travaillent à leurs comptes.» A ces deux catégories de travailleurs touchées par la grève s’ajoute le grand perdant dans l’affaire.
Il s’agit du simple citoyen. La population de la wilaya de Tizi Ouzou a vécu une anarchie sans précédent surtout aux premiers jours de la grève. A préciser qu’une commission d’enquête, diligentée d’Alger et composée des départements ministériels de l’agriculture et de l’industrie, en plus des représentants du groupe Giplait,
est attendue aujourd’hui au niveau de la laiterie. «Elle aura à statuer sur la poudre périmée se trouvant à l’intérieur de l’usine», nous a fait savoir un représentant du collectif des travailleurs. «Nous n’avons rien à cacher et nous n’avons pas peur de cette commission, car nous travaillons toujours dans la transparence la plus absolue.
Des rapports annuels et trimestriels sont présentés aux responsables concernés comme stipulé dans le cahier des charges», indique M. Aired, de son coté, sur le même sujet.
Aïssa Moussi