Comment les représentants de Nokia Algérie ont mis en place une grosse fraude sur les téléphones portables

Comment les représentants de Nokia Algérie ont mis en place une grosse fraude sur les téléphones portables

La contrefaçon alimente le secteur informel en Algérie. Et personne ne sait par quelle voie ces marchandises, généralement d’origine asiatique, arrivent-elles sur le marché national.

Aujourd’hui, on a une première idée. L’affaire de l’importation frauduleuse des téléphones portables de marque Nokia permet de percer le mystère. Des importateurs sont même prêts à s’allier avec le diable pour s’enrichir davantage.

L’affaire du représentant officiel de Nokia en Algérie, Raya, est digne des grands scénarios des filmes sur la mafia italienne.

Pendant plusieurs années, les responsables de Raya et ceux de Nokia Algérie importaient des appareils de téléphonie portable en présentant au service des douanes de faux documents : falsification des agréments de l’Autorité de régulation (ARPT). Leur trafic n’a été découvert qu’au début de l’année 2010. Les mis en cause sont les poids lourds de Nokia Algérie, à leur tête son directeur général et plusieurs cadres de la société. Ils sont actuellement en détention provisoire. Comment ont-ils été démasqués? Pourquoi ont-ils osé recourir à la fraude?

Comment précèdent-ils?

Vigilance d’un douanier

Le pot aux roses a été découvert en juillet dernier par un douanier à l’Aéroport international d’Alger, Houari Boumediene. En procédant à la vérification des autorisations délivrées par l’ARPT à la société Raya pour l’importation de téléphones mobiles, ce contrôleur des opérations commerciales au niveau de l’aéroport met à jour une fraude colossale. Il alerte aussitôt les officiers de la police judiciaire du Département de renseignement et de sécurité (DRS).

Les vérifications dévoilent l’existence de nombreuses fausses autorisations scannées. Objectif : réduire les droits et les taxes douaniers. Le stratagème aura duré au moins quatre ans. Les investigations des enquêteurs du DRS découvrent également une grande opération de mise sur le marché de produits contrefaits ne répondant guère aux normes en vigueur.

C’est que les responsables de Nokia Algérie, installée dans le pays depuis 2005, ne détenant pas les agréments de l’ARPT qui leur permettraient de procéder à l’importation de portables, ils scannaient tout simplement ces documents.

Ni vu, ni connu. Les enquêteurs constatent que la compagnie a importé plusieurs lots de téléphones portables, en utilisant des documents falsifiés, découverts grâce à la vérification de tous les dossiers. Les importations frauduleuses de téléphones seraient de l’ordre de 50 000 unités.

Selon Regue Benamar, directeur central du contrôle à posteriori à la direction générale des douanes (DGD), cité par le quotidien El Watan, le préjudice subi par le trésor public concernant le volet de la société Raya est de 184 milliards de centimes (24,5 millions de dollars).

«La société a payé cash la somme de 34 milliards de centimes, mais a refusé de s’acquitter du reste du montant, arguant qu’elle n’en était pas responsable. La justice a été saisie et c’est à elle de trancher…», explique Regue au quotidien.

Un ressortissant Égyptien parmi les accusés

Au terme de l’enquête policière, les prévenus sont présentés devant le parquet au tribunal d’Hussein Dey. Première décision : trois personnes, dont le patron de Raya, le directeur général de Nokia et un ressortissant égyptien sont mis sous mandat de dépôt.

Ils sont incarcérés à la prison d’El Harrach, à Alger. Six autres prévenus sont placés sous contrôle judiciaire, dont des actionnaires de Raya et des représentants d’autres sociétés privées. Une décision qui a fait l’objet d’un appel auprès de la chambre d’accusation près la cour d’Alger; l’un introduit par le parquet général et l’autre par les mis en cause.

Finalement, ces derniers sont déboutés de leur demande. Un mandat de dépôt est décidé à leur encontre, ce qui les met en situation de recherche par les services de sécurité. Mais d’autres interrogations s’imposent. Les responsables de Nokia ont-ils agi en solo? Ont-ils bénéficié d’une complicité des douaniers? L’enquête promet des rebondissements…