Comment le port sec de Xi’an révolutionne le commerce eurasiatique

Comment le port sec de Xi’an révolutionne le commerce eurasiatique
Port sec de Xi’an (Chine)

Xi’an, célèbre pour son armée de terre cuite et son passé impérial, s’est imposée comme un pivot logistique majeur de la Chine moderne grâce à son port sec, une plaque tournante stratégique des Nouvelles Routes de la Soie.

Inauguré en 2008 et pleinement opérationnel depuis 2018, ce hub multimodal relie les ports maritimes chinois (comme Shanghai ou Tianjin) à l’Eurasie via le China Railway Express (CRE), réduisant ainsi les temps de transit et désengorgeant les infrastructures côtières.

Avec 40 % de ses cargaisons en provenance du Kazakhstan et 30 % des conteneurs acheminés vers l’UE transitant par ses installations, Xi’an incarne l’ambition chinoise de rééquilibrer son économie vers l’intérieur des terres, conformément à la politique « Go West ».

Le port sec, intégré à une zone de libre-échange depuis 2017, combine rail, route et services douaniers avancés, attirant des investissements industriels (aéronautique, électronique) et stimulant le PIB régional.

Cet article explore, en s’appuyant sur des données factuelles, comment Xi’an, grâce à son port sec, révolutionne les échanges eurasiatiques, tout en relevant des défis logistiques et concurrentiels.

Port sec de Xi’an : un hub logistique au service de la mondialisation chinoise

Au cœur de la stratégie chinoise des Nouvelles Routes de la Soie, le port sec de Xi’an s’impose comme une infrastructure clé pour fluidifier les échanges entre la Chine et l’Eurasie. Véritable plateforme multimodale, il combine transport ferroviaire, routier et services logistiques avancés, permettant de désengorger les ports maritimes saturés de Shanghai, Ningbo ou Tianjin.

Le port sec de Xi’an est directement connecté au China Railway Express (CRE), le réseau ferroviaire qui relie la Chine à l’Europe en 12 à 18 jours, contre 30 à 40 jours par voie maritime. En 2023, plus de 4 000 trains ont transité par Xi’an, transportant des produits électroniques, des pièces automobiles et des équipements industriels vers des villes comme Hambourg, Duisbourg et Madrid. La ville représente aujourd’hui près de 30 % du trafic total du CRE, faisant d’elle le principal point de départ des marchandises chinoises vers l’Ouest.

Aire de stockage des automobiles dans le port sec de Xi'an

Aire de stockage des automobiles dans le port sec de Xi’an.

Le terminal à conteneurs du port sec, géré par CR Intermodal, est l’un des plus automatisés de Chine, avec des systèmes de tri robotisés et une gestion numérique des flux. Une zone franche douanière intégrée permet un dédouanement accéléré, réduisant les délais de transit. Par ailleurs, Xi’an bénéficie d’une connexion directe avec le port de Qinzhou, dans le sud, offrant une alternative logistique aux entreprises cherchant à éviter les goulots d’étranglement des ports de l’Est.

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Intégré à la Zone pilote de libre-échange du Shaanxi (2017), le port sec attire des investisseurs étrangers grâce à des avantages fiscaux et des procédures administratives simplifiées. Des entreprises comme Samsung, BYD et Huawei y ont implanté des centres de distribution, renforçant son statut de hub industriel. Avec un volume d’échanges dépassant 1,5 million de conteneurs EVP en 2023, Xi’an confirme son statut de plaque tournante incontournable de la mondialisation chinoise.

Un moteur économique pour le Shaanxi et l’Ouest chinois

Le port sec de Xi’an ne se contente pas d’être un simple nœud logistique – il agit comme un véritable catalyseur de développement pour toute la région du Shaanxi et plus largement pour l’Ouest chinois. Dans le cadre de la politique nationale « Développer l’Ouest » (西部大开发), cette infrastructure joue un rôle clé dans le rééquilibrage économique du pays.

Alors que les régions côtières ont longtemps dominé l’économie chinoise, Xi’an et son port sec incarnent la volonté de Pékin de réduire les disparités régionales. Depuis 2018, le gouvernement central a injecté plus de 50 milliards de yuans (environ 6,5 milliards d’euros) dans les infrastructures connexes du port. Cette stratégie porte ses fruits : la croissance du PIB du Shaanxi a dépassé la moyenne nationale en 2022 et 2023, avec respectivement +5,4% et +5,8%.

Terminal conteneurisé du port sec de Xi’an.

Vue du terminal conteneurisé du port sec de Xi’an.

L’impact sur l’emploi est particulièrement notable. Le complexe portuaire et les zones industrielles adjacentes génèrent directement plus de 120 000 emplois, tandis que les effets induits sur l’économie locale créent près de 300 000 postes supplémentaires.

Autour du port sec s’est développée une véritable « ville portuaire » de 38 km², abritant : une zone de libre-échange (opérationnelle depuis 2020), un centre de R&D pour la logistique intelligente, des plateformes e-commerce transfrontalières et des centres de distribution régionaux pour les grands groupes internationaux.

Enfin, cette dynamique attire chaque année des centaines d’entreprises, avec des investissements étrangers directs ayant atteint 2,3 milliards de dollars en 2023. Des géants comme Amazon et DHL y ont établi leurs centres de distribution pour l’Asie centrale.

Défis et innovations face aux risques logistiques

Le port sec de Xi’an, bien qu’essentiel au commerce eurasiatique, doit composer avec des défis croissants : congestion des infrastructures, pression environnementale et concurrence accrue des ports secs rivaux comme Zhengzhou et Chongqing. Pour maintenir son avantage compétitif, il mise sur une modernisation technologique ambitieuse et une transition écologique inédite.

Une large artère routière permet de rejoindre le port sec de Xi’an.

La digitalisation constitue l’un des principaux leviers d’optimisation. Depuis 2022, un système de « jumeau numérique », piloté par intelligence artificielle, permet de simuler et d’ajuster les flux logistiques en temps réel, réduisant de 18 % les délais de traitement. Parallèlement, la blockchain a été intégrée aux procédures douanières, divisant par trois leur durée. Ces innovations s’accompagnent d’une automatisation poussée : près de 60 % des opérations de manutention sont désormais assurées par des robots autonomes alimentés à l’énergie solaire.

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Sur le plan environnemental, le port s’est engagé dans une transformation verte. Toits photovoltaïques, camions à hydrogène et recyclage des eaux pluviales font partie des mesures déployées pour réduire son empreinte carbone, aujourd’hui responsable de 12 % des émissions de Xi’an. Ces efforts s’inscrivent dans une stratégie plus large d’intégration régionale, avec notamment un projet d’extension du terminal frigorifique et la création prochaine d’un hub aéroportuaire complémentaire.

Selon les experts du MIT et les rapports du ministère chinois des Transports (2023), ces adaptations pourraient faire de Xi’an un modèle de « smart port » durable, capable de concilier croissance logistique et respect des engagements climatiques.