Combat de béliers, Russy l’Algérien défie ses rivaux maghrébins

Combat de béliers, Russy l’Algérien défie ses rivaux maghrébins

Une belle bête, ne peut-on s’empêcher de penser à la vue de la stature imposante de Russy, un bélier de combat à fière allure, qui porte ses longues cornes enroulées comme une couronne royale.

Pour cause, Russy est un champion, un roi de l’arène. Pas seulement à Bejaïa où il trône depuis longtemps déjà sans rival, mais dans toute l’Algérie où il suscite la crainte de tous les adversaires potentiels, affirme Hakim Bouraba qui parle de son animal avec une passion qui illumine son regard.

Une passion qu’il partage, avec le reste de la famille, depuis plus d’une vingtaine d’années. Car, avant Russy, il y a eu d’autres béliers qui portent les noms de Chance, Soudani et Boukmama. Russy a été acheté en 2010 pour être sacrifié durant l’Aïd El Adha. Mais la famille a succombé à son altière beauté.

Un gladiateur né

Essayé au combat, il s’est révélé un véritable gladiateur. Depuis, il règne sans partage sur tous les terrains de combat, grâce à ses qualités naturelles, mais également à une alimentation étudiée, un suivi vétérinaire régulier pour lui prodiguer tous les soins afin de le garder en bonne santé, et un entraînement de performance, fait surtout de marche d’une dizaine de kilomètres sur des parcours variés (terrains sablonneux, pentus, etc.) pour lui insuffler la nécessaire résistance lors des compétitions.

A Bejaïa, posséder un bélier de combat est une tradition et les Béjaouis sont connus pour cela autant que pour d’autres passions, comme la musique chaâbi ou l’élevage de chardonnerets, « les meilleurs d’Algérie », assure notre jeune interlocuteur, plus versé dans le sport, toutefois. Et Russy l’emplit de bonheur pour les dix victoires qu’il a déjà remportées, et tant sa certitude est grande qu’il est capable de battre aussi les champions d’autres pays. « Le 3 janvier dernier, il y a eu un tournoi à Guelma. Un défi a été lancé au champion local, mais également à ceux d’Alger, de Constantine, de Jijel… Aucun n’a eu le courage de le relever. Ils ont trop peur d’affronter Russy.

C’est un bélier de nature très calme, mais sur le terrain des combats, il ne supporte aucun rival, il est imbattable. Russy a gagné tous ses duels sans aucune égratignure. Aujourd’hui, notre objectif et de lui faire affronter le champion de Tunisie. » Dans ce pays voisin, nous apprend Hakim, il y a actuellement deux prétendants au titre, Bébé et El Bank (une transcription approximative), qui vont être départagés lors d’un prochain choc.

Le vainqueur sera l’adversaire de Russy. La joute devrait se dérouler à Annaba. « Nous voulons que ce soit à Annaba parce qu’il est plus facile administrativement pour les Tunisiens de venir en Algérie que pour nous d’aller en Tunisie », explique Hakim qui ajoute que Russy a déjà battu en 2012 un challenger tunisien. « Nous voulons affirmer le nom de l’Algérie sur le plan international.

La devise chez la famille Moune Ali, c’est one two three, viva l’Algérie, viva Russy ! » En attendant, un tournoi est prévu pour le 31 janvier à Bejaïa, qui verra la participation des champions de plusieurs wilayas. Ce sera une grande fiesta, assure Hakim qui ne doute pas des chances de son bélier. « Celui qui prétend posséder une bête capable de tenir tête à Russy n’a qu’à se présenter », lance-t-il, en précisant que Russy n’affrontera que des béliers qui ont au moins autant de victoires à leur actif que lui. C’est la règle en cours.

Un public d’amateurs toujours plus nombreux

Comment se connaissent les propriétaires de béliers de combat ? Comment circule l’information pour l’organisation de ces tournois ? Il n’y a ni association ni ligue des amateurs de combats de béliers, pourtant. Rien de plus simple : le bouche à oreille fonctionne toujours à merveille et, pour davantage d’efficacité, la technologie est mise à contribution à travers les réseaux sociaux sur Internet. Les autorisations administratives pour l’organisation de telles joutes ?

Les promoteurs s’en passent allégrement en faisant jouer leurs réseaux afin d’obtenir un endroit pour abriter ces duels qui attirent, d’ailleurs, un public d’amateurs de plus en plus nombreux. « Nous n’avons jamais eu de problème avec les autorités. Tout se passe dans le calme et la bonne humeur, car nous faisons en sorte de bien organiser ces compétitions », assure notre interlocuteur.

Hakim se défend de s’adonner à sa passion pour des considérations pécuniaires. « Il n’y a pas d’argent en jeu. Il n’y a pas de paris, à ma connaissance. Les combats de béliers, c’est pour le fun, pour le plaisir de décrocher le titre de champion. On nous a offert de très grosses sommes pour Russy, mais l’argent ne nous intéresse pas. On ne le vendra jamais, parce qu’on l’aime trop. Quand il aura remporté son ultime titre de champion, il aura droit au repos du guerrier. Je lui achèterai une brebis et il prendra une retraite dorée ! »

Ouali M.