La France refuse toujours d’assumer son passé colonial
Un demi-siècle après l’Indépendance, la France ne veut toujours pas reconnaître la Révolution algérienne et tous les crimes qu’elle a commis depuis 1830.
Cinquante années après le recouvrement de l’indépendance par notre pays, la France refuse toujours d’assumer son passé colonial, préférant parler de guerre d’Algérie plutôt que de luttes armées menées par les Algériens depuis 1830. Premier à prendre la parole lors de la conférence-débat organisée le lundi 16 avril par le Centre de recherche stratégique et sécuritaire, le colonel à la retraite, Noureddine Amrani s’en est pris violemment à la France qu’il accuse d’avoir falsifié l’histoire en occultant toutes les batailles et luttes armées engagées par notre peuple avant 1954. Tout en rappelant le contexte très spécial dans lequel intervient cette rencontre débat, l’orateur récuse l’appellation guerre d’Algérie qui, souligne-t-il, est une guerre au nom tabou. Selon lui, il n’y a pas eu de déclaration de guerre, ni signature de traité» Assimilant l’intervention française en Algérie en 1830 à une agression, Noureddine Amrani considère que le vocable guerre d’Algérie devait être défini dans sa nature, circonscrit et concis, de même que ses objectifs et les belligérants. Or les rédacteurs des deux lois relatives à la guerre d’Algérie, la première parue sous Valéry Giscard d’Estaing, la seconde durant le mandat de Jacques Chirac ont détourné à leur profit cette lutte armée et cette révolution, en parlant d’abord d’opérations et d’évènements avant de lever un pan du voile en parlant pour la première fois de guerre d’Algérie. A l’opposé, les Algériens et plus précisément les architectes de la Déclaration du 1er Novembre 1954 ont été plus discrets et plus clairs en optant pour la lutte armée, seul et unique moyen pour arracher l’indépendance et chasser la France coloniale. Dans son intervention, le colonel à la retraite est revenu sur cette période noire où les Algériens étaient considérés comme des indigènes, c’est-à-dire des sujets et des esclaves au service des colons. «La lutte armée a commencé dès les premiers moments de la colonisation, mais les Algériens qui n’ont jamais fermé la porte du dialogue, ont refusé la spoliation et la confiscation de leurs terres. Le Code de l’indigène leur a fait beaucoup de mal parce qu’ils n’étaient pas considérés comme des citoyens à part entière», a-t-il précisé. Et d’ajouter: «2 millions de paysans avaient été déplacés et des centaines de villages rasés». Profitant de la présence des juifs installés en Algérie, David Ben Gourion avait sollicité du général De Gaulle une partie du sud algérien. Selon Noureddine Amrani, «le général avait trouvé l’idée bonne, mais il était contre la partition de l’Algérie». Il estime néanmoins que «la position de la France demeure ambiguë jusqu’à ce jour» Pour elle, reconnaître la lutte armée et la révolution, en un mot la guerre que lui avaient livrée les Algériens, reviendrait à reconnaître l’Etat algérien et son existence à l’époque où a commencé l’agression.
Lui emboîtant le pas, M.Makhlouf, ancien moudjahid, tout en insistant à son tour, sur «l’ambiguïté» des relations entre la France et l’Algérie, a indiqué que le coup d’éventail n’était qu’un prétexte pour envahir et occuper l’Algérie parce que «l’accord de reddition du Dey ne concernait que la capitale, mais cela n’avait pas empêché la France d’occuper toute l’Algérie». Ancien diplomate, aujourd’hui à la retraite, Hocine Maghlaoui est persuadé lui, que c’est pour ne pas reconnaître l’Etat algérien que la France a accepté de traiter avec le FLN et non pas avec le Gpra lors des Accords d’Evian. Roland Berkouk, directeur du Crss, a mis en garde, pour sa part, contre certains écrits et ouvrages dont les contenus ne reflètent pas la réalité et risquent d’induire en erreur les Algériens, les jeunes particulièrement qui connaissent mal l’histoire de leur pays.