La marche d’aujourd’hui à Alger, à partir de la Place des Martyrs, à laquelle a appelé «une aille» de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (Cncd) aura-t-elle lieu? Au lendemain de la levée de l’état d’urgence, le ministre de l’Intérieur, Daho Ould Kablia, a tranché la question.
Outre qu’il a affirmé qu’aucune demande d’autorisation n’a été déposée auprès des services de la wilaya d’Alger, le ministre de l’Intérieur est catégorique : «Les marches à Alger sont interdites» Les initiateurs de la marche qui devrait s’ébranler de la Place des Martyrs misent sur la mobilisation citoyenne pour réussir leur action.
Un pari qui paraît difficile à réaliser d’autant que la Cncd s’est scindée en deux : une aille regroupant les partis politiques (RCD et PLD, les étudiants et, Me Ali Yahia Abdenour) et celle composée par les syndicats autonomes, soient le Comité national pour la défense des droits des chômeurs et la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (Laddh). La division de la Cncd en deux ne fera qu’affaiblir son action.
Joint hier par téléphone, Fodil Boumala, un des fondateurs de la Cncd, a estimé que «cette division» ne travaille guère le mouvement.Toutefois, il a refusé de s’inscrire dans la logique de confrontation des deux groupes.
En confirmant sa participation à la marche d’aujourd’hui, Fodil Boumala a refusé que sa présence à la Place des martyrs soit interprétée comme étant un divorce avec l’autre aille de la Cncd. Il a déclaré avoir tout fait pour fédérer les rangs de la Cncd et convaincre les uns et les autres de l’impératif d’un consensus afin de sauver la Coordination de l’effritement avant de démissionner officiellement des rangs de la Cncd.
Cependant, s’il admit que la division des rangs de la Cncd affaiblira son action, il refuse de l’assimiler à l’essoufflement du mouvement. Tant les revendications des initiateurs s’inscrivent dans l’esprit de la Cncd, sa présence à leur côté ne se pose même pas comme question, a-t-il ajouté, préférant défendre une grande cause avec l’ensemble des compatriotes plus que de camper sur sa position qui peut créer un effet boomerang.
Selon lui, l’important ce n’est pas l’existence de deux tendances de la Cncd mais de voir ce que peut faire chacune d’entre elle. Considérant la gravité de la situation du pays et respectant les volontés de l’ensemble des membres des deux Coordinations, il les invite fraternellement à faire de cette «scission» une plusvalue de diversité qui sera actionnée dans le seul sens du changement et de la démocratie et non un renforcement du pouvoir par l’éclatement et l’éloignement de notre but commun.
De son côté, Samir Laârabi, porteparole du Comité national pour la défense des droits des chômeurs (Cnddc), néanmoins membre de la Cncd, a refusé de participer à la marche d’aujourd’hui.
Il a motivé sa décision par la non-prise en charge des revendications des chômeurs par les initiateurs de cette manifestation. Le porte-parole du Cnddc est également contre le principe d’organisation de marches cycliques à Alger. Il a estimé qu’il faut d’abord mobiliser au niveau local à travers l’organisation de conférences et des marches susceptibles de drainer toute les corporations et l’organisation d’une marche à Alger doit être l’aboutissement de toutes ces actions au niveau locale.
Toutefois, Samir Laârabi a condamné toute forme de répression à l’égard des contestataires et contre toute récupération publique le la protesta. «Marcher à Alger reste un droit inaliénable pour tous les citoyens quel le que soit leur appartenance politique» a-t-il conclu. Avec ces nouvelles données, la mobilisation pour la marche d’aujourd’hui sera de mise et ses initiateurs devront certainement en tirer les enseignements et se pencher sur les autres formes de contestation.
DES MEETINGS ET CONFÉRENCES À TRAVERS LE PAYS
L’autre aile de la Cncd, regroupant la Laddh, la Cnddc et des syndicats autonomes, a tenu une réunion, hier, à l’issue de laquelle ses membres ont arrêté un certains nombre d’actions. Son porte parole, Aïssa Rahmoune, parle de changement de stratégie. À partir des jours à venir, la Cncd compte organiser une série de conférences et meetings au niveau national, y compris Alger, autour de la situation socioéconomique du pays, a indiqué Rahmoune Aïssa. La Cncd a ensuite appelé à une marche dans la Capitale, at- il ajouté.
À travers ces actions, la Cncd compte mettre les pouvoirs publics devant le fait accompli. «Le fait de lever l’état d’urgence et de maintenir de l’interdiction des marches à Alger constitue une contradiction kafkaïenne». À noter que le Rassemblement action jeunesse (RAJ) vient d’intégrer cette tendance de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie.
Hacène Nait Amara