Classement mondial 2017 de la liberté de la presse: l’Algérie recule de cinq places

Classement mondial 2017 de la liberté de la presse: l’Algérie recule de cinq places

“Le classement mondial de la liberté de la presse 2017 démontre la persistance de l’hostilité des dirigeants des pays du Maghreb, lorsque des sujets d’intérêt général tels que la corruption, la fraude fiscale ou les lobbies d’influence sont abordés par les journalistes”, écrit RSF

Les années se suivent et se ressemblent pour la liberté de la presse en Algérie. En l’espace de quelques années, l’Algérie a perdu pas moins de quinze places dans le classement annuel de Reporters sans frontières (RSF). Cette année encore, elle perd cinq places passant du 129e rang au 134e rang. Et pour une fois, elle arrive derrière le Maroc classé, lui, à la 133e place et loin derrière la Tunisie (97e), l’un des meilleurs élèves du Maghreb avec la Mauritanie.

Comme il fallait s’y attendre, la mort en prison du journaliste-blogueur, Mohamed Tamalt, en décembre dernier, poursuivi pour ses écrits sur les réseaux sociaux jugés offensants à l’égard du chef de l’État, un décès qui a suscité l’indignation, ou encore l’emprisonnement de certains activistes, à l’image de Slimane Bouhafs, et l’annulation de la transaction, au terme d’une rocambolesque péripétie judiciaire, entre El Khabar et le groupe Cevital constituent, aux yeux de l’ONG, les marqueurs de la dégradation de la liberté de la presse en Algérie. “La liberté de la presse s’est fortement érodée dans le pays. Les sujets tabous – santé du chef de l’État, avoirs des dirigeants algériens, corruption… – restent nombreux et l’étranglement économique des titres indépendants se poursuit (…)”, indique le rapport de RSF pour l’Afrique du Nord rendu public hier à Tunis. “L’année 2016 a été particulièrement difficile pour la presse algérienne qui a dû faire face à la mort en détention de Mohamed Tamalt, emprisonné pour des informations postées sur son journal en ligne. La détention de deux professionnels des médias et d’un blogueur ainsi que l’annulation par les autorités algériennes du rachat du journal arabophone El Khabar ont contribué à donner le ton cette année sur la volonté de museler la presse, lit-on. Si le Maroc est épinglé pour son “agressivité” envers les journalistes, notamment occidentaux et son attitude au Sahara occidental où le nombre d’exactions “commises contre les journalistes sahraouis non-professionnels reste quant à lui élevé dans une zone impossible à couvrir pour les journalistes marocains”, la Tunisie, en revanche, “continue néanmoins de souffrir d’un climat défavorable à la consolidation d’une presse libre en raison de la persistance de l’autocensure et des conflits d’intérêts au sein des médias”, selon RSF.

Quant à la Libye, le chaos y régnant ouvre la porte aux exactions à l’égard des professionnels des médias. “Six ans après les Printemps arabes, le classement mondial de la liberté de la presse 2017 démontre la persistance de l’hostilité des dirigeants des pays du Maghreb, lorsque des sujets d’intérêt général tels que la corruption, la fraude fiscale ou les lobbies d’influence sont abordés par les journalistes”, écrit RSF qui évoque des “lignes rouges” fixées aux médias. “En Afrique du Nord, il est malheureux de constater que les responsables politiques préfèrent tolérer les journalistes qui font la part belle au commentaire et à la communication institutionnelle plutôt qu’à ceux qui refusent le jeu des compromis. Aujourd’hui plus que jamais, il est essentiel de continuer de lutter pour une information indépendante, plurielle et libre dans la région”, a affirmé Yasmine Kacha, directrice du bureau Afrique du Nord de RSF. Plus globalement, RSF relève que la liberté de la presse s’obscurcit de plus en plus dans le monde et se fragilise dans les démocraties. “La publication de l’édition 2017 du classement mondial de la liberté de la presse par Reporters sans frontières (RSF) révèle que les violations de la liberté d’informer sont de moins en moins l’apanage des seuls régimes autoritaires et des dictatures. En démocratie aussi, cette liberté a priori acquise s’avère de plus en plus fragile. À force de propos nauséabonds, de lois liberticides, de conflits d’intérêts et même de coups de matraque, les régimes démocratiques multiplient les accrocs contre une liberté qui est en principe l’un des principaux indicateurs de leur bon fonctionnement”, note l’ONG. Comme souvent, ce sont les pays scandinaves, à leur tête la Norvège, qui arrivent en tête du classement de RSF alors que la Corée du Nord ferme la marche.