Le bilan effrayant des accidents de la circulation n’est pas dû uniquement à une méconnaissance du code de la route ou à des facteurs techniques. Il traduit une réalité sociologue où seul le plus fort a droit de cité. Sur la route comme partout dans le pays, c’est sans pitié !
La route algérienne, au premier semestre 2012, a connu davantage d’accidents que l’an dernier, à la même période. Selon un décompte des services de la Gendarmerie nationale, 12.407 cas ont été enregistrés durant le premier semestre de l’année en cours contre 11.119 accidents durant les 6 premiers mois de 2011. En plus d’une hausse de 1.288 accidents, la même source précise que les dégâts et dommages enregistrés ont fait 1.659 morts et 21.363 blessés.
Elle avertit également que si des mesures plus radicales de sensibilisation et de répression ne sont pas prises, l’été risque d’être des plus meurtriers d’autant que les chiffres du mois de juin 2012 font ressortir, par rapport à ceux de juin 2011, une augmentation des nombres d’accidents (+ 611), de morts (+ 92) et de blessés (+906) ; et que le ramadhan, séquence propice à tous les excès pour les usagers de la route, est déjà à nos portes.
Au palmarès des causes des accidents, l’excès de vitesse, les dépassements dangereux, le non respect de sécurité et du code de la route, la négligence et l’état des routes et des véhicules.
Mais il est une autre raison que peu d’experts en accidentologie évoquent: il s’agit de la sociologie des chauffards algériens. Selon le sociologue algérien, Safar Zitoun, interrogé vendredi par la Chaîne III de la radio nationale, la route algérienne et son cortège de comportements déviants ne sont, ni plus ni moins, qu’un indicateur de la sociologie du pays.
La circulation routière et son théâtre de violences et d’incivilité traduisent, selon lui, la manière dont les relations sociales s’organisent dans le pays. C’est-à-dire avec violence et selon le principe que celui qui passe en premier rafle la mise… En utilisant une formule choc, «les Algériens conduisent comme ils se conduisent », le sociologue Safar Zitoun rappelle certaines scènes, malheureusement fréquentes, de cortèges nuptiaux convertis en rallyes et en numéros de cascadeurs.
Il affirme, par cet exemple, que l’usage dangereux et pour le moins délinquant de la route, par un nombre de plus en plus important d’automobilistes, révèle la nature des rapports de force et leur caractère impitoyable au sein de la société: «chacun veut négocier son statut par rapport aux autres en position de force et sans penser à autrui avec une très grosse dose d’individualité », dit-il.
On circule sur la route, explique-t-il, de la même manière qu’on ne respecte pas la file d’attente devant un guichet de la poste ou d’une banque…..» Faut-il pour autant, dans les études sur les accidents, minimiser les facteurs tels que l’état des routes, la qualité des véhicules, une dévalorisation du permis de conduire soumis à tous les trafics ou la méconnaissance du code de la route ?
Certainement, non. Mais, pour éviter que le contingent de victimes de la route soit chaque année, plus nombreux, le sociologue laisse entendre qu’en plus des instruments de sensibilisation et de répression classiques, il faudrait peut-être, de nouvelles grilles pour saisir le sens des débordements hystériques et homicides de l’automobiliste algérien.
La DGSN qui ne s’est pas trompée, dépêche désormais dans le cadre d’une opération pilote, des psychologues pour assister les agents de la sécurité routière. Ces thérapeutes, apprend-on, interviennent également à titre préventif.