Les prix du pétrole ont enregistré leur troisième baisse consécutive (vendredi 19 septembre 2025), reflet d’un marché pris en étau entre un ralentissement économique immédiat et des tensions structurelles à moyen terme. Alors que les perspectives à court terme pèsent sur les cours, les fondamentaux de l’industrie pétrolière laissent entrevoir un scénario inverse à moyen terme, voire un retour possible à un baril à 100 dollars.
Un repli conjoncturel porté par les doutes sur la demande mondiale
Les cours du brut ont fléchi vendredi pour la troisième séance d’affilée. Le baril de Brent pour livraison en novembre a reculé de 0,19 % à 67,31 dollars, tandis que le WTI pour livraison en octobre a cédé 0,31 % à 63,37 dollars, selon les données en temps réel.
Cette baisse intervient malgré la première réduction de taux de la Réserve fédérale américaine en 2025, qui visait à soutenir la consommation. Le marché semble davantage préoccupé par les signes persistants de ralentissement économique aux États-Unis, premier consommateur mondial de pétrole.
Dans ce contexte, les stocks de distillats ont bondi de 4 millions de barils, bien au-delà des prévisions, alimentant les craintes d’un excédent d’offre à court terme. Les signaux envoyés par l’OPEP+, qui maintient une production soutenue, ainsi que les mesures prises par la Russie pour stabiliser son budget énergétique, ajoutent à cette perception d’un marché bien approvisionné.
Pour Priyanka Sachdeva, analyste chez Phillip Nova, « le marché est tiraillé entre des perspectives de croissance molle et des espoirs de reprise liés à la baisse des taux. Mais pour l’instant, la prudence domine ».
Une tension latente : le déclin structurel des gisements
Au-delà de ces mouvements conjoncturels, des signaux plus profonds laissent entrevoir un risque de déséquilibre structurel entre l’offre et la demande dans les années à venir. Un récent rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) met en lumière un phénomène préoccupant : la production mondiale issue des gisements existants est en déclin naturel constant.
Selon l’AIE, sans investissements massifs, le monde pourrait perdre jusqu’à 5,5 millions de barils par jour, soit l’équivalent de la production combinée de la Norvège et du Brésil. « L’industrie pétrolière doit courir beaucoup plus vite juste pour rester sur place », a résumé Fatih Birol, directeur exécutif de l’AIE.
En clair, les 500 milliards de dollars investis chaque année dans le secteur suffisent à peine à compenser l’érosion naturelle des champs pétroliers, sans pour autant permettre de répondre à une éventuelle hausse de la demande.
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Cette situation est d’autant plus critique que la demande reste soutenue en Asie, notamment en Chine et en Inde. Et si certains super-gisements du Moyen-Orient connaissent un déclin modéré (2 % par an), les gisements offshore européens chutent de 15 %, et le pétrole de schiste perd jusqu’à 35 % de sa production dès la première année.
Une équation instable : volatilité à court terme, envolée possible à moyen terme
Face à cette dualité, le marché pétrolier évolue dans une zone d’incertitude. À court terme, la faiblesse de la demande et les signes de surstockage pèsent sur les prix. Mais à moyen terme, les risques d’insuffisance d’offre se multiplient, faisant ressurgir la perspective d’un retour vers un seuil historique.
Les déclarations récentes du président américain Donald Trump, affirmant privilégier des prix bas du pétrole à de nouvelles sanctions contre la Russie, ont momentanément apaisé les craintes de perturbations d’approvisionnement. Mais elles ne répondent pas à la problématique de fond : une industrie contrainte de compenser une chute naturelle des volumes, avec des perspectives de croissance de la demande mondiale toujours solides.
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La baisse actuelle des prix ne doit pas masquer les faiblesses structurelles du marché pétrolier. Si les indicateurs économiques laissent craindre un ralentissement passager de la demande, les fondamentaux géologiques et financiers du secteur pétrolier montrent une industrie sous pression, confrontée à une équation difficile entre sous-investissement chronique et demande énergétique mondiale soutenue.