Chaouchi «Que Saâdane m’écarte ou me garde, mais définitivement !»

Chaouchi «Que Saâdane m’écarte ou me garde, mais définitivement !»

Faouzi Chaouchi en a gros sur le cœur et il ne se gêne pas de le dire. Le héros d’Oum Dourmane ne comprend pas cette dégringolade qui l’a fait chuter de son trône de Roi, avant d’être carrément banni de la sélection nationale. Lors du Mondial, certains joueurs nous avaient dit bien de mauvaises choses à son égard. Ils nous ont parlé d’un scandale dont il était la cause, évoquant des insultes qu’il aurait proférées dans le couloir de l’hôtel, adressés essentiellement à Rabah Saâdane et à son staff. Qu’en est-il de vrai ou de faux dans cette histoire ? Seul Chaouchi pouvait nous répondre avec la sincérité et la franchise qu’on lui connaît. Notre journaliste qui accompagne l’Entente de Sétif dans son périple africain l’a rencontré au Caire, hier, et a pu lui soutirer quelques éléments de réponse, à même de nous dévoiler une partie du mystère qui a entouré cette affaire depuis Cape Town, puis à Pretoria.

Un cri de détresse camouflé par l’affront à Saâdane

Chaouchi en est formel : «Je n’ai jamais été indiscipliné. Je n’ai jamais insulté personne, ni à l’origine d’une quelconque bagarre avec un de mes coéquipiers.» Il l’a clamé tellement fort dans sa douleur de banni qu’on avait du mal à ne pas le croire. L’étiquette de «fou» ou d’indiscipliné qui lui colle au dos depuis quelques années ne l’aide pas dans sa défense. Malheureusement. Car il est toujours difficile de convaincre ses détracteurs et les sceptiques de sa bonne foi, lorsqu’on traîne des casseroles. Mais dans son cri de détresse, camouflé tant bien que mal par cet affront qu’il fait à Rabah Saâdane, le gardien à la tignasse blonde a voulu passer un précieux message à ceux qui voudraient bien le comprendre. Même entre les lignes.

Chaouchi n’admet pas la politique de deux poids deux mesures qui règne au sein de l’EN

LG Algérie

«Je ne me suis bagarré avec aucun de mes coéquipiers. Je n’ai jamais refusé une convocation de l’Equipe

nationale», a-t-il répété maintes fois, pour tenter de nous expliquer ce qu’est l’indiscipline à ses yeux. Car il sait lui, tout comme l’ensemble des journalistes présents à Cape Town, que la veille du match contre l’Angleterre, deux joueurs s’étaient bagarrés entre eux, s’insultant devant tout le monde, sans que Saâdane les ait sanctionnés. Sans qu’on dise d’eux qu’ils ont été indisciplinés sur ce coup. Chaouchi n’admet pas cette politique de deux poids deux mesures, qui ne l’avantage pas et le freine dans son évolution. Il ne veut citer aucun nom pour le moment. Mais si on l’y poussait un peu, sans doute qu’il ne se tairait pas et qu’on entendra bien des choses qu’on a cachées au large public.

Saâdane va sans doute parler à son tour et l’abcès sera crevé !

C’est de la cuisine interne dira-t-on. Soit. Mais qu’a fait donc Chaouchi de plus grave pour mériter un tel sort ? Et surtout pourquoi avoir fait circuler ces rumeurs à son encontre, faisant de lui un fou furieux qui aurait insulté tout le monde, en apprenant qu’on l’avait écarté du onze rentrant face à l’Angleterre, puis contre les USA ? Non, cette affaire demande des éclaircissements de la part du sélectionneur national, en tant que premier responsable de l’ordre au sein de son équipe. Saâdane va sans doute parler à son tour, comme le lui demande ouvertement Chaouchi, pour dire la vérité, toute la vérité au sujet de sa mise à l’écart. C’est là que cet abcès pourrissant toutes les bouches sera crevé de manière définitive. Car il ne faut pas se leurrer, il y a encore beaucoup de non-dits dans cette Equipe nationale.

Une affaire qui rappelle celle de Chaâbane Merzekane en 1982

Comment Saâdane peut-il évincer celui qu’il considérait avant le match contre la Slovénie comme étant le numéro 1 incontesté des Verts ? Peut-on devenir aussi mauvais après seulement une boulette, dont le ballon Jabulani n’était pas totalement étranger ? Et comment peut-on se faire dépasser en un mois par Cédric, Zemmamouche et Gaouaoui, alors qu’on était encore héros incontesté, la veille du match contre les Slovènes ? Non, il y a certainement des éléments qu’on nous cache dans cette histoire qui voit Chaouchi quitter, puis revenir en sélection à la demande du public. Cela nous fait rappeler un certain Chaâbane Merzekane en 1982, lorsqu’il était indésirable au sein des Verts, avant que le peuple ne fasse une terrible pression pour qu’on le remette à sa place.

Et si demain M’bolhi venait à se blesser ou à commettre la même boulette ?

Hier encore, Gaouaoui était le roi du but algérien avant de voir Chaouchi lui ravir la vedette. Puis, par la suite, vint M’bolhi, que même Saâdane ne voulait pas, puisqu’il ne l’avait jamais vu jouer auparavant. Raïs a saisi sa chance au vol, pour le grand bien des Verts. Mais est-on sûr que M’bolhi ne se blessera pas lors des éliminatoires ou ne fera pas de bourde à son tour lors des prochains matchs ? Et si c’était le cas, donnera-t-on encore les clés du but à Gaouaoui, Zemmamouche ou Cédric en étant sûr qu’ils seront cette fois meilleurs que Faouzi Chaouchi ? Les choses vont vite à ce poste et une seule erreur peut coûter des points très précieux pour la suite du parcours des Verts.

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«Que Saâdane m’écarte ou me garde, mais définitivement !»

Comment vivez-vous votre retour au Caire, après ce qui s’est passé le 14 novembre dernier avec l’Equipe nationale ?

Hamdoullah, franchement, je ne m’attendais pas à un tel accueil des Egyptiens après toutes les tensions qu’on a vécues ici lors du match retour en équipe nationale. Cela nous change de ce qu’on avait dans la tête…

Vous êtes en plus le footballeur le plus sollicité par les Egyptiens de toute l’équipe sétifienne. On peut dire que vous êtes carrément une star en Egypte, non ?

Je vous jure que je suis très surpris par ce qui m’arrive ici en Egypte. Où que j’aille, les gens me sourient et m’appellent par mon nom, c’est comme si j’étais en Algérie. Tout le monde me reconnaît et les gens viennent vers moi pour engager la discussion et prendre une photo souvenir. C’est vraiment très agréable ce qui nous arrive ici au Caire.

Vous attendiez-vous à une telle réaction de la part des Egyptiens ?

La vérité est que je suis venu au Caire sans la moindre crainte. Je n’ai pas eu le moindre souci, contrairement à la dernière fois où on était passés par le Caire pour rallier le Zambie en aller et en retour. Je vous mentirai en vous disant que ces deux escales m’avaient rassuré. Il a fallu qu’on pose les pieds à l’aéroport du Caire pour comprendre que la tension avait baissé totalement dans les regards des gens. Ça s’est passé carrément à l’opposé de ce qu’on pouvait s’imaginer. C’est vraiment incroyable qu’on soit reçus de la sorte après tout ce qui s’est passé. Les Egyptiens nous avaient abordés Lemmouchia et moi de la meilleure manière qui soit. C’est là qu’on a senti que toute cette affaire est bien derrière. Cela m’a rassuré définitivement par la suite et c’est ce qui fait que je sois venu sans la moindre petite crainte cette fois. La preuve est devant nous, avec cet accueil.

Quelle comparaison pourriez-vous faire entre votre popularité en Algérie et celle que vous découvrez en Egypte ?

Si vous voulez en Algérie, à la limite, je trouve cela tout à fait normal, surtout après le match d’Oum Dourmane et tout ce qui s’en est suivi. Mais voir autant de monde me solliciter en Egypte, franchement, j’ai encore du mal à le croire. Mais cela prouve bien que les supporters égyptiens sont reconnaissants de la valeur sportive de Chaouchi, bien qu’elle fût une des causes qui les a privés d’aller en Coupe du monde. Sincèrement, je ne sais pas si l’inverse aurait été accepté par les Algériens. Mais bon, ce ne sont que des suppositions…

Même la presse égyptienne vous sollicite beaucoup…

C’est vrai et vous l’avez bien vu. Je n’arrête pas de passer d’un journaliste à l’autre et je peux vous assurer qu’ils sont très corrects avec moi. Ils viennent couvrir les séances d’entraînement de l’Entente et nous posent énormément de questions.

Qu’est-ce qu’ils vous demandent au juste ?

Ils veulent avoir des détails sur ma position en Equipe nationale et même sur la qualité du ballon Jabulani ! (Il sourit.)

A propos de l’Equipe nationale, vous n’avez encore rien dit de votre mise à l’écart de la nouvelle liste des joueurs convoqués par Saâdane…

Moi aussi, je voudrais en parler cette fois.

Voilà ce qui arrange tout le monde. Qu’avez-vous donc à dire ?

Franchement, je n’arrive plus à suivre cette manière de m’écarter et de me ramener à chaque fois. J’en ai marre de vivre cela à chaque fois. Je veux que ça change une bonne fois pour toutes. Que le staff technique ait une seule décision, une seule voie à mon égard.

Et c’est quoi cette voie que vous proposez à Saâdane ?

Qu’on m’écarte ou qu’on me laisse de manière définitive. Je ne veux plus revivre cette situation. C’est un feuilleton qui a fini par me lasser. Je ne veux plus revivre cela !

On sent que ça vous exaspère, non ?

Bien sûr que ça m’exaspère. Je suis extrêmement déçu de ne pas trouver mon nom sur la liste des joueurs convoqués. Et à chaque fois c’est le même scénario qui se répète. La dernière fois, on m’avait dit que c’est parce que j’avais été expulsé contre l’Egypte. Soit. Mais est-ce qu’on est oublieux à ce point pour ne pas compter les deux autres expulsions ? Il n’y avait pas que moi dans ce cas. Mais les gens ont voulu focaliser sur Chaouchi, parce que ça les arrangeait bien. Il a fallu que le public du stade du 5-Juillet exerce une forte pression pour qu’on me ramène dans l’équipe après la défaite contre la Serbie. Je ne vois pas pourquoi on m’a écarté cette fois de l’Equipe nationale. Qu’ai-je fait de mauvais ? Est-ce que j’ai été indiscipliné lors du Mondial ? Qu’on me dise alors ce que j’ai fait de mal, si c’est le cas !

On vous a reproché de vous être emporté avant le match contre les USA en voyant M’bolhi titulaire et vous remplaçant. Vous confirmez ?

C’est archi faux ! Je n’ai causé aucun problème à qui que ce soit. Le même scénario qui s’est produit avant le match face à l’Angleterre avait eu lieu aussi la veille du ¼ de finale de la CAN en Angola, face à la Côte d’Ivoire. J’avais raté une séance pour un problème de santé et le jour du match, j’avais pris ma place naturellement. Aujourd’hui, personne ne peut nier mon rôle dans cette victoire arrachée face à Didier Drogba et ses camarades. Avant le match contre les Anglais, j’avais vécu exactement le même scénario, je m’étais même joint au groupe lors de la dernière séance et le staff médical avait donné son aval pour que je joue, mais dès l’annonce de la liste des joueurs titulaires, je me suis retrouvé sur le banc des remplaçants. Il paraît qu’ils se sont réunis le matin du match pour décider de m’écarter de l’équipe…

En toute franchise maintenant. On nous a dit même à nous que vous aviez fait un grand tapage dans votre chambre et dans le couloir pour manifester votre colère en apprenant votre mise à l’écart. Vous niez cela ?

Je vous jure par Dieu Tout Puissant que je n’ai fait aucun tapage de ce genre. Tout ce qu’on vous a raconté à mon sujet est faux. Il n’y a qu’Allah qui peut témoigner de ma sincérité et c’est Lui que je mets entre la vérité et moi. Ceux qui ont fait circuler ces rumeurs ont juste voulu me nuire. Je les laisse avec leur conscience et qu’Allah prenne ma revanche sur eux, car ils m’ont beaucoup nui. C’est une totale injustice et j’espère que la vérité éclatera un jour sur leur figure.

Est-ce que vous visez Rabah Saâdane dans vos propos ?

Non, je ne vise personne en particulier, puisque je ne sais pas qui est à l’origine de ces mensonges et de cette injustice. Par contre, ce que je peux dire à propos du coach, c’est que j’en ai marre en fin de compte qu’il dise de moi à chaque fois que je suis indiscipliné. Je ne sais vraiment pas ce que le staff technique considère à ses yeux, comme des actes d’indiscipline. Chaouchi n’a jamais refusé une convocation en Equipe nationale. Tout comme je ne me suis jamais bagarré avec un de mes coéquipiers, ni insulté qui que ce soit dans l’équipe. Alors pourquoi se permet-on de dire que Chaouchi est indiscipliné ? Je suis donc tout ce qu’il y a de normal. Je mets au défi tout le monde pour relater une scène d’indiscipline de ma part au sein de l’équipe. Si le coach a quelque chose à me reprocher, qu’il le dise devant tout le monde, en conférence de presse même, car je suis persuadé de ma correction au sein de l’équipe. Je sais que je n’ai rien à me reprocher.

Avez-vous été affecté en apprenant dans les journaux que Chaouchi ne remettra plus jamais les pieds en sélection ?

Vous savez, ce qui m’a fait mal, c’est uniquement de ne pas voir mon nom sur la liste des joueurs convoqués. Le reste n’est que bobards et racontars de journalistes en mal de scoop. Ce sont les mêmes journalistes qui avaient écrit aussi que Chaouchi ne jouera pas le Mondial, après la CAN en Angola. Mais ils ont tous vu que j’y étais en fin de compte. Et grâce à qui ? Au soutien et à la pression du public du stade du 5-Juillet contre la Serbie.

Et qu’en est-il du but que vous avez pris face aux Slovènes ?

Vous pouvez revoir le match si vous voulez et vous remarquerez sans doute qu’à part ce malheureux but, j’ai été présent sur toutes les autres balles dangereuses. J’ai peut-être une part de responsabilité sur ce but, mais je crois que le ballon Jabulani aussi y était pour beaucoup. Ceci, sans parler des défenseurs qui auraient dû être présents pour empêcher le tireur de tirer. Ce que j’ai remarqué dans cette histoire, c’est que, curieusement, le monde entier a commenté ce ballon, émettant de sérieux doutes sur sa qualité et les trajectoires fuyantes qu’il prenait dans les tirs lointains, sauf en Algérie, où il y a eu très peu de débats sur ce sujet. A croire qu’on n’était pas concernés par cela. Mais je pense que c’était aussi facile de mettre tout sur mon dos. Ça plaisait à certains.

Comment voyez-vous les matchs des prochaines éliminatoires ?

Ce sera extrêmement difficile pour nous, surtout en Tanzanie et la République centrafricaine. Parce que face à ces deux pays, on jouera pour arracher les trois points de la victoire et pas autre chose. C’est là qu’il faudra faire le plein en points. Car face au Maroc, ce sera une autre affaire. Les Marocains ont hâte de revenir aux premiers rangs et arracher la qualification en Coupe d’Afrique. Il faudra se mobiliser dès aujourd’hui pour ne pas se rater.

Quel message voudriez-vous lancer à votre sujet à propos de l’Equipe nationale ?

Je voudrais que les choses soient claires à mon sujet. Soit qu’on m’écarte, soit qu’on me remette de manière définitive. Je ne veux plus qu’on s’amuse à me ramener et à me renvoyer à chaque fois, en attendant de me rappeler grâce à la pression du public. Que les choses soient claires une bonne fois pour toutes ! C’est cela que j’attends désormais.

Revenant maintenant à l’Entente. Que pensez-vous de l’avenir du club dans cette aventure africaine ?

Je dirai que les choses se déroulent normalement et tous les joueurs sont mobilisés pour aller loin cette fois. Ceci dit, pour réaliser cet objectif, il nous faudra arracher un bon résultat face à Mazembe. Il faudra viser au moins le match nul pour ne pas devoir repartir de zéro par la suite. Ce sera un match de vie ou de mort pour la suite.

Et pensez-vous que le groupe est capable de cela ?

Bien sûr qu’on en est capable, malgré la défaite contre l’ES Tunis. Avec un effectif aussi riche et des joueurs aussi expérimentés et le retour de Hemani, Yekhlef et Hadj Aïssa, l’équipe ne se portera que mieux. C’est donc bien dans nos cordes. Tout le monde en est conscient. Car la Ligue des champions demande beaucoup d’expérience et de solidité à tous les niveaux.

Comment avez-vous choisi de renouveler votre signature avec l’ESS ?

Le plus normalement du monde, car depuis le début, j’ai été très clair. Il était question que je parte à l’étranger ou que je reste à l’Entente. Je devais un moment aller en Espagne, puis pour des raisons qui me regardent, j’ai préféré avantager la stabilité avec l’ESS.

De quels trophées rêvent Chaouchi avec l’Entente ?

J’ai gagné le titre de champion d’Algérie avec la JSK et la Coupe avec l’ESS. J’ai aussi gagné d’autres titres, comme la Coupe nord-africaine. J’ai joué la Coupe du monde avec la sélection et je rêve de la rejouer avec mon club. Pour cela, il faut impérativement qu’on gagne la Ligue des champions. Seul ce trophée pourra nous permettre de jouer contre les plus grands clubs du monde. Ce serait un immense honneur pour moi, mes coéquipiers, les supporters de l’Entente et toute l’Algérie.

Vous avez manqué la séance matinale de lundi. Peut-on savoir pourquoi ?

C’est à cause d’un petit problème au niveau de la cheville. Je voulais être sûr qu’il n’y avait rien de grave, c’est pour cela que le staff médical m’a emmené faire des radios. Je ne veux prendre aucun risque avant ce match très important face à Mazembe. C’est un match très décisif pour l’ESS et personne n’a envie de le rater. C’est à mon sens le match le plus important de la saison. Si on arrive à passer ce cap avec succès, nos chances d’aller au bout de cette Ligue des champions seront encore plus grandes.

Entretien réalisé par Samir Bechir