Le prix de la monnaie européenne dans les marchés parallèles a atteint, depuis quelques jours, un seuil impressionnant. Actuellement, pour 1 euro il faut débourser 142 dinars.
Du jamais vu. Pourquoi cette flambée record ? Une question que tout le monde se pose ; toutefois, la réponse bien quelle soit expliquée par certains observateurs n’est toujours pas convaincante pour les clients.
Ces derniers pensent que certains «opportunistes» veulent de temps en temps tirer profit en faisant monter le prix de l’euro afin de s’enrichir rapidement. Pour mieux comprendre cette montée anormale de l’euro, nous nous sommes dirigés vers certains lieux d’échange de devises, à Alger. Une petite virée dans les marchés de l’informel des devises nous a permis de constater cette situation assez particulière, et de tirer quelques raisons qui sont derrière cette montée de l’euro. Ainsi, notre petit périple commença au marché noir de devises de Port-Saïd, le lieu le plus attractif des monnayeurs de l’euro. Ici, le prix du billet bleu a atteint son paroxysme.
En effet, 1 euro a été échangé à 142 dinars durant la journée d’hier. Selon les vendeurs, cette flambée de l’euro a pour seule explication le manque de liquidités de cette monnaie européenne sur les marchés parallèles.
Donc, à partir de cette situation, la demande a été plus importante que l’offre, et c’est ce qui est à l’origine de sa cherté. Avant que le prix de l’euro n’atteigne ce seuil fou, il coûtait il y a trois ans 115 dinars pour un euro, mais aujourd’hui le prix a beaucoup grimpé. Pis, selon toujours ces monnayeurs, son coût va s’aggraver dans les mois qui viennent, car il y aura toujours une sorte de «pénurie» de l’euro d’ici là, alors que la demande, elle, sera beaucoup plus importante. Cette prévision inquiète de plus en plus les clients, d’autant que beaucoup d’Algériens s’apprêtent à se rendre en Europe, plus particulièrement en France pour passer les vacances de printemps.
Une situation qui inquiète également les commerçants qui voyagent souvent vers le Vieux continent vu leurs activités commerciales. Et pour éviter de débourser encore plus, certains Algériens ont préféré s’approvisionner en euros dès maintenant.
Cette situation avait causé une flambée de l’euro, expliquent certains observateurs. D’après ces experts, ce qui s’est passé récemment, notamment les coup-de-poing faits par les policiers dans les milieux de l’informel de devises sont également derrière cette flambée de l’euro, voire aussi le manque flagrant de liquidités dans les marchés noirs. Ce n’est pas tout, ajoutent ces monnayeurs. Les événements qui se sont produits en Tunisie ont aussi causé la montée spectaculaire de la monnaie étrangère. En effet, les algériens qui se déplacent souvent en Tunisie, se rabattent sur les marchés noirs des devises, afin d’acheter de l’euro ou le dinar tunisien, mais depuis les émeutes qui se sont produites dans ce pays voisin, ces derniers ont boudé cette destination, ce qui a causé en contrepartie, la flambée de l’euro. Un effet boomerang.
En fait, d’habitude la demande était trop importante par rapport à l’offre, ce qui s’est traduit par une baisse de l’euro, mais depuis que la demande se fait rare, le prix de l’euro a augmenté, d’autant plus que la quantité de la monnaie européenne sur le marché informel n’est plus comme avant, c’est-à-dire, beaucoup moins importante. D’habitude, la plus importante quantité de devises au niveau des marchés parallèles provient des émigrés qui voyagent souvent entre Alger et d’autres villes européennes, mais aussi de certains
«barons» qui contrôlent ces points noirs. Mais, après les récentes arrestations qui ont eu lieu à Port-Saïd et Hydra, deux importants marchés de l’informel de la capitale, l’euro se fait rare. En effet, les services de sécurité avaient lancé, en novembre dernier, des opérations dans ces marchés noirs de la devise. Cette action était destinée à identifier les personnes qui faisaient partie des réseaux de trafic de l’euro et du dollar. Ils étaient en activité depuis 2003.
Treize personnes ont été arrêtées durant ces deux opérations des services de sécurité, tandis que le «cerveau» d’un des réseaux est toujours en fuite. Pour rappel, ces trafiquants arrêtés ont réussi à envoyer vers des banques étrangères, en utilisant des prête-noms vers des comptes bancaires plus de 15 millions de dollars, et près de vingt millions d’euros.
La destination finale de cet argent n’est autre que le nouveau paradis fiscal, Dubai, aux Emirats arabes unis. Toutefois, les services de sécurité ont réussi à mettre fin aux pratiques de ces deux réseaux, à partir des enquêtes menées par la brigade des recherches de la Gendarmerie nationale de Bab Djedid.
Par Sofiane Abi