La période de deuil ayant été consumée avec ses hommages populaire et officiel, sincères ou non et leur cortège de dithyrambes et de manifestations unanimistes, de façade ou pas, le moment est, peut-être, venu, au-delà de l’inflation d’interviews, de prises de position et d’articles encenseurs ou démolisseurs, de chercher à répondre à un certain nombre de questions de fond que tout politologue ou historien doit, objectivement, se poser. Naturellement, sans se départir ni du respect dû au défunt, ni du souci d’éviter les pièges de la facilité et du traitement, à chaud, d’un sujet qui n’a pas, encore, livré tous ses secrets.
L’une des questions qui vient, à l’esprit, en premier, parce qu’elle résume la substance des interrogations qui tournent autour du personnage, consiste à se demander si le président Chadli Bendjedid fut, réellement, un éclaireur, doué d’une grande intelligence politique, même pragmatique, maître de ses décisions, réfractaire à toute interférence dans ses pouvoirs constitutionnels, en un mot, un faiseur de l’Histoire, ou bien, simplement, un produit de son temps et de sa société, soumis à leurs contingences et embarqué, malgré lui, dans une série de problématiques et de crises qui l’ont dépassé et sur lesquelles, prisonnier de leurs contradictions, il n’avait aucune prise, car mettant en jeu des forces sociales concurrentes et des hommes aux intérêts opposés dont il fut plus l’objet que le sujet. Il s’agit, en d’autres termes, de savoir s’il a compté parmi «ceux qui ont forgé l’Histoire» ou parmi «ceux qui ont été dans l’Histoire», pour paraphraser un des aphorismes dont le président Houari Boumediàne était friand et qu’il a laissé à l’usage de la postérité comme étalon à l’aune duquel devrait être mesurée la stature d’un leader. A moins d’être un César, un Alexandre, un Lénine ou un Mao Tsé Toung qui ont, par la seule force de leur pensée et de leur action personnelles, changé la face du monde, en y laissant une empreinte indélébile, un homme d’Etat, quels que soient son génie, son talent et sa clairvoyance, ne saurait échapper aux lois qui régissent le mouvement des sociétés et des époques. Il se trouve, souvent, emporté par une dynamique imprévue, l’amenant, contre son plein gré, à construire un projet ou à réaliser un programme tout à fait éloignés de ceux dont il pensait être, initialement, porteurs. Les exemples de ce genre de situations sont innombrables et font jurisprudence, depuis des lustres. Combattant de la première heure de la Révolution armée, membre du groupe dit du «Bec de canard» et impliqué dans les événements, non élucidés, intervenus à la Base de l’Est, Chadli Bendjedid est le fils de cette paysannerie qui a, dès le départ, manifesté et imposé sa volonté de diriger le pays, en tant que classe dominante, au motif qu’elle l’a libéré. A l’exclusion de toute autre force, notamment de l’élite intellectuelle dont elle s’était, toujours, méfiée et qu’elle a tenu à distance du premier carré du pouvoir et de ses centres névralgiques de décision. N’ayant, nullement, nourri l’ambition d’accéder à la plus haute charge de l’Etat, ce père de famille tranquille, comme le définit Mouloud Hamrouche, son quatrième chef du gouvernement après Mohamed Ben Ahmed Abdelghani, Abdelhamid Brahimi et Kasdi Merbah, s’est vu, subitement, propulsé sur le devant de la scène politique algérienne, à un moment où perçaient, dans le monde et en Algérie, les germes de violents changements.
1- L’avènement d’un monde unipolaire
A l’époque de sa cooptation, en tant que troisième président de l’Algérie indépendante, dans des conditions tenues secrètes, le monde accouchait, dans une extrême douleur, au sortir d’une guerre froide larvée, d’une configuration géostratégique sans précédent. Le gel brejnévien qui avait paralysé l’Union soviétique, pendant plus d’une décennie, touchait à sa fin, signant le déclin et, bientôt, l’éclatement de l’Empire. Le capitalisme entrait dans une phase de mutation et de restructuration radicales, annonciatrices de Ronald Reagan et de Margaret Thatcher appelés à conduire la charge impitoyable du néolibéralisme, avec l’ambition de l’étendre à toute la planète, à commencer par le bloc communiste contre lequel ils préparaient la guerre des étoiles. Le Mouvement des pays non alignés, miné par la guerre d’Afghanistan, surpris par la Révolution islamique de l’ayatollah Khomeiny et affaibli par le sanglant conflit irano-irakien, n’avait plus d’influence dans la balance des rapports de force internationaux, se contentant d’être une coquille vide transformée, au sixième Sommet de la Havane de 1979, en une tribune de vaines querelles de leadership entre Fidel Castro et Josip Broz Tito, le dogmatique pro-soviétique inconditionnel et le vieux révisionniste anti-stalinien, tous les deux, fortement, diminués. En mai 1981, François Mitterrand, l’ancien ministre de la Justice de la France coloniale, responsable de l’exécution de nombreux révolutionnaires algériens condamnés à mort, accédait à la magistrature suprême avec un programme d’action international pro-israélien et néo-colonialiste. Autant de lames de fond qui vinrent frapper l’Algérie, de plein fouet, et la priver de ses soutiens traditionnels qui l’aidaient à maintenir, vaille que vaille, le cap sur sa ligne d’orientation dite «non capitaliste» et d’équidistance entre l’Est et l’Ouest, plus proche du premier que du second, à telle enseigne que de larges pans de l’opinion américaine la tenaient pour «un pays communiste», une étiquette qui alimenta, à son égard, une vieille animosité occidentalo-sioniste, non encore éteinte.
2 – Une société algérienne saturée d’autocratie
Ces bouleversements externes, intervenus en cascade, en l’espace de trois années ( 1979-1981) se conjuguèrent à un bouillonnement social et politique intérieur, latent, généré par l’échec du «boumediénisme » , un mélange détonant de despotisme éclairé et de socialisme bureaucratique considéré, jusque-là, comme le seul modèle de développement et de société en phase avec les engagements de la proclamation du 1er Novembre 1954. La bourgeoisie d’Etat qui s’était, longtemps, cachée derrière le confortable alibi idéologique du socialisme, se sentira, bientôt, à l’étroit, corsetée dans un système arrivé à ses ultimes limites et condamné à se réformer ou à disparaître face aux demandes instantes d’une société saturée d’autocratie, de privations et d’enfermement.
Cela fut l’objet d’un débat houleux ouvert, d’abord, dans le cercle restreint des initiés, puis brusquement, étalé sur la place publique, entre orthodoxes et hétérodoxes, l’aile conservatrice et l’aile dite libérale du FLN, la devanture derrière laquelle l’Etat et ses démembrements invisibles gouvernaient. Les observateurs retiendront que le pic du débat médiatique lancé, à ce sujet, fut atteint avec la publication des articles sur «le socialisme de la mamelle» par l’hebdomadaire Algérie- Actualités. Jusqu’ à la crise pétrolière et à l’effondrement du dollar, survenus au milieu des années 80, les équilibres entre les différentes composantes du pouvoir d’Etat furent maintenus, au moyen de laborieux compromis qui permirent aux tenants de l’Infitah à l’algérienne, de prendre tout leur temps, afin de jeter les premiers jalons de l’économie «libérale», à travers toute une panoplie de mesures ou le lancement du programme anti-pénurie (PAP), la restructuration, pour ne pas dire la destruction, de l’économie nationale, surtout, dans son volet industriel pulvérisé, tinrent une place prépondérante.
Conformément aux mêmes dispositions et aux mêmes préoccupations que l’Egypte de Sadate qui préconisait la privatisation du secteur économique d’Etat et l’ouverture sur le marché international comme la solution de rupture, par excellence, avec le socialisme spécifique passé de mode dans de nombreux pays du Tiers-Monde. La structure du pouvoir s’articulait, alors, autour de trois pôles principaux consacrés par le long compromis politique historique conclu en 1962 entre, d’une part, l’ANP, «des militants en armes», héritiers de l’ALN et de l’OS, et de l’autre, le FLN qui n’avait pas renoncé à ses ambitions de gouvernement autonome, rêvant de se réapproprier le rôle du PPA-MTLD d’avant 1949 et, en troisième lieu, la Haute Administration noyautée par les ersatz de l’ancienne féodalité collaboratrice de la colonisation et tapie dans l’ombre de l’opposition aux options dites socialistes, en particulier la Révolution agraire et l’arabisation de l’enseignement et des grands services publics.
3 – La fin du compromis politique historique de 1962
Tant que la répartition de la rente ordonnancée, proportionnellement, à la puissance clientéliste de chaque grand corps, ne souffrait d’aucun aléa contrariant, le compromis se poursuivit, rythmé par des replâtrages, des reclassements et des remaniements périodiques dans les sphères intermédiaires. Mais dès lors que des facteurs internes et externes de remise en cause de ce compromis et de ces mécanismes de distribution des richesses nationales apparurent dans des formes violemment déstabilisatrices, «les masques» tombèrent un à un et le peuple algérien découvrit subitement la faiblesse et la vulnérabilité de ce fragile équilibre, assistant à l’assaut lancé par «les libéraux» armés de projets politiques et économiques d’élargissement de la base du pouvoir d’Etat aux nouvelles fortunes, contre «les conservateurs» qui, eux, se prenaient pour les gardiens du temple et même, dans un réflexe désespéré, pour les alliés stratégiques de la gauche du «soutien critique», mise en alerte dans son fief de la zone industrielle de Rouiba où elle lança, avant le 5 Octobre 1988, une grève générale, le premier signal du déclenchement de la confrontation. A ce moment-là, l’islamisme, déclinaison du wahhabisme importé d’Arabie saoudite, était la couverture politique de l’affairisme bazariste greffé au système informel de la bourgeoisie d’Etat, d’où la naissance d’un compagnonnage sinon admis, du moins toléré, jusqu’à la création des premiers maquis du déserteur Bouyali. L’appétit venant en mangeant, l’intégrisme montra, en effet, des yeux plus gros que le ventre. Et ni les séminaires sur la pensée islamique, conçus comme des contre-feux, ni les sermons du Cheikh El Ghazali, le chef de l’Internationale des Frères musulmans, appelé en renfort pour «éduquer le peuple» n’eurent d’effets — sinon contraires à ceux escomptés — sur un mouvement qui allait en se radicalisant, s’attaquant au cœur même de la société. Il fallait, d’ailleurs, une grosse dose de naïveté politique pour croire y arriver, à bout, par ces procédés puérils. On ne sait pas encore — et on ne le saura, peut-être, jamais — si le 5 Octobre 1988, émaillé de flagrantes violations des droits de l’Homme, fut un mouvement populaire ou une manipulation qui était, selon certains, le fait délibéré non pas de Chadli Bendjedid, réduit à essuyer les plâtres, mais de certains membres influents de son entourage et des éminences grises du «capitalisme algérien» conquérant, aidé par un Mitterrand à la recherche d’une revanche sur l’Histoire.
4- Le retour à la Maison de l’Obéissance
Ce séisme qui emporta 500 victimes en même temps que le secrétaire permanent du Comité central du Parti et celui des services de sécurité, alliés, désormais, encombrants, accoucha du multipartisme et de la presse écrite privée après que la Radio-Télévision algériennes, un bastion, que le président Houari Boumediène, questionné là-dessus, avait dit qu’il la classait en deuxième position, après la Défense nationale, fut éclatée en quatre entreprises, pour céder le passage, en force, aux télévisions d’outre- Méditerranée chargées, sur les conseils de Jack Lang, de liquider la révolution culturelle par la débunkérisation du raï, au festival de Bobigny, et de diffuser, à l’attention des téléspectateurs algériens, la publicité des produits français mis en circulation sur le marché national de l’informel. Personne ne peut affirmer, aujourd’hui, qu’à ce stade de l’évolution de la confrontation, le président de la République avait la situation en main et s’il était la source unique des décisions. Le contraire semble être plus plausible, si l’on en croit les révélations de la presse sur les passages des «Mémoires» de Chadli Bendjedid, relatifs à cet épisode, lesquels mettent en exergue, plutôt, le rôle actif, dans ces événements, du général Larbi Belkheir. Dans la logique des processus internes et externes mentionnés, ci-dessus, le retour de l’Algérie à la Maison de l’Obéissance se vérifia, à l’occasion de l’inauguration d’une ère d’entente avec la France et le Maroc, les deux pays alliés lors de la Marche verte et de l’épisode «des Jaguar» de Giscard d’Estaing, contre le pouvoir révolutionnaire de Houari Boumediène. La voie était toute tracée pour l’adoption et la mise en œuvre d’un train de réformes économiques devant doter le marché et les entreprises de prérogatives et de mécanismes juridiques de nature à leur assurer une autonomie de fonctionnement et de gestion.
5 – Les golden boys de l’Infitah à l’algérienne
Sous la houlette du gouvernement Hamrouche qui succède à Kasdi Merbah, les golden boys de l’Infitah purent, alors, rivaliser d’ingéniosité, à la tête des départements de l’économie et du commerce, pour instaurer le principe de la commercialité des entités économiques, l’indépendance des instruments institutionnels de financement, à travers la réforme du code des investissements, du code du commerce, du code pénal et l’adoption d’une audacieuse loi sur la monnaie et le crédit. Un des artisans de ce dispositif ira jusqu’à lancer un menaçant «ça passe ou ça casse» pour décourager les dernières velléités de résistance. Mais c’était sans compter avec «l’imprévu»( ?), ce FIS légalisé en l’absence du président, en voyage au Sénégal, toujours selon les indiscrétions de la presse sur le contenu des «Mémoires» de ce dernier. Ce nouvel acteur de la scène politique, gonflé à bloc par le vote-sanction anti-FLN aux élections municipales de 1990, boosté par les guerres d’Afghanistan et du Golfe, mobilisa le ban et l’arrière-ban de toutes les forces rétrogrades de la société pour partir à l’assaut d’un pouvoir civil quasiment démissionnaire. Chadli Bendjedid appuyé par Abdelaziz Belkhadem, proche des islamistes, et par Abdelhamid Mehri croyant, l’heure venue, d’entrer dans l’opposition contre l’establishment militaire, pensa qu’une démocratie à la Bani Sadr était possible dans une cohabitation protégée par la Constitution.
6 – Une fin politique sans gloire
Cette erreur fut fatale à un chef d’Etat tenté d’ouvrir la boîte de Pandore et séduit par une aventure électorale qui lui permettrait, selon son intime conviction, de faire d’une pierre deux coups : se débarrasser de ses tuteurs et passer à la postérité, en tant que père d’une démocratie en rupture avec le régime des origines, fût-elle porteuse de germes de la fracture de la société. Pour une fois, peut-être la seule, qu’il s’est mis en première ligne, pour son propre compte, il en paya, sur-le-champ, les frais, annonçant, en direct, sa démission à la télévision, en présence de Abdelmalek Benhabyles, l’ancien président du Conseil constitutionnel qui demeure un témoin silencieux sur cette séquence terminale du triple mandat de Chadli Bendjedid. Il faut bien dire les choses comme elles sont, même si elles déplaisent, parce que si on devait écrire l’Histoire avec les sentiments, on ne se priverait pas de faire le panégyrique d’un homme que beaucoup s’accordent à dépeindre sous les traits d’une personne fort amène, sociable, très pater familias qui donnait de lui l’image d’un président moderne apparaissant, en voyage officiel, ou lors des cérémonies d’Etat, en compagnie de son épouse, un fait rarissime dans le monde arabo-musulman. Il avait formé le projet de hisser le peuple algérien à ce qu’il y avait de meilleur, en termes de consommation et de qualité de vie — le slogan «pour une vie meilleure», choisi pour illustrer un des congrès du FLN, n’était-il pas de lui ? – et aussi en termes d’infrastructures et de monuments historiques, on pense, évidemment, aux autoroutes et à Riadh-El-Feth, le «Houbel» honni par les islamistes et non exempts d’actes de gestion délictueux. Son extraction modeste l’inclinait à la normalité. J’ai eu à corroborer, personnellement, ce trait de caractère, saillant chez lui, en une circonstance particulière. Désigné par le comité d’organisation du 6e Sommet des pays non alignés réunis à la Havane, en qualité de membre du pool TV- Radio du Mouvement, chargé de coordonner la couverture de l’événement, pour le soustraire à la partialité des médias occidentaux, je fus assailli par les journalistes des pays présents, curieux de savoir pourquoi de tous les chefs d’Etat participants, il fut le seul à ne pas avoir pris la parole devant ses pairs, pour un de ses premiers voyages à l’étranger, alors que l’Algérie était très attendue pour arbitrer nombre de questions sensibles et y peser de tout son poids. Je ne sus quoi répondre. De retour à Alger et appelé à El-Mouradia pour assister à la première conférence de presse qu’il eut à tenir face aux responsables de presse que nous étions, je m’étais empressé de lui en demander la raison, en arguant que cela avait, peut-être, fait le jeu des grandes puissances. Il me rétorqua, avec une grande économie dans le discours : «Monsieur Mili, il faut laisser les grands avec les grands !» Je compris, de suite, que pour lui, l’Algérie devait être ramenée à un niveau de normalité plus en rapport avec sa dimension. Malgré ses fréquents déplacements à l’étranger, l’idée qu’il se faisait du rôle international de l’Algérie était conforme à un certain réalisme qui voulait que le pays ne puisse faire que la politique de ses moyens. En cela, sa sagesse avait peut-être raison, notre gros ego d’Algériens a voulu que nous nous voyons, constamment et, à tort, les premiers en tout, souvent, le nombril du monde et parfois, même, les seuls sur la planète, immunisés, ad aeternam vitam, contre toute infection, toute contagion, toute crise, au-dessus de toutes les vicissitudes de la vie des Nations. Un état d’esprit qui nous a joué beaucoup de tours. En dehors de cela, je garderai de lui le souvenir d’un homme digne, accessible, d’égale humeur ; seulement désappointé d’être arrivé aux affaires, par accident, lui qui était pétri des valeurs des hommes simples, contraint de mettre la main dans le cambouis, s’encombrer de trouver des solutions à une crise politique, morale, identitaire et économique aiguë, se faisant conseiller une chose et son contraire : donner la liberté aux chefs d’entreprise de gérer et en même temps les responsabiliser, pénalement, pour leurs actes de gestion ; libéraliser la presse écrite mais garder par devers soi les médias lourds et l’Anep, les nerfs du système national de la communication. Il s’était retrouvé empêtré dans un engrenage inextricable, mais, en dépit de cela, il eut le courage d’affronter la complexité des situations en s’efforçant d’y répondre avec son bon sens. L’action la plus honorable qu’il put réussir et dont l’Histoire du monde arabe lui gardera le témoignage reconnaissant fut, incontestablement, la proclamation de l’Etat palestinien à Alger, en 1988 par feu le président Yasser Arafat, une petite éclaircie dans la nuit noire de cette triste époque. Les conditions dans lesquelles il fut obligé de partir furent moins glorieuses. Mais le jeu politique est ainsi fait. Dura lex, sed lex, la loi est dure mais c’est la loi. La distance qu’il marqua, depuis, par rapport au pouvoir d’Etat et la maladie qu’il combattit, en silence, n’estompèrent, nullement, sa bonhomie et son maintien, toujours soigné, l’air de dire : «Après mûre réflexion, je vous ai, finalement, compris!» D’où ses «Mémoires», les premières d’un chef d’Etat algérien, un pied-de-nez à ses «Méphistophélès», ses adversaires et ses détracteurs, qui fera, certainement, date.
Alors, Chadli, sujet ou objet de l’Histoire ?
Ce long développement aura, sans doute, largement répondu à la question. Quand bien même il n’aura pas été en mesure de façonner l’Histoire car le timon qui la commande lui échappait, il y restera, toutefois, comme la victime de la cruauté de la politique. Avant d’embrasser son magister, il aurait fallu qu’il lise «Le Prince» de Machiavel.
P. S. : Dans la contribution consacrée à Pierre Chaulet, le 9 octobre dernier, dans le Soir d’Algérie, il y a lieu d’apporter les rectificatifs suivants :
1 – Dans le 3e paragraphe de la première colonne, au lieu de «Et bien que grandi…» il fallait lire : «Et parce que ayant grandi dans un milieu de chrétiens sociaux, ayant milité à la tête de l’Association des étudiants chrétiens et été proche d’André Mandouze — des faits qui n’expliquent pas, à eux seuls, son action ni sa décision de se faire enterrer dans un cimetière de la même confession que celle de ses parents, son vœu était de se faire inhumer aux cotés d’Henri Maillot — …, le reste sans changement.
2 – Dans le passage relatif à la lutte contre la tuberculose, il fallait lire «le professeur Larbaoui» et non «le professeur Larbaou»
3 – Il convient d’ajouter le Professeur Boudjellab aux côtés des professeurs Heddam, Mentouri et Toumi, les médecins du maquis.
B. M.