C’était écrit, la démission de Bouteflika : décryptage et vidéo

C’était écrit, la démission de Bouteflika : décryptage et vidéo

C’était écrit : la démission de Bouteflika, signé Benoît Chaumont et Karim Rissouli, est un documentaire qui retrace la chute du président déchu Abdelaziz Bouteflika, diffusé hier, sur la chaine Française France 5. Plusieurs déclarations ont été faites par maintes personnalités au cours des 88 minutes de ce film.

Le Film documentaire diffusé hier sur France 5, revient sur la situation politique en Algérie depuis 2019. Et tente de décrypter le mouvement populaire entamé le 22 février, le Hirak, qui réclame une véritable démocratie. Les 88 minutes de ce film sont partagées entre les instants qui ont précédé la démission de Bouteflika et des flashbacks, qui nous transportent vers les années 1990 et la première investiture du président déchu.

Les deux réalisateurs ont brillamment retracé, événement par événement, les six semaines qui séparent le déclenchement du Hirak de la démission du président Bouteflika. Les belles images des marrés humaines qui ont couvert la capitale sont donc à voir ou à revoir, mais certaines analyses politiques méritent surtout le détour.

Le documentaire a été l’occasion pour plusieurs personnalités des deux rives de livrer leurs témoignages sur la situation de l’Algérie avant le 22 février 2019, mais aussi et surtout sur le président Bouteflika, sa personnalité, son parcours politique, sa maladie et ses errements.  Parmi les interviewés il y a des journalistes, des diplomates, des hommes politiques ainsi que des activistes du mouvement populaire Algérien.

Au plus proche de Bouteflika

« Je suis l’incarnation de l’Algérie », disait Bouteflika en 1999. C’est sur cette déclaration que le documentaire s’est ouvert, mais aussi sur une autre image aux antipodes de la première, celle d’un président malade et muet, qui signe avec beaucoup d’effort sa démission. Le film joue sur ces deux extrêmes tout en saupoudrant les images de déclarations tantôt émues, tantôt inédites, faites par plusieurs intervenants.

Parmi les intervenants Jean-Pierre Filiu, historien, Abdou bendjoudi et Mohamed Tadjadit, militants Algériens, Hassan Ouali et Thierry Thuillier, journalistes, sofiane Djilali homme politique, Sid Ahmed Ghozali, ex chef du gouvernement, ainsi que Jack Lang, qui avait accompagné en 2015 le président Français François hollande en Algérie.

Tous s’accordent et s’émerveillent devant le pacifisme et l’entêtement du mouvement populaire Algérien du 22 février 2019. Hassan Ouali lache même, sur un ton plaisantin, que « Les gilets jaunes devaient faire un stage pratique » au sein des manifestants Algériens qui ont fait preuve d’un grand civisme.

Le documentaire, fait aussi un bref détour et rappelle les conditions de l’élection de Bouteflika en 1999. Le journaliste Français Thierry Thuillier, qualifie Bouteflika d’un « homme qui a le verbe haut, qui parle un français absolument parfait, qui a une connaissance de l’histoire et de la culture Française hors norme », le journaliste, qui a accompagné Bouteflika dans sa campagne électorale de 1999 ajoute que ce dernier « est un admirateur sans limites, sans bornes, du général De Gaulle ».

La chute de Bouteflika, c’était écrit ?

« Moi je l’ai connu à l’époque ou il était ministre des Affaires étrangères…. » indique Jack Lang, président de l’institut du monde arabe. Bouteflika, qui est revenu en Algérie après presque 20 ans d’absence, débarque « directement comme président ». « Il était le seul candidat, donc il ne risquait pas de perdre, indique » Mohamed Sifaoui, Journaliste, tout en soulignant le mépris que le président déchu affichait pour son peuple.

Le documentaire laisserait donc penser, que la chute de Bouteflika s’est amorcée au moment même de son « élection », et que cela est devenu plus flagrant suite à son AVC. Le documentaire revient notamment sur la visite de François hollande en Algérie, et à la « pirouette » qu’il avait lancé aux journalistes après sa rencontre avec un président malade.

L’ancien président Français interrogé sur la santé de Bouteflika par les journalistes, lors de sa visite à Alger, déclare : « Je ne suis pas médecin, et je ne viens pas comme médecin, le président Bouteflika m’a donné l’impression d’une grande maitrise intellectuelle, et même, c’est rare de rencontré un chef d’état qui a cette alacrité ».

« Tous les confrères et consœurs cherchaient, c’est quoi ce mot ! Alacrité ? On était tous plongés dans Google pour trouver ce que cela signifiait » lâche Hassan Ouali, journaliste politique à El Watan. Jack Lang, qui a lui aussi rencontré Bouteflika lors de la visite de Hollande, avait affirmé que « il y avait si j’ose dire Alacrité, si l’on réunissait l’ensemble des propos et en gommant les moments au cours desquels Bouteflika devait reprendre son souffle ».

La chute

Le documentaire va s’attarder sur la marche grandiose, du 8 mars 2019. Suite à laquelle les choses se sont accélérés au niveau de la présidence de la république et de l’ANP. Le film retrace le retournement de la situation, suite au discours de Gaid Salah, qui, après son soutien inconditionnel à Bouteflika, se retourne contre lui, comme dans un film de mafieux de Scorsessse.

Le septième et dernier chapitre du documentaire, justement intitulé le coup de grâce, évoque la dernière grande réunion du chef d’état-major, Gaid Salah, au cours de laquelle ce dernier s’adresse directement au clan Bouteflika. « Depuis le début de cette crise le seul but de l’armée est de veiller à la protection du cadre constitutionnel », déclarait Gaid Salah.

Le chef d’état-major va demander l’application de l’article 102. « A ce moment-là le chef d’état-major coupe la tête au président » indique Hassan Ouali. « L’état-major était prêt à envoyer les chars à la présidence », déclare une journaliste chez Jeune Afrique.

Le film se termine presque sur l’inoubliable « Yetnehaw Gaa », lancé par un jeune Algérien face à la caméra d’une chaine arabophone, suite à l’annonce de la démission de Bouteflika, tout en expliquant que le combat continue…