La lutte de libération de notre peuple a suscité des mouvements de solidarité, des soutiens multiformes, battant en brèche, les insidieuses campagnes de presse destinées à accréditer les thèses erronées d’une Révolution isolée, sans audience ni écho.
L’adhésion sincère de larges franges de l’opinion publique internationale, le ralliement de nombreux démocrates étrangers, ont sonné le glas de toutes ces vaines tentatives de désinformation et de mensonges prémédités. La caractéristique essentielle de Novembre 1954, est d’avoir su recueillir d’emblée, une audience internationale et sa capacité à attirer la solidarité d’hommes et de femmes de beaucoup de régions de la planète y compris au cœur même de la métropole coloniale.
Ils ont fait corps avec la révolution algérienne en ayant l’intime conviction qu’ils se sont rangés du côté du droit et de la justice.
Un anticolonialisme viscéral s’est donc déclenché, avec pour point d’orgue, des voix et des prises de position courageuses qui se sont dressées contre une France coloniale qui s’était résolue à défendre pied à pied un système féodal qui faisait pendant avec son alter ego d’Afrique du sud.
Chacun à sa manière, du plus humble jusqu’à la voix la plus retentissante, des citoyens se sont portés à la rescousse d’un combat pour la fin de l’injustice. Le seul mouvement de solidarité de Français et de Françaises, intellectuels de renom, militants progressistes et démocrates impénitents est emblématique du bien-fondé de la lutte du peuple algérien.
L’adhésion délibérée, consciente que l’on a pu constater au fil du déroulement de ces années de feu, incarne une affirmation des valeurs positives de liberté, du droit à l’autodétermination des peuples opprimés. Un tel passage à l’acte induit forcement, des manifestations exacerbées d’opprobre, de vindicte, des levées de bouclier haineuses, des stigmatisations aveugles et acharnées de la part des partisans de l’Algérie française.
Francis Jeanson dans son honorable plaidoyer, écrit en 1960, destiné aux pourfendeurs les plus endurcis disait « Mes compagnons et moi, nous incarnons l’honneur de la France. Ce que nous avons fait, nous l’avons fait pour défendre une cause, sans doute juste mais pour défendre, je le répète, l’honneur de la France.
C’est pour faire corps avec la Révolution algérienne que de nombreux Français et Françaises de toutes les conditions sociales, sont venus d’horizons politiques et idéologiques divers, pour contribuer à l’indépendance de l’Algérie.
On connaît le poids de leur apport et surtout les sacrifices qu’ils ont consenti n’hésitant pas le risque évident d’être mis au banc de la société, torturés, incarcérés, assassinés et pourchassés comme de vulgaires malfrats.
La victoire algérienne est le fruit d’une synergie de combat osmotique, fraternelle qui a fini par éliminer les scories du colonialisme.
Les attaques subies par les « patriotiques » censeurs qui les avaient accusés d’avoir perdu le sens de la communauté, de trahison et d’atteinte à la cohésion nationale, n’ont pas manqué.
Francis Jeanson, encore une fois, dans une réplique à la fois caustique et sarcastique y avait répondu avec la lucidité du militant engagé, faisant front face à ces jugements d’arrière-garde.
« Aurions-nous cessé par malheur, d’être Français sans le vouloir, comme on s’enrhume ou comme on devient chauve ? ». Mystère !
En fait, on n’a pas besoin d’être dans le secret des dieux pour comprendre et déceler les motivations qui les ont poussés à faire cause commune avec le combat du peuple algérien.
Il y a d’abord les principes qui n’ont jamais fait défaut à tous ces Français, pour aiguiller leur engagement.
L’énorme absurdité de cette guerre anachronique, perdue d’avance et qu’il fallait combattre et désavouer tout comme aurait dû l’être la guerre coloniale précédente contre le peuple vietnamien.
La criminelle obstination des forces réactionnaires et rétrogrades qui avaient accumulé les raisons de l’explosion de Novembre 1954.
La gigantesque répression de Mai 1945 et les ignobles comportements des forces de l’ordre durant cette période prétendument paisible qui va de mai 45 aux derniers mois de 54.
On ne pouvait plus traiter un peuple de la sorte. Rien ne pouvait plus justifier un tel diktat.
Foncièrement, cette guerre était injuste, imbécile et sans issue pour les tenants du colonialisme et de l’arbitraire. Il n’existait aucune chance de venir à bout du peuple algérien.
Forts de cette conviction, les progressistes français, n’étaient ni des blousons noirs et ce n’était pas de gaieté de cœur qu’ils se sont « mis hors la loi » comme le faisaient accroire une propagande qui ne cessait plus de les couvrir d’un pseudo manteau d’opprobre.
A l’évidence il n’était pas aisé de vouloir se mettre aux côtés d’un peuple opprimé. Cette mutinerie de l’esprit qui a effarouché tant de mandarins de la pensée avec leurs sentences, n’avait rien à voir avec un Albert Camus qui a eu à choisir sa mère en lieu et place de la justice.
Aujourd’hui, il n’est pas inutile de réitérer un hommage à ces Français courageux par devoir de reconnaissance. Beaucoup ont eu à vivre des moments difficiles pour leur engagement. Des gens d’église (Chaulet, Declercq, l’abbé Scotto…), les Audin, Mandouze, Timsit, Yveton, Laban, Lavalette, Mine et tant d’autres.
Certains comme Henri Alleg ont dénoncé la torture, tandis que d’autres ont déserté, se sont engagés avec armes et bagages comme l’adjudant Maillot, d’autre se sont chargés de défendre « les damnés de la terre » comme Frantz Fanon, qui disait d’ailleurs, que chaque fois que la liberté et la dignité de l’homme sont en question, nous sommes tous concernés blancs noirs ou jaunes.
Il y en a qui ont soutenu la Révolution algérienne en créant des réseaux de soutien clandestins comme Jeanson, Curiel ou Raptis.
Des cinéastes tel René Vautier qui était dans les Aurès pour faire de sa caméra un témoin de ce combat.
D’autres épris de paix ou simples objecteurs de conscience, ont refusé de cautionner cette guerre injuste.
La morale de l’histoire est simple. La France coloniale fut une trahison des idéaux de la révolution française de 1789. On n’en sort jamais indemne d’avoir à les fouler du pied.
M. Bouraïb