Ce que sera Oued El-Harrach dans quatre ans, Algériens et Coréens à pied d’œuvre

Ce que sera Oued El-Harrach dans quatre ans, Algériens et Coréens à pied d’œuvre

Repère pour certains, source de désagréments pour beaucoup d’autres, le mythique Oued El-Harrach va subir un traitement de faveur qui verra sa transformation en futur centre de gravité de la capitale. Un mégachantier de 38 milliards de dinars que nous exposent les autorités de la wilaya d’Alger.

Il faut dire tout de suite que l’aménagement de cet oued a depuis longtemps été une préoccupation pour les pouvoirs publics. Les trois sources de pollution (urbaine, industrielle et agricole) ont de tout temps incité à sa prise en charge. Quatre zones industrielles comptant 473 unités implantées sur 740 ha, soit 9% des zones urbanisables de la wilaya d’Alger. De cette surface, seulement 30% sont actuellement raccordés aux stations d’épuration. Ajouter à cela les inondations importantes dont la crue centennale atteint un débit de 2 500 m3/seconde.

À la faveur de la bonne santé financière du pays, le projet a pris de l’ampleur, et ce qui n’est au début qu’une affaire de curage et de traitement devient l’un des grands chantiers du siècle à Alger. Les trois études engagées sur l’aménagement de l’oued, du plan directeur de sa requalification ainsi que l’aménagement de la baie d’Alger ont abouti au constat que voici : forte exposition aux inondations, pollution et mauvaise qualité de l’eau, dénaturation des berges, absence d’aménagement de celles-ci, une zone riveraine peu attractive et peu accessible.

Tout cela donne des implications néfastes sur le citoyen et l’environnement.

En matière de réduction de la pollution urbaine, les actions portent sur la réalisation de la première et la deuxième tranches de la Step de Baraki englobant 235 km de collecteurs principaux et secondaires.

La réduction de la pollution d’origine industrielle, lancée par le ministère de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement, inscrit la réalisation de deux Step de 100 000 Eq/h chacune.

Le projet Jasmin

Oued El-Harrach a de tout temps été caractérisé par les mauvaises odeurs. Que vous soyez visiteur ou de passage, vous devez subir en silence ce désagrément. Bien que des efforts aient été accomplis pour atténuer quelque peu les nuisances olfactives, les riverains ont du mal à s’y habituer. Pour les réduire, un projet unique dans le monde : le projet Jasmin visant à neutraliser temporairement les odeurs à grande échelle et dans des espaces ouverts.

Le système consiste en l’application d’un gel solide sur les ponts à forte circulation piétonne ainsi que la brumisation d’un produit liquide sur le pont de l’autoroute de l’Est. Pour ce qui est des inondations récurrentes, le projet prévoit la mise en œuvre d’une première tranche d’aménagement, dite d’urgence.

Les travaux répartis en trois lots concernent dans une première phase l’aménagement de l’embouchure, la réalisation de deux bras à l’intérieur de la mer et le dragage du lit de l’oued et d’une digue d’enclôture de 6 ha. Le deuxième lot prévoit la construction d’un mur de soutènement de 320 m avec une hauteur de 9 m. Le dernier lot se rapporte au recalibrage et reprofilage de l’oued consistant à faire passer la largeur du lit de 20 à 80 m avec aménagement des confluences des oueds Smar et Adda sur 100 m.

Un nouveau centre de gravité

Les objectifs de cette gigantesque opération sont de faire d’Oued El-Harrach le nouveau centre de gravité de la baie d’Alger autour duquel seront implantés plusieurs projets structurants, comme la Grande Mosquée d’Alger, le Musée d’Afrique, la gare centrale ou encore le stade et la Step de Baraki.

De même qu’ils ciblent à créer une zone riveraine attractive, débarrassée du paysage pollué, de valoriser les ressources bleues du territoire, d’offrir des possibilités de réutiliser les eaux pour les espaces verts entre autres.

En somme, un aménagement qui s’inscrira dans l’espace urbain visant de faire d’Alger une ville écologique.

Dans son ensemble, le projet est scindé en deux importants axes, l’un est lié au génie civil (dragage, protection des berges et ouvrages d’art) et l’autre concerne les aménagements (jardins filtrants, système de contrôle et de surveillance de la qualité de l’eau et débit d’étiage, prévision et alerte des crues). Cosider TP, côté algérien, et Daewoo E&C, côté coréen, sont sur le terrain depuis quelques mois.

Décembre 2015 : jardins filtrants et voie navigable

Si l’achèvement des travaux est prévu, selon l’engagement des entreprises en charge du projet, pour décembre 2015, les sceptiques continuent à se poser des questions sur sa faisabilité. L’on nous rassure pourtant à ce sujet que tout est pris en compte. Il s’agit d’abord du recalibrage de l’oued sur plus de 18 km pour porter sa largeur à 100 m et même jusqu’à près de 500 m dans certains endroits. Une opération devant servir, expliquent les services concernés de la wilaya, à l’évacuation de la crue centennale estimée à 2 500 m3/seconde. Pour protéger le centre-ville d’El-Harrach et du quartier Trois Caves, il est prévu la réalisation de murs de soutènement d’environ 9 m de hauteur sur une longueur de 4 km.

Des travaux qui nécessitent près de 6 millions de m3 de déblais, dont un million pour construire les digues.

Le projet prévoit, au grand bonheur des amateurs, de rendre l’oued navigable sur 5 km en abaissant son lit par dragage (2,5 millions de m3). Les berges quant à elles seront protégées de l’érosion par la plantation de 30 000 arbres et 120 000 arbustes. L’embellissement de l’oued ne s’arrêtera pas là.

Trois jardins filtrants verront le jour.

Dans le souci d’améliorer la qualité des eaux et créer ainsi de nouveaux sites pour la faune et la flore, des étangs avec lagunes naturelles seront garnis d’espèces végétales pour réduire la pollution. Le débit sanitaire sera soutenu par la réalisation d’installations de pompage.

Le contrôle et la surveillance de la qualité de l’eau seront assurés par quatre stations de mesure automatique et d’un centre intégré à cet effet. Connu pour avoir ses humeurs cycliques, Oued El-Harrach sera doté d’un système de prévision et d’alerte des crues.

Il est constitué d’un matériel sophistiqué comprenant une jauge, une vidéosurveillance, un haut-parleur, un pluviomètre, un enregistreur de données relié par réseau Internet à un centre de contrôle. Pour profiter de tous ces espaces de détente et loisirs, les visiteurs auront à leur disposition pour se déplacer d’une rive à l’autre, trois ponts en acier de 6 m de large sur une longueur comprise entre 100 et 317 m.

Parallèlement, il est prévu la réalisation de 15 ponts en béton armé pour piétons d’une largeur de 3,5 m pour parcourir environ 40 km de pistes et voies.

Les amateurs de sports collectifs auront la chance de disposer de 6 terrains de football avec gazon naturel, de 4 terrains de basket-ball et de 3 piscines en plein air.

Les visiteurs quant à eux pourront profiter d’un théâtre en plein air, de jets d’eau, d’une marina en bois naturel, des aires de jeux pour enfants, d’une esplanade de détente, des voies et pistes de jogging.

Comme on le constate, ce mégaprojet viendra sans doute résoudre le problème de l’oued emblématique des Algérois, devenu source d’une multitude de nuisances.

Il s’inscrit dans le cadre du fameux plan stratégique de la capitale, dont la concrétisation constitue pour le wali, Addou Mohamed Kebir, son cheval de bataille.

De la révision des PDAU à l’aménagement de la baie d’Alger, en passant par une trentaine d’opérations de relogement ayant fait bénéficier l’équivalent de la population de la ville de Sétif, l’objectif de faire d’Alger une métropole méditerranéenne respectable se profile à l’horizon 2029.

A. F