Carrières d’agrégats de Béjaïa Des zones d’ombre à éclairer

Carrières d’agrégats de Béjaïa Des zones d’ombre à éclairer

Deux carrières situées à Kherrata sont fermées depuis plus de six mois, ce qui inquiète les gérants de ces sites mais également les professionnels du bâtiment contraints d’acheter leurs agrégats dans les wilayas limitrophes.

Cette situation a donné lieu à des révisions en hausse des prix de réalisation de tous les projets nécessitant ce matériau devenu subitement rare. Comment les gérants de ces deux carrières en sont arrivés là ?

En juin dernier, un mouvement de protestation organisé par les citoyens du village Harrira qui les a vus sortir dans la rue en guise de protestation contre l’existence de ces deux sites qui devaient être suivis d’un troisième. Les protestataires ont évoqué des problèmes liés à la pollution provoquée par le passage des engins qui soulevaient d’énormes nuages de poussière.

Un accord est alors trouvé entre les gérants de ces deux carrières dont l’un est en contrat de partenariat avec l’entreprise de réalisation des travaux routiers (ETR) de Béjaïa, pour le bitumage de cette route. La colère ne s’est pas estompée pour autant, notamment suite à l’annonce du lancement d’une troisième carrière sachant que ces trois sites ne nécessitent pas l’utilisation d’explosifs, ce qui est aux yeux des professionnels un investissement sûr.

Selon le P-DG de l’entreprise des travaux routiers, le contrat de partenariat signé avec l’entreprise privée GRAVEMEX , prévoit 70% d’intérêt pour cette société privée qui a mis ses propres moyens pour l’extraction des gravats et les 30% restants pour l’entreprise publique (ETR), qui possède le titre minier attribué par l’Agence nationale du patrimoine minier qui dépend directement du ministère de l’énergie et des Mines.

«J’ai mis des milliards dans cette affaire et voilà que je me retrouve dans une telle situation », nous a déclaré le patron de Gravemex avec un certain regret et non sans ajouter que l’ETR qui détient «uniquement» ce titre minier prend cette part de 30%, faisant allusion que cette part qui revient à cette entreprise publique est exagérée.

Pour en savoir plus, nous avons contacté un responsable de l’agence régionale des mines qui nous a révélé que lors du premier contrat signé entre les deux parties (ETRGravemex) les membres de cette agence ont découvert « par hasard » le site et que le contrat n’était pas conforme.

C’était suite à cette « anomalie » que les deux parties ont été contraintes de résilier ce partenariat sommées de refaire toute la procédure. Selon certains titres de la presse arabophone datant du mois d’avril dernier, il y a eu un procès au niveau du tribunal d’Annaba, où cette affaire a été jugée.

POURQUOI ANNABA ?

La société de la gestion des portefeuilles (SGP) Est/Sud/Est est la première responsable de la société publique ETR de Béjaïa avec une centaine d’autres entreprises qui relèvent de cette même SGP. Ce procès s’est terminé avec des condamnations allant jusqu’à cinq années de prison ferme à l’encontre des responsables dont le P-DG de la SGP, qui diton, a fait appel. Pour en savoir davantage nous avons pris attache avec les responsables actuels de la société de gestion des portefeuilles sise à Annaba.

Toutes nos tentatives qui ont duré presque une semaine se sont avérées vaines au même titre d’ailleurs que les autres tentatives entamées auprès de la direction des mines de la wilaya de Béjaïa. Nous avons alors pris attache avec l’un des responsables de l’Agence nationale de la gestion du patrimoine minier au niveau du département de Chakib Khelil, qui nous a affirmé que cette agence ne s’occupe nullement de la procédure imposée lors d’un partenariat et seule la SGP d’Annaba est habilitée à répondre à nos questions.

Ce même responsable affirme, néanmoins, que le contrat de partenariat entre Gravemex et l’ETR de Béjaïa est seulement soumis à un acte notarié exigé au niveau de l’Agence nationale du patrimoine minier pour l’octroi d’un titre minier permettant l’exploitation des carrières.

À la question de savoir si cette Agence nationale est habilitée à vérifier les modalités d’un tel partenariat, le responsable répond par la négative. Selon d’anciens syndicalistes de l’ETR de Béjaïa, au début du lancement de ce partenariat, cette entreprise publique avait sur ce site de Kherrata ses propres engins. Une affirmation démentie par le P-DG de l’ETR de Béjaïa au début de notre rencontre, qui persiste et signe que Gravemex, qui détient 70% des parts, est venue avec tous ses engins.

Nous nous sommes déplacés à Kherrata où nous avons espéré rencontrer un certain Boumaaza gérant lui aussi d’une « petite » carrière et qu’on présente comme étant l’homme de tous les dossiers concernant les carrières de cette région et qui aurait poursuivi en justice des responsables soupçonnés d’avoir accordé des marchés contraire à la réglementation.

Nos trois déplacements se sont avérés sans résultat, car cet homme à qui nous avons envoyé nos coordonnées ne veut toujours pas se manifester. Pourquoi? Mystère ! La question de savoir pourquoi tous les responsables fuient les questions de la presse concernant ce dossier relatif aux carrières d’agrégats, se pose toujours.

La preuve, lorsque nous nous sommes présentés au niveau de l’ETR de Béjaïa accompagné du patron de Gravemex, l’un des collaborateurs du P-DG était presque hors de lui lorsque nous lui avons posé la question sur la procédure d’un partenariat de ce genre.

«Il n’ y a que le premier responsable qui peut répondre à votre question », dit-il avec une colère qu’il avait du mal à dissimuler et non sans ajouter que notre question n’était pas un pur hasard affirmant qu’un journaliste lui a posé la même question quelques jours seulement avant notre rencontre.

Que cache donc cette colère ? Ce responsable déteste-t-il seulement la presse ou ne souhaite-t-il pas être mêlé à ce genre d’histoire qui en cache peut-être d’autres ?

Boubekeur Amrani